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Le Roi et la Gen Z: le Maroc en pleine mise à jour

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Le Maroc face à la Génération Z: Mohammed VI engage un dialogue avec la jeunesse autour du développement économique et de la justice sociale


La meilleure preuve que le Maroc partage bien des traits avec ses voisins européens réside sans doute dans l’émergence de sa « Génération Z », un mouvement social qui rappelle, par certains aspects, celui des gilets jaunes, mais avec une dimension générationnelle plus marquée. Ce phénomène traduit avant tout un malaise profond, celui d’une jeunesse mondialisée, consciente de vivre dans une époque pleine d’incertitudes. Et pourtant, paradoxalement, le royaume chérifien connaît aujourd’hui une phase de croissance économique soutenue et un développement visible dans plusieurs secteurs.

Génération frustrée

Cette contradiction entre vitalité économique et inquiétude sociale illustre une fracture de plus en plus perceptible : celle qui oppose les indicateurs de prospérité aux réalités vécues par la jeunesse. Les jeunes Marocains, massivement connectés, utilisent les réseaux sociaux non seulement pour échanger mais aussi pour exprimer leur frustration face à des perspectives professionnelles jugées insuffisantes. Les plateformes numériques deviennent alors à la fois un exutoire, un espace d’organisation et un outil de mobilisation.

Cependant, ces mouvements en ligne, bien qu’énergiques, souffrent souvent d’un manque de structuration. L’absence de leadership clair empêche la formulation de revendications précises et rend difficile toute négociation concrète. Ce mode d’action horizontal, s’il favorise la spontanéité, laisse aussi la porte ouverte aux récupérations politiques ou à des débordements susceptibles d’altérer leur message initial.

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Les préoccupations exprimées par cette génération marocaine ne se limitent pas au cadre national. Elles résonnent avec celles des jeunesses du monde entier : peur du déclassement, angoisse écologique, sentiment d’instabilité globale. L’emploi, l’éducation et la mobilité sociale demeurent au cœur des attentes, tandis que plane une question centrale : comment trouver sa place dans un monde en mutation permanente, où la réussite ne semble plus garantie par l’effort seul ? C’est à cette question que s’emploie à répondre Mohamed VI. Les premières réponses ont été esquissées dans un discours adressé par le monarque au Parlement marocain, intervenant une semaine après que les manifestants ont proposé un cahier de doléances lui demandant la démission du gouvernement.

La figure du roi n’est pas contestée au Maroc par le mouvement, contrairement à la classe politique qui subit les foudres populaires depuis quelques jours. Génération Z n’est d’ailleurs peut-être pas un mouvement uniquement spontané, des élections législatives se tenant dans un peu moins d’un an, suscitant les convoitises de certains mouvements d’opposition… Toute ressemblance avec la France ne serait pas fortuite. Mais de l’autre côté de la Méditerranée, la figure centrale de l’exécutif est bien plus écoutée que la nôtre. Les récentes manifestations menées par de jeunes Marocains ont mis en évidence un malaise que partagent bien des sociétés : l’incertitude face à l’avenir, la crainte du déclassement et le sentiment d’injustice sociale. Cette génération, très présente sur les réseaux sociaux, exprime moins une révolte qu’un appel à l’écoute et à la reconnaissance. C’est dans ce contexte que le discours royal du 10 octobre prend tout son sens.

Justice sociale et croissance : les orientations du Roi

À la différence des mouvements de 2011, le moment actuel ne traduit pas une rupture politique, mais une tension sociale à laquelle le souverain a choisi de répondre par des orientations concrètes. Le Roi Mohammed VI a rappelé que la vitalité économique du pays ne saurait suffire si elle ne se traduit pas par une amélioration réelle du quotidien. Il a ainsi placé au cœur de son discours la justice sociale et l’équilibre territorial, deux thèmes désormais indissociables de la politique nationale.

Le message est clair : les institutions doivent passer d’une logique de promesse à une logique de résultat. Le Roi a invité le gouvernement, le Parlement et les élus locaux à agir de manière coordonnée, afin que les politiques publiques produisent des effets mesurables sur le terrain. Cette exigence de responsabilité partagée marque une évolution dans la manière d’envisager l’action publique.

Le souverain a également insisté sur la nécessité d’une meilleure attention portée aux territoires oubliés. Les zones montagneuses, les oasis et les régions rurales doivent bénéficier de programmes spécifiques, capables de créer de l’emploi, d’améliorer les services essentiels et de valoriser les ressources locales. Ce rééquilibrage territorial vise à corriger les écarts qui persistent entre les grands centres urbains et les marges du pays.

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Par ailleurs, le Roi a encouragé la poursuite du développement du littoral, non pas comme une course à la modernisation, mais comme un chantier structurant conciliant activité économique et protection des ressources. Dans la même logique, le renforcement des centres ruraux émergents devrait permettre de rapprocher les citoyens des services publics et d’offrir de nouvelles perspectives à ceux qui vivent loin des grandes villes.

Mohammed VI a par ailleurs lancé un très symbolique appel solennel au Parlement et au gouvernement, les invitant à travailler avec sérieux et à défendre les intérêts concrets des citoyens. La responsabilité du suivi des affaires publiques leur incombe pleinement, tout comme l’impératif d’atteindre les objectifs sociaux auxquels la population aspire. Le souverain a souligné la nécessité d’accélérer le rythme du développement et d’optimiser l’action de l’État, en veillant à éradiquer toute pratique susceptible de dilapider efforts, temps et ressources. Chacun, depuis sa position, est appelé à contribuer à ce renouvellement : faire évoluer les mentalités, renforcer le développement local et promouvoir l’emploi et la santé. Il a, au fond, exigé des résultats.

En filigrane, ce discours apparaît comme une réponse posée aux attentes d’une jeunesse parfois désenchantée, mais toujours attentive à l’évolution du pays. Plutôt que d’adopter une posture défensive, le pouvoir choisit d’écouter et d’ajuster. Il s’agit moins de rompre que de corriger, moins de promettre que de tenir. C’est peut-être là la marque la plus nette d’un Maroc qui cherche à concilier stabilité politique et sens du progrès.

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