ru24.pro
Новости по-русски
Октябрь
2015

Sous-traiter la crise migratoire à la Turquie ne résoudra rien

0
INTERNATIONAL - Le renforcement de la coopération avec la Turquie en matière d'accueil des migrants ne peut être qu'un volet de la résolution de la crise des réfugiés. D'autant que cet accord serait conclu avec un régime de plus en plus autoritaire à la veille d'élections très disputées. Plutôt que d'externaliser le problème pour échapper à l'urgence de la situation, les États européens seraient mieux inspirés de présenter un plan global en matière d'asile et d'immigration et une stratégie conjointe pour mettre un terme à l'effusion de sang en Syrie. Plus qu'un choix politique, il y va de notre avenir.

Les résultats du Conseil européen sont une fois encore décevants. Les États, incapables de s'accorder sur une réelle réponse européenne à une crise qui n'en finit plus, ont décidé de pratiquer la politique de l'autruche en sous-traitant la gestion de la crise migratoire. L'allocation de 3 milliards promise aux autorités turques pour les aider à accueillir de la manière la plus digne possible les migrants est certes une avancée positive, même si on s'interroge sur le moyen de financer cette générosité censée pallier un manque criant de volonté politique. De surcroît, c'est rendre service à bon compte à Tayyip Recip Erdoğan, confronté à une campagne électorale difficile. La réouverture de certains chapitres d'adhésion promise à Ankara est envisageable mais le leader turc devra montrer de meilleures dispositions. Il s'est en effet distingué ces dernières années avec une série de mesures liberticides contraires aux valeurs fondatrices européennes: musèlement de la presse, discriminations envers les Kurdes, ingérence dans le système judiciaire, autant d'éléments qui mettent à mal le bon fonctionnement de l'État de droit, critère essentiel en vue d'une future adhésion de la Turquie à l'UE.

Les solutions sont pourtant connues et sont d'ailleurs autant égrenées par les chefs d'Etat et de gouvernement à chacune de leurs réunions sans parvenir à en concrétiser la mise en oeuvre: il faut réformer la procédure d'asile actuelle, issue d'une vieille convention internationale dite de Dublin, établir un véritable corps de garde-côtes européen, donner à Frontex les moyens humains et matériels de sa mission, ouvrir des voies d'accès sures et légales vers l'Europe, autant de mesures préconisées par la Commission européenne, laquelle ne parvient pas depuis des mois à obtenir le mandat du Conseil pour les mettre en oeuvre. L'Union doit simultanément prendre une initiative de paix concertée en Syrie, alors qu'elle n'est aujourd'hui qu'un simple spectateur. Il est grand temps pour le Président du Conseil européen, Donald Tusk, et la Haute Représentante pour les Affaires Étrangères, Federica Mogherini, de dégager une position européenne commune, afin d'enclencher un processus de transition politique en Syrie et sortir ce malheureux pays de son statut de "conflit par procuration" entre grandes puissances et puissances régionales.

Les fenêtres d'opportunité pour apporter une réponse courageuse à cette crise se referment au fur et à mesure des occasions manquées. Cet immobilisme n'est plus acceptable, tant l'enjeu dépasse le cadre régional. Deux choix s'offrent à nous: laisser Daech propager la terreur avec Vladimir Poutine et Tayyip Erdoğan comme seuls recours ou nous prendre en main afin de penser et conduire une solution durable face à une crise dont les conséquences se feront sentir pour des générations. J'ai fait mon choix.

Lire aussi :

• Le double visage de Grèce face à la crise des réfugiés

• Pourquoi nombre d'Allemands ne voient pas en Merkel une héroïne de la crise des réfugiés

• Les eurodéputés saluent le discours de Hollande et Merkel, sauf les extrêmes

• Tous les matins, recevez gratuitement la newsletter du HuffPost

• Retrouvez-nous sur notre page Facebook