"Il ne faut plus tergiverser"
L'exécutif genevois présente un budget déficitaire pour 2016.
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Le canton de Genève souffre de la dégradation de la conjoncture économique. Ce retournement se traduit par un projet de budget 2016 qui affiche un déficit de 70 millions de francs. Des mesures fortes sont prévues.
"Nous ne ferons pas l'économie de mesures structurelles de fond" , a averti mardi le président du Conseil d'Etat genevois François Longchamp. Le canton doit gérer aujourd'hui à la fois une solide croissance démographique, un recul des recettes liées à l'impôt, et l'incertitude qui pèse sur la fiscalité des entreprises.
Hausse du temps de travail
Les anciennes recettes d'économies n'étant plus suffisantes pour assurer l'équilibre des finances, d'autres méthodes sont envisagées qui touchent essentiellement les charges en personnel. Le gouvernement souhaite ainsi augmenter le temps de travail hebdomadaire dans la fonction publique de 40 à 42 heures.
Il veut aussi qu'un certain nombre de départs naturels dans l'administration ne soient pas renouvelés et souhaite encourager le travail à temps partiel. Ces mesures, si elles sont appliquées, devraient permettre de réduire les coûts en personnel de 5% au cours des trois prochaines années.
Des discussions avec les syndicats de la fonction publique vont être menées prochainement. Le gouvernement se donne deux mois pour présenter des projets de loi au Grand Conseil. "Genève n'a plus la possibilité de tergiverser" , a en tout cas souligné M. Longchamp. Il en va selon lui de la prospérité future du canton du bout du lac.
Près de 1% de progression des charges
Dans le détail, le projet de budget 2016 prévoit des charges de fonctionnement de 7,89 milliards de francs. Elles augmentent de 0,9% par rapport au budget 2015, soit moins que la croissance démographique qui s'établit à 1,6%. Les secteurs qui ne subissent pas de baisse sont la formation, l'action sociale et la mobilité.
Pour ce qui est des recettes, l'Etat doit composer avec une baisse prévisible des recettes fiscales. Le recul escompté est de 1,2%, soit 75 millions de francs. Afin de limiter les dégâts, le gouvernement proposera de plafonner la déduction des primes d'assurance-maladie et la déductibilité des frais de déplacement.
Ces deux mesures, si elles sont adoptées, devraient permettre d'augmenter les recettes fiscales de 63 millions de francs. Selon le Conseil d'Etat, un tel recul des prévisions fiscales d'un budget à l'autre est peu fréquent et reflète la détérioration conjoncturelle intervenue dans le courant de l'année.
Du côté des investissements prévus pour 2016, le Conseil d'Etat ne dispose pas d'une grande marge de manoeuvre. 92% du budget d'investissement de 770 millions de francs concerne des projets en cours de réalisation, comme l'énorme chantier du CEVA, a expliqué le conseiller d'Etat Antonio Hodgers.
Augmentation de l'endettement
Le taux d'autofinancement de ces investissements se monte à 47%. La dette devrait progresser l'exercice prochain d'environ 350 millions de francs, pour atteindre à la fin de l'année 13,4 milliards de francs. Les très bas taux d'intérêt jouent pour l'instant en faveur du canton, mais la situation se retournera un jour ou l'autre.
A droite, les réactions au projet de budget du gouvernement étaient très critiques. Le PLR s'inquiète de la progression de l'endettement. "Le niveau historiquement bas des taux d'intérêt constitue une bombe à retardement et il est irresponsable de vouloir faire supporter ce fardeau aux générations futures".
Le PDC regrette de son côté l'absence de véritables choix politiques et appelle à " des réformes plus courageuses" . L'UDC aurait voulu "des annonces de changements drastiques" dans la conduite des finances de la République. Pour le MCG, la proposition d'augmenter le temps de travail des fonctionnaires est "inacceptable" .
Les Verts sont aussi très critiques. Ils qualifient le projet de budget de "lacunaire, incohérent et incertain" . Ils estiment "très probable" qu'aucune majorité ne se dessine au Grand Conseil pour le voter. Les socialistes déplorent pour leur part la volonté du Conseil d'Etat de continuer à couper dans les prestations publiques.