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Апрель
2016

Une rivalité qui pourrait en cacher une autre

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Au début de ce mois, les armes ont reparlé dans les montagnes du Nagorny Karabagh. Si les affrontements qui s'y sont déroulés n'ont donné lieu qu'à seulement quelques coupures de presse dans les médias occidentaux, ce "conflit gelé" a pourtant tout de l'étincelle pouvant donner lieu à un affrontement d'une beaucoup plus grande envergure.

Ce petit territoire de quelque 150.000 âmes que l'on appelle aujourd'hui Haut-Karabagh est situé à l'ouest de l'Azerbaïdjan. Peuplé à 95% d'Arméniens, il avait été cédé en 1923 par le pouvoir soviétique à la nouvelle République socialiste d'Azerbaïdjan turcophone, tant pour conforter cette dernière dans son ancrage (forcé) soviétique que pour plaire à la Turquie de Mustafa Kemal avec laquelle l'Union soviétique cherchait à établir la paix après des décennies de rivalités entre empires russe et ottoman.

La perestroïka lancée par Mikhael Gorbatchev (mars 1985 - décembre 1991) et la liberté d'expression relative qui l'accompagne alors allaient raviver les nationalismes jusque-là étouffés par le joug totalitaire, mais aussi l'aspiration à l'autonomie voire à l'indépendance de nombreux peuples jusque-là prisonniers du système soviétique. Dans le Caucase, le Haut-Karabagh réclame alors son indépendance mais c'est le massacre le 27 février 1988 de très nombreux civils arméniens à Soumgaït - une ville non loin de Bakou, par les forces armées azéries qui va véritablement déclencher le conflit armé entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Le terrain de l'affrontement sera justement cette région montagneuse du Karabagh, frontalière de l'Arménie, ethniquement arménienne mais revendiquée au nom des frontières héritées de l'URSS par l'Azerbaïdjan. Six années de conflits et quelque 30.000 morts plus tard, le Haut-Karabagh s'émancipait de la tutelle de Bakou et s'érigeait en république indépendante.

Depuis lors, des tensions récurrentes surviennent et voient des affrontements sporadiques entre forces armées arméniennes et azerbaidjanaises. Un groupe dit de Minsk a bien été mis en place par les grandes puissances et chargé de trouver une solution pacifique au conflit mais rien n'y fait. La diplomatie est inefficace face à l'hostilité profonde entre les deux belligérants. D'autant que chacun de ces derniers doit prouver à son opinion publique sa détermination à obtenir gain de cause dans un conflit où il considère sa légitimité établie. Cela est particulièrement vrai en Azerbaïdjan où la chute des cours pétroliers a contraint les budgets et entrainé des mouvements sociaux inédits.

Ce blocage s'inscrit aussi dans le cadre plus large des tensions actuelles entre les deux grandes puissances régionales, Russie et Turquie. Depuis que l'armée turque a abattu l'automne dernier deux avions russes dans le ciel syrien, rien ne va plus en effet entre Ankara et Moscou. Il suffirait d'un rien pour que la tension ne se ravive - si tant est qu'elle se soit atténuée. Or, le soutien affiché par Ankara à Bakou ne va pas dans le sens d'un apaisement. Alors même que Moscou tentait péniblement d'obtenir une trêve entre les deux parties, le président Erdogan déclarait ainsi le 4 avril, au plus fort des combats, "nous prions pour que nos frères azéris aient l'avantage dans ces affrontements et nous les soutiendrons jusqu'à la fin", ravivant de fait la crainte d'Erevan que le regain de tension ne soit finalement téléguidé par une Turquie aux rêves pan ottoman plus forts que jamais, et qui n'a jamais reconnu le génocide subi par le peuple arménien orchestré par l'empire dont elle se revendique désormais.

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