Cinéma: "Nouvelle vague", déclaration d'amour américaine à Godard et au film d'auteur
Présenté en compétition au dernier festival de Cannes, ce film tourné en noir et blanc et en français suit les premiers pas de réalisateur du jeune Jean-Luc Godard (l'épatant Guillaume Marbeck), cinéaste démiurge qui livre des phrases définitives sur le 7e art ("tout est filmable", "le court-métrage, c'est l'anti-cinéma").
La caméra de Richard Linklater, figure du cinéma américain "indé" ("Boyhood", la trilogie "Before"...), pose un regard enamouré sur ce jeune critique de cinéma qui va tourner en 1959, en vingt jours et avec une simple ébauche de script, une pièce maîtresse du 7e art.
"La nouvelle vague a inventé l'idée du film d'auteur", affirmait à l'AFP Richard Linklater lors d'un entretien en mai à Cannes. "+A bout de souffle+ ne pouvait pas venir d'un autre esprit que celui de Godard".
Le film, qui avait séduit les critiques à Cannes, reconstitue minutieusement un tournage où flottent les effluves de cigarette, l'improvisation et l'insouciance des premiers pas mais où Godard régente tout, donnant corps à la figure très française de l'auteur omnipotent et tout puissant.
"Un tournage peut être sympa, conciliant et pas du tout abusif mais comme pour une symphonie, vous avez besoin d'un chef d'orchestre", racontait Richard Linklater, qui fait revivre des figures de l'époque grâce à un excellent casting d'où émergent notamment Aubry Dullin en Jean-Paul Belmondo et Zoey Deutch en Jean Seberg.
Le film a toutefois failli ne jamais voir le jour et ne doit son existence qu'à un couple de producteurs français qui ont puisé dans leurs propres fonds pour faire exister ce projet, jugé trop "cinéphile" par certains financiers du 7e art.
La présentation du film à Cannes avait fait sensation parce que Godard, mort en 2022, est une figure révérée du festival, où il a reçu une Palme "spéciale" en 2018, mais aussi parce qu'il a marqué l'histoire de la Croisette en contribuant à l'arrêt de l'édition de mai 1968, en pleine tempête sociale en France.