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Сентябрь
2015

Europe : ça passe ou ça casse?

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"Échec", "fiasco", "revers", les termes ne manquent pas pour commenter les résultats de la réunion des ministres européens de l'Intérieur de lundi. Les attentes étaient fortes pour cette réunion. C'est raté ! C'est donc la prochaine, du 22 septembre qui nous offrira peut-être cette solution de la dernière chance...

Mais je n'ai pas envie de me livrer à un énième commentaire de cette réunion. Parce que ce qui est réellement en jeu en ce moment, c'est de savoir comment et si l'Union européenne peut réussir son crash-test ou bien si elle est au bord d'un l'arrêt brutal. C'est une hypothèse réelle dans le cadre de la crise humanitaire actuelle.

Les risques et les enjeux sont en effet très nombreux.

Tout d'abord, l'émergence de deux Europe. La réunion ministérielle de lundi semble avoir conforté les oppositions entre États membres. Les autorités hongroises, soutenues par les autorités polonaises, slovaques, tchèques, roumaines et lettones, refusent toujours catégoriquement de participer à l'effort commun dans l'accueil des réfugiés. Ces oppositions ont fait échouer tout accord sur le mécanisme de relocalisation de 120 000 réfugiés tel que proposé par la Commission la semaine dernière. Elles témoignent surtout d'une incompréhension grandissante entre les dirigeants européens et d'une fracture qui s'approfondit de réunion en réunion entre l'Europe de l'Ouest et l'Europe de l'Est.

Risque de déstabilisation du système Schengen. La réunion des ministres de l'intérieur s'est également inscrite dans un contexte inédit après la décision de l'Allemagne de rétablir des contrôles à ses frontières avec l'Autriche. Dans la foulée, l'Autriche a annoncé qu'elle rétablissait elle-aussi les contrôles à ses frontières avec la Hongrie. La République tchèque et les Pays-Bas ont ensuite annoncé des mesures similaires. La Slovaquie n'avait pour sa part pas attendu l'Allemagne et l'Autriche pour prendre de telles mesures. Si ces décisions ne sont pas forcément injustifiées ou illégales, elles témoignent de manière unique dans l'histoire d'un effet de contagion qui fait craindre une déstabilisation profonde des piliers du système Schengen et pourrait mettre en hypothèque le principe de libre circulation.

De même, les tensions sont de plus en plus fortes entre les Etats membres et le niveau européen. Les prises de décision unilatérales se multiplient ; elles témoignent de replis souverains et d'une voie nationale privilégiée sur l'action commune. Elles sont en tout état de cause la manifestation de crispations croissantes et d'une défiance mutuelle de plus en plus exacerbée.

La cristallisation autour de ces oppositions ne doit toutefois pas faire passer à côté de l'essentiel : l'impératif et l'urgence de l'action. Les conditions pour assurer protection, accueil et intégration devraient continuer à être réunies pour les réfugiés présents ; or tel n'est plus le cas partout et le système de protection ne s'exprime plus avec l'ampleur et la rapidité suffisante. Il est ainsi incohérent que certains Etats membres se détournent de la politique d'asile commune alors qu'elle existe, et déplorent dans le même temps l'inexistence d'une politique migratoire commune !

Sans tomber dans un pessimisme chronique, nous ne pouvons pas non plus faire l'impasse sur ces stigmates de fragilisation du projet européen. C'est pourquoi dans ce contexte, le Parlement européen doit hausser le ton et continuer d'ouvrir la voie. Tous les principaux acteurs qu'il s'agisse de la Commission, du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ou la société civile réclament cette réaction forte et inspiratrice du Parlement.

Il nous faut notamment sortir d'un débat européo-européen et exiger une internationalisation du débat. Il est indispensable que soit convoquée prochainement une conférence internationale sur la crise humanitaire, qui réunirait l'ensemble des parties prenantes. Cette réunion que le Parlement a clairement appelée de ses vœux la semaine dernière est aussi le souhait de la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini ; je m'en félicite et nous devons l'aider.

Une offensive de pédagogie vis-à-vis de nos opinions publiques doit être déployée, pour rappeler les faits, le droit, contre des mensonges déclinés par les pyromanes de l'extrême droite.

Il nous faut enfin anticiper sur la manière dont l'accueil des réfugiés va s'exprimer afin de leur donner la possibilité de se reconstruire et de s'intégrer. L'emploi étant l'une des clés d'une intégration réussie, on peut notamment penser à faciliter la reconnaissance des qualifications et des diplômes.

Au beau milieu de l'urgence, les acteurs européens doivent appuyer une stratégie coordonnée, fondée sur la responsabilité de chacun et la solidarité de tous. Seul un engagement de tous les États membres et des différentes institutions de l'Union permettra de relever le défi migratoire sur le court et le long termes. Comme l'a clairement indiqué Jean-Claude Juncker dans son discours la semaine dernière au Parlement : " Il n'y a pas assez d'Europe dans cette Union. Et il n'y a pas assez d'union dans cette Union". En septembre 2015, j'ai envie de dire : "Ça passe ou ça casse !"

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