ru24.pro
Новости по-русски
Сентябрь
2015

Les enjeux des élections en Grèce

0
INTERNATIONAL - Après six années de gros titres sur une crise économique et sociale qui ne montre aucun signe d’apaisement, le pays organise des élections anticipées. Le 20 septembre, les Grecs se déplaceront dans les bureaux de vote pour la cinquième fois en un peu plus de trois ans. Encore une fois, tout peut arriver.

Le contexte


Le Premier ministre sortant, Alexis Tsipras, issu du parti de gauche Syriza, a donné sa démission le mois dernier, mettant ainsi fin au gouvernement de coalition réunissant Syriza et le parti des Grecs indépendants (ANEL).

Syriza a remporté les dernières élections, en janvier, grâce à son programme anti-austérité avant de changer son fusil d’épaule au fil des mois dans un contexte de négociations musclées avec les créanciers européens de la Grèce : l’économie du pays a frôlé la banqueroute, les banques ont dû fermer leurs portes et des contrôles de capitaux ont été mis en place.

Malgré un référendum soulignant le manque d’entrain des Grecs envers la proposition de sauvetage européenne, et les restrictions sévères qui accompagneraient une telle mesure, Tsipras a finalement cédé aux exigences des créanciers, ouvrant ainsi la voie à de nouvelles mesures d’austérité en échange de fonds dont la Grèce avait désespérément besoin.

Une partie conséquente du parti de Tsipras, opposée aux concessions du gouvernement envers ses prêteurs, a rendu sa position intenable. Seule solution: de nouvelles élections pour déterminer s’il bénéficiera d’un nouveau mandat pour mettre en place cet accord de sauvetage, ou s’il devra céder la place.

Confrontés à l’éventuelle mise en place d’un accord de sauvetage et à une économie en ruines, les créanciers de la Grèce attendent le verdict du peuple.

Les partis


Syriza, née en 2004 de l’union de divers groupes et partis de gauche, formait jusqu’à récemment un gouvernement de coalition avec l’ANEL, petit parti de droite. Forte de sa rhétorique anti-austérité et de son programme de gauche radical, la coalition a traversé les années de crise, passant d’une entité politique relativement peu populaire à un parti politique majeur. Cette transformation s’est accompagnée d’un changement dans la composition même du parti, Syriza passant du statut de coalition à celui de parti unitaire, la loi électorale grecque accordant un "bonus" de 50 sièges (sur 300) au parti ayant reçu le plus de voix.

Cependant, l’histoire fragmentée de Syriza est récemment venue tourmenter le parti. Un grand nombre de ses membres se sont ainsi opposés à Tsipras sur les termes très stricts de l’accord de sauvetage. Vingt-cinq des députés de Syriza – dont la plupart faisaient partie de la branche radicale du parti – ont fait sécession le 21 août pour fonder un nouveau parti, Unité populaire. Aujourd’hui, l’avenir de Syriza au sein du gouvernement et son identité même sont remis en question.

Unité populaire est dirigé par Panagiotis Lafazanis, ex-ministre de l’Energie de Tsipras, qui appartenait à la branche très à gauche de Syriza. À son lancement, Unité populaire était le 3e plus grand parti au Parlement. Il promettait le retour du programme anti-austérité voté par Syriza mais jamais mis en place. Les membres d’Unité populaire prônent la sortie de l’Europe et le retour à la drachme. Selon les sondages, le parti aurait de bonnes chances d’atteindre le seuil des 3% lui permettant d’entrer au Parlement.

Nouvelle Démocratie et le Pasok, partis "traditionnels", dirigeaient le pays depuis quarante ans.

Nouvelle Démocratie est le principal parti conservateur de centre-droit en Grèce. Il a perdu les élections face au Pasok en 2009 avant de refaire surface en 2012 au sein du gouvernement de coalition entre le Pasok et le parti de centre-gauche Dimar. Nouvelle Démocratie a récolté 27,8% de votes en janvier 2015. Ayant participé aux deux précédents sauvetages de la Grèce, le parti est partisan des réformes et de la relance du secteur privé. Même s’il joue le rôle de principal parti d’opposition, Nouvelle Démocratie est favorable à la mise en place du récent accord de sauvetage et apporte son soutien à Tsipras.


L’avenir de Syriza, le parti de Tsipras, au sein du gouvernement et son identité même sont remis en question.

Celui qui fut le plus aimé des partis sociaux-démocrates a perdu le soutien de la population pendant la crise de la dette. En effet, beaucoup de Grecs reprochent à George Papandreou, l’ancien leader du Pasok, d’être à l’origine du cycle actuel de grande austérité, car il avait signé le premier accord de sauvetage de la Grèce. Le Pasok, qui lutte pour se maintenir à flot, a annoncé qu’il allait organiser des pourparlers avec le Dimar (la Gauche démocrate).

To Potami ("La rivière") est un parti centriste fondé en 2014 par le journaliste de télévision Stavros Theodorakis. Il prône des idées socio-libérales décomplexées et fortement pro-européennes. To Potami a recueilli assez de soutien pour finir quatrième aux élections de janvier dernier. Le parti considère les accords de sauvetage comme une étape nécessaire pour surmonter la crise économique, mais il s’est montré critique vis-à-vis des tactiques de négociations choisies par Syriza avec les créanciers.

Le Parti communiste grec (KKE) est opposé à l’austérité et demande une sortie de la zone euro, en se basant sur l’idée que les accords de sauvetage sont violemment imposés au peuple grec et provoquent le chaos au sein de la société et de l’économie du pays. Grâce sa base électorale solide, le KKE a conservé peu ou prou le même pourcentage de votes lors des récentes élections.

Avec sa solide rhétorique anti-immigration et de son discours agressif, le parti d’extrême droite Aube dorée a gagné du terrain en ces années de crise. Le soutien au parti -qui a atteint 6,2% lors des élections de janvier- a surtout été attribué au "vote de protestation" contre l’ordre politique établi. De nombreux cadres du parti, dont son leader, ont été emprisonnés en attendant leur procès pour participation à une organisation criminelle et agressions envers des immigrés et des antifascistes.


Le parti d’extrême droite Aube dorée a gagné du terrain lors de ces années de crise.

Les problèmes


La crise grecque s’aggrave. L’économie du pays est dans un état pitoyable, les contrôles de capitaux sont toujours de mise et le taux de chômage a atteint le pourcentage sidérant de 25% de la population. La question brûlante, au cœur des prochaines élections, est de savoir comment contenir cette crise durable et ses conséquences omniprésentes.

La Grèce étant un point d’entrée pour des milliers de migrants et de réfugiés qui tentent d’échapper à des conflits incessants ou à une pauvreté insoutenable, le pays cherche les moyens de gérer la situation tout en demandant de l’aide à ses voisins européens. Étant donné que cette crise humanitaire se déroule en parallèle de la crise économique grecque, le prochain gouvernement devra également trouver des solutions viables pour résorber la situation.


Le nouveau gouvernement devra trouver des solutions viables pour résorber la crise des migrants et réfugiés sur les îles du pays.

Les résultats


Lorsque Tsipras a démissionné le mois dernier, les élections semblaient gagnées d’avance pour Syriza. Cependant, de récents sondages montrent que Syriza et Nouvelle Démocratie sont au coude à coude, avec un léger avantage pour Nouvelle Démocratie.

L’issue la plus probable est que le parti gagnant devra former un gouvernement de coalition pour mettre en place les réformes conclues avec les créanciers. Jusqu’ici, Tsipras a rejeté l’idée de coopérer avec Nouvelle Démocratie et To Potami, qu’il considère comme des partis "institutionnels".

L’incertitude du vote -étant donné qu’aucun parti ne semble disposer d’une avance significative- pourrait encore aggraver la situation et conduire la Grèce vers un avenir inconnu. Des questions demeurent: comment résoudre enfin la crise et, si la solution passe par un autre changement de gouvernement, à quoi celui-ci ressemblera-t-il?

Cet article, publié à l’origine sur le Huffington Post américain, a été traduit par Laura Pertuy pour Fast for Word.