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Март
2016

Myriam El Khomri est-elle convaincue par sa loi Travail qu'elle doit défendre devant le PS?

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POLITIQUE - Le feu promet d'être nourri. A peine sortie de Matignon où elle participe avec Manuel Valls à la relance des négociations sur la loi Travail, Myriam El Khomri a rendez-vous lundi 7 mars, en fin de journée, rue de Solférino pour un bureau national explosif. La ministre du Travail va devoir défendre son texte qui a mis le PS à feu et à sang. Face à elle, quelques membres acquis à sa cause (l'aile droite du parti), Jean-Christophe Cambadélis, en patron hésitant, mais surtout des opposants qui vont cuisiner la jeune membre du gouvernement.

Dans le sillage de la maire de Lille qui a fusillé le texte dans une tribune, ce sont les aubrystes qui auront le plus à dire à Myriam El Khomri. "Ce sera une explication franche", promet l'eurodéputé Gilles Pargneaux dans Le Parisien. Avant cette réunion, les proches de Martine Aubry devraient même officialiser leur départ de la direction socialiste.

Devant les cadres du PS, il va lui paraître loin le temps, où adjointe de Bertrand Delanoë à la mairie de Paris, Myriam El Khomri soutenait Martine Aubry à la primaire socialiste de 2011 contre François Hollande. Est-ce à dire que depuis cette date, la ministre a viré de bord, ralliant la politique sociale libérale du gouvernement? Certains en sont convaincus et le déplorent alors que d'autres se demandent si Myriam El Khomri est elle-même convaincue par sa loi.

Quelle est sa colonne vertébrale?

"Quand je la vois défendre ce projet de loi, je ne la reconnais plus. Soit elle a été convertie au libéralisme échevelé par Pierre Gattaz, soit par ambition, elle s'est assise sur ses convictions", a dit sur RMC le communiste Ian Brossat, élu comme elle du 18e arrondissement de Paris. "Je vous mentirais si je vous disais que je n'étais pas humainement, personnellement et politiquement déçu que Myriam porte cette loi. Je ne crois pas d'ailleurs qu'elle en soit grandement à son origine, pas même de sa rédaction", a carrément dit sur LCI Bruno Julliard, qui assurait avec elle le porte-parolat d'Anne Hidalgo pendant la dernière campagne municipale.

"Aurait-elle été si loin que ce qu'il y a dans le texte actuel?", se demande Annick Lepetit auprès de laquelle elle a fait ses armes à Paris. "Je n'en suis pas sûre", répond la députée de Paris. "Elle n'a jamais freiné des quatre fers sur le projet, en cela on peut dire qu'elle l'assume totalement", dit au contraire une proche.

Alors la réalité est peut-être à chercher au milieu de ces deux analyses. "En 2011, elle a voté Aubry mais dans le sillage de Delanoë et Hidalgo qui sont ses mentors. Sa colonne vertébrale n'est pas simple à trouver. Elle s'est engagée au PS après le 21 avril 2002, surtout sur la question des valeurs. Sur le plan économique, c'est plus compliqué. "Avoir toujours été protégée fait qu'elle manque un peu de repères politiques et je pense que c'est pour ça qu'elle n'a pas mesuré à quel point il y avait un risque de crispation sur le sujet", dit un membre de son entourage.

Touchée par les attaques personnelles

Ce manque de repères, pour d'autres, c'est le signe d'un amateurisme. La conséquence de la nomination à ce poste sensible d'une ministre sans beaucoup de bagage. Hormis un an au secrétariat d'Etat à la Ville, où elle a enchaîné plus de 130 déplacements, son expérience se résumait à un travail axé sur la sécurité à Paris. "Myriam El Khomri était-elle assez taillée pour un tel texte", s'est ainsi demandé le député PS Yann Galut après l'épisode du malaise de la ministre. "Ce n'est pas une calculatrice et parfois ça peut être le défaut d'une qualité", explique un autre parlementaire.



Ce genre d'attaques personnelles ont touché la ministre, comme ce fut le cas à l'automne quand, sur RMC et BFMTV, elle n'avait pas su répondre à une question de Jean-Jacques Bourdin sur le nombre de renouvellements d'un CDD. "Sa confiance en elle en a pris un coup", se souvient un conseiller.

"Il y a une forme d'injustice à ce que le procès soit aussi personnalisé. On ne peut pas à la fois dire que Matignon pilote tout et accuser Myriam El Khomri de tous les mots", dénonce Annick Lepetit. "Les attaques personnelles n'ont pas lieu d'être car c'est le rôle d'un ministre que de porter les réformes", abonde Patrick Louis, patron de la CFTC, syndicat parmi les moins hostiles au texte. "Que des arbitrages aient lieu à Matignon, c'est normal. Le premier ministre est très présent mais ce n'est pas pour ça qu'il faut voir un désaveu de la ministre", reprend le syndicaliste.

Mais à gauche, certains s'interrogent aussi sur les responsabilités. Pour un député, la communication de François Hollande est, au minimum, maladroite. "Quand François Hollande parle d'accident domestique lors de la visite d'une entreprise, quand il demande en conseil des ministres à ses collègues de faire corps avec Myriam El Khomri comme si elle était menacée, ce n'est pas terrible terrible. Ça ne renvoie pas une bonne image", dénonce ce parlementaire.

"Elle est tiraillée entre ce qu'elle doit à Hollande et à Valls"

Une chose est certaine à en croire les responsables syndicaux qui la côtoient depuis qu'elle a remplacé François Rebsamen en septembre: sa compétence de ministre n’est plus en cause. Arrivée rue de Grenelle sans véritable bagage sur les questions d'emploi, "elle a fait beaucoup de progrès, elle connaît bien les dossiers" désormais, selon Jean-Claude Mailly de FO. "Après notre première rencontre, j'ai dit 'c'est quelqu'un de conviction mais pas quelqu'un qui arrive avec des certitudes'. Et je préfère ça, parce que ça augurait d'une possibilité de discussion. Et huit mois plus tard, je ne suis pas déçu, car cela s'est vérifié. Jamais lors des rencontres bilatérales que nous avons eues, je n'ai eu l'impression de faire de la figuration", abonde Patrick Louis de la CFTC.

Non, le problème de Myriam El Khomri est purement et simplement politique. "Elle fait partie de la génération Hollande, mais elle a besoin d'entendre le président de la République et le premier ministre lui dire que son travail est bon", estime un proche qui y voit une position difficilement tenable aujourd'hui. "Elle est tiraillée entre ce qu'elle doit à Hollande et à Valls. Elle doit énormément au Président, mais comme Matignon s'est beaucoup engagé sur le texte, elle ne veut pas décevoir le chef du gouvernement".

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