Climat dramatique pour l'arrivée de la loi sur l'asile au Parlement
Le Conseil national va se pencher sur une loi attaquée par l'UDC.
Un marathon se prépare aujourd'hui au Conseil national. En pleine crise européenne des réfugiés, la Suisse met la dernière main à une nouvelle Loi sur l'asile. Le texte du Conseil fédéral, accepté par la chambre des cantons en juin, doit être traité par le Conseil national. L'actualité internationale va-t-elle s'inviter dans les débats?
Toujours agité, le climat au sujet de l'asile aura rarement été aussi électrique. Principal but de la réforme, l'accélération des procédures d'asile fut d'abord envisagée par l'UDC. Les autres partis s'y sont peu à peu ralliés, contre la garantie d'une assistance juridique gratuite. La restructuration de l'accueil et des procédures a, elle, été préparée avec les villes et les cantons.
Thème omniprésent dans la campagne
Aujourd'hui, après être parvenue à imposer l'omniprésence de l'asile dans la campagne pour les élections fédérales, l'UDC combat la loi avec énergie. Le texte arrive à la chambre basse avec une cinquantaine d'amendements qui devront être votés un par un.
La chambre du peuple abordera ensuite, en session extraordinaire, une motion du groupe UDC, demandant un "moratoire immédiat" sur l'asile.
Ces débats se tiennent alors que le calvaire des réfugiés aux frontières terrestres et maritimes de l'Espace Schengen bouscule les opinions publiques. Sur le terrain, les images en provenance de Hongrie, de Grèce et de Turquie marquent les esprits.
Les Suisses se mobilisent pour l'accueil
L'Organisation suisse d'aide aux réfugiés Osar a récemment fait état du décollage des propositions de particuliers pour loger des réfugiés, dans le cadre d'une action mise sur pied au début de l'année avec un succès d'abord mitigé.
Au Centre social protestant CSP à Neuchâtel, Mélanie Müller-Rossel, juriste responsable du service migration, analyse elle aussi un changement d'ambiance, d'abord auprès des premiers concernés. Les Syriens réfugiés en Suisse "vivent des moments d'une extrême dureté" , compte tenu de leur situation et de celles de leurs proches, en route ou restés au pays.
Faire des dons, mais voter contre de nouvelles arrivées
Et au sein de la population Suisse? "Nous percevons un élan de solidarité émotionnelle extrêmement fort. Par rapport à d'autres phénomènes migratoires, la crise syrienne envoie sur les routes des familles, des bébés, des vieillards, des personnes handicapées. On peut plus facilement s'identifier à un tel mélange de population. Nous savons que beaucoup de paroisses, par exemple, se posent la question de l'action, mais ça ne se traduit pas sur le terrain du fait que peu de réfugiés syriens arrivent en Suisse actuellement" . Pour la spécialiste, il est trop tôt pour dire si l'élan du coeur se traduira par un changement de climat politique: "Nous savons d'expérience que certains peuvent faire un don en faveur des réfugiés puis voter un durcissement des lois dans la foulée" .
Pas de mouvements au Conseil national
Au Conseil national, Cesla Amarelle (PS, VD), présidente de la Commission des institutions politiques, ne s'attend pas à ce que les fronts bougent notoirement dans le débat d'aujourd'hui: "L'UDC, avec tous ces amendements, tente un sabotage de la réforme. En proposant des barbelés aux frontières, le soutien de l'armée et un moratoire sur l'asile, le groupe se situe sur la même ligne que le gouvernement d'extrême droite de Viktor Orban en Hongrie" , juge la conseillère nationale. Et ce, "même si les chiffres du domaine de l'asile montrent que le phénomène est maîtrisé et le système aucunement débordé par la crise actuelle" .
"Je note un clair changement de climat dans la population, mais il est trop tôt pour en mesurer les conséquences politiques. On verra bien s'il se traduit dans les urnes le 18 octobre" , estime Cesla Amarelle.