Un Gimelan porté par la passion du fauve et du gris
Jonas Favre a été conquis par le fauve de Bourgogne et le petit-gris suisse, des lapins de race dont il fait l'élevage.
JOCELYNE LAURENT
jlaurent@lacote.ch
Il est des passions qui ne s'expliquent pas, que l'on reçoit en héritage, par pure immersion. C'est ce qu'a éprouvé Jonas Favre, né dans une famille d'agriculteurs. Depuis tout petit, il a baigné dans le monde de l'élevage - des vaches et des chevaux de la race des Franches-Montagnes, notamment. Un monde que le jeune Gimelan de 21 ans aurait souhaité faire sien, en y consacrant sa profession et toute son énergie.
Mais il est des passions contrariées par un destin capricieux qui oblige à changer de cap - tout en le maintenant. Une malformation de naissance au niveau de la jambe droite (un lymphoedème congénital) oblige le jeune homme à renoncer à une formation dans l'agriculture et du coup à s'occuper de gros bétail.
Il acquiert alors un CFC de dessinateur en génie civil et se forme actuellement en tant que technicien de chantier. "Mon rêve, depuis tout petit, était de reprendre la ferme. Mais on ne choisit pas le cours de la vie, confie-t-il. Cela n'a pas été facile de renoncer, on ne lâche pas l'affaire si facilement, mais je n'avais pas le choix, je devais regarder la réalité en face et aller de l'avant dans la vie."
Des lapins à défaut de vaches
Son amour pour les lapins a ainsi permis à Jonas Favre de garder un pied dans la ferme familiale et de maintenir un lien - indéfectible - avec le monde agricole. Ses clapiers sont installés dans la cour de la ferme, à côté des chevaux. Et sa passion pour les petits mammifères rongeurs n'a rien d'un pis-aller, à voir ses yeux s'illuminer en parlant de ses fauves de Bourgogne et ses petits-gris suisses. "Oui, élever des lapins, c'est une passion qui a remplacé celle pour les vaches" , dit-il. Aujourd'hui, la préservation des lapins de race a pris autant de valeur à ses yeux que l'élevage des gros animaux.
Question prestance, les rongeurs ne déméritent pas face aux équidés et aux bovins de la ferme familiale. Car les fauves de Bourgogne et les petits-gris suisses, outre leur pelage aux couleurs éclatantes et étonnantes, ont un maintien certain grâce aux patients enseignements de Jonas Favre. Depuis qu'ils sont tout petits, l'éleveur habitue les mammifères à se tenir tranquilles sur une plate-forme, fiers et la tête haute, en vue de participer à des concours.
D'une marotte d'enfant - ses parents avaient acquis une portée de lapins communs à condition que les quatre enfants de la famille s'en occupent - Jonas Favre a développé une passion. "Je me suis pris au jeu et je me suis mis à m'en occuper tout seul. Je me levais tous les matins avant d'aller à l'école pour eux" . Les petits mammifères présentent des soucis de santé qui le font se tourner vers le fauve de Bourgogne, réputé plus résistant.
Déjà deux titres: cantonal et national
Il acquiert alors en 2008 son premier fauve de Bourgogne. "J'aime sa couleur, sa forme et son caractère doux. L'an passé, j'ai flashé sur la couleur du petit-gris qui est d'un bleu perlé magnifique" , s'enthousiasme-t-il. Très vite, le jeune Gimelan participe à des concours avec ses petites bêtes et se distingue. En 2013, un de ses "fauves" devient champion cantonal puis, cette année, un de ses mâles obtient une médaille d'or lors d'un concours national.
Jonas Favre a adhéré à la Société vaudoise d'aviculture de Nyon et environs où il acquiert de nombreuses connaissances en matière d'élevage. Car on ne s'improvise pas éleveur du jour au lendemain. Les lapins étant de santé fragile, il faut les nourrir avec précaution. Et Jonas Favre de connaître sur le bout des doigts le manuel intitulé "La pharmacie du lapin". Aussi plante-t-il dans le jardin familial des plantes aromatiques et va cueillir des branches pour ses petits protégés. A cela s'ajoute un savoir-faire à acquérir dans le domaine de la génétique et du choix du mâle reproducteur.
Le tout au service d'un standard très strict qui a un seul objectif: préserver la race. Un simple exemple: une queue ou un bassin de travers et le lapin ne correspond pas au standard. "Même si on a nos lapins dans le coeur, en tant qu'éleveur, on se doit d'être réaliste: on n'élève que les meilleurs" , admet le Gimelan. Qui dit sélection dit élimination des lapins non conformes qui finiront ainsi... à la casserole. Jonas Favre sera présent avec quatre de ses lapins au Comptoir suisse dès samedi.