Valse-hésitation sur fond de routes
Le Conseil des Etats ne se contente pas de demi-mesures. Il renvoie le projet de Fonds routier en commission, dans l'espoir d'y intégrer l'extension du réseau.
CHRISTIANE IMSAND
Un pas en avant, un pas en arrière, puis un pas de côté: voici comme on pourrait résumer la position du Conseil des Etats concernant le contenu du futur Fonds routier destiné à assurer le financement à long terme des routes nationales. En juin, la commission des transports voulait intégrer dans le projet le transfert des 400 km de routes cantonales qui a été bloqué par le refus populaire de la vignette à 100 francs, en 2013. En août, elle a changé d'avis après avoir constaté que les cantons étaient peu enclins à participer au financement. Hier, le plénum lui a fait reprendre le cap initial en la chargeant de trouver une solution avec les cantons. Il est question d'une vignette à 70 francs et d'une participation financière des cantons de 60 millions de francs.
Le renvoi en commission, décidé par 27 voix contre 14, est aussi synonyme de délai supplémentaire pour le Fonds routier. La cheffe du Département des transports Doris Leuthard le déplore. "Le renvoi ne fera que provoquer des retards et aggraver la situation financière", affirme-t-elle. "Il faut respecter la volonté populaire. Nous n'avons aucune certitude qu'un relèvement plus modeste du prix de la vignette soit accepté par le peuple. Il serait préférable de séparer les deux objets."
"Il ne faut pas surcharger le bateau"
C'est aussi le point de vue défendu par le président de la commission, René Imoberdorf (PDC, VS). "Il ne faut pas surcharger le bateau", affirme-t-il. "Nous avons demandé au Conseil fédéral de nous soumettre, d'ici fin 2017, un projet d'extension du réseau en lien avec l'introduction d'une vignette électronique."
Pour le socialiste neuchâtelois Didier Berberat, qui s'exprimait aussi au nom de son collègue PLR Raphaël Comte, il n'est pas possible d'attendre. "Dix-sept cantons sont concernés par l'extension du réseau", souligne-t-il. "Comment les convaincre d'accepter le Fonds routier, si le transfert des routes cantonales ne figure pas dans le projet? Neuchâtel attend depuis la fin des années 1990 la reconnaissance de la H20, qui relie Neuchâtel au Col-des-Roches, c'est-à-dire à la frontière française. Bien des régions moins peuplées sont reliées depuis longtemps au réseau des routes nationales. Il faut rectifier le plus rapidement possible cette inégalité de traitement."
Selon lui, le renvoi permettra d'auditionner les cantons et les milieux routiers de façon plus approfondie que la prise de température opérée pendant les vacances d'été. Mais il avertit: "La balle est dans le camp des cantons. S'ils veulent intégrer leurs routes dans le réseau national, il faut qu'ils acceptent de verser une contribution de 60 millions de francs."
Le principe du Fonds routier, lui, n'est pas remis en cause par les sénateurs. C'est le pendant du nouveau Fonds ferroviaire, qui réunit l'ensemble des ressources affectées au rail dans un fonds de durée illimitée. Le Fonds pour les routes nationales et le trafic d'agglomération (Forta) étend et réorganise l'actuel fonds d'infrastructure. La commission propose de l'alimenter en augmentant de quatre centimes la surtaxe sur les huiles minérales. C'est deux centimes de moins que la hausse proposée par le gouvernement.
Initiative soumise au peuple en 2016
Compte tenu du renvoi en commission, on ne sait pas encore quand le plénum pourra se prononcer. L'agenda est serré, car il faut aussi compter avec l'initiative dite "vache-à-lait", qui exige l'affectation intégrale à la route de l'impôt sur les carburants. Actuellement, 50% du produit de cette taxe est versé dans la caisse générale de la Confédération. La procédure parlementaire est terminée. L'initiative sera soumise au peuple l'an prochain.