A Mayotte, une interminable crise accentuée par les ravages du cyclone
Le bilan est terrifiant. A Mayotte, le nombre de victimes du cyclone Chido, qui a éventré l’île samedi 14 décembre, aurait fait des "centaines" voire "des milliers de morts" d’après les déclarations de son préfet, François-Xavier Bieuville. Les scènes de désolation ont été décuplées par la force du cyclone - le plus intense à frapper le territoire depuis plus de quatre-vingt-dix ans - mais aussi par l’omniprésence sur place de l’habitat précaire. Des chiffres vertigineux, mais qui cachent à peine les difficultés que rencontrait Mayotte avant même que Chido ne la traverse.
Voici un conseil pour les amateurs de sueurs froides : penchez-vous sur les indicateurs de ce petit bout de France perdu au milieu de l’océan Indien. La moyenne du PIB par habitant y est trois fois inférieure (11 579 euros) à la moyenne nationale (38 775 euros). Son coût de la vie y est aussi plus conséquent. En un an, le prix des produits alimentaires frais a bondi de 10,7 % ; ceux de l’électricité, de près de 20 %. Ces augmentations s’ajoutent à des prix qui étaient déjà plus élevés de 10 % par rapport à ceux de l’Hexagone. De quoi grever le portefeuille des Mahorais, qui sont, en plus, confrontés à de dramatiques problèmes d’infrastructures.
Accumulation d'injustices
Selon le dernier recensement, Mayotte compte 320 000 habitants. Le chiffre pourrait paraître dérisoire, au regard des autres départements français : moins que les Vosges (355 431), ou la Haute-Vienne (370 339). Mais sa trajectoire ne l’est pas : la population de l’île a doublé en trente ans. Une évolution "hors norme" selon l’Insee, en grande partie liée à l’immigration illégale - devenue département français en 2011, Mayotte attire. Mais pas seulement : son taux de fécondité s’établit en 2023 à plus de 4 enfants par femmes, plus du double par rapport à la métropole. Le territoire ne peut même pas compter sur sa jeunesse comme antidote à sa pauvreté. Dépassé par sa démographie, il ne parvient pas à construire suffisamment de salles de classe pour accueillir ses élèves.
L’Etat peine à faire face à cette accumulation d’injustices. Certains ont bien tenté d’y répondre via des coups médiatiques. Dernier exemple en date : l’opération Wuambushu, lancée en 2023 par le ministre de l’Intérieur d’alors, Gérald Darmanin. Elle devait réduire l’insécurité, expulser les migrants illégaux et détruire les bidonvilles. Les résultats escomptés ne se sont pas produits. Et en ce lendemain de catastrophe, la population mahoraise s’enfonce plus que jamais dans la crise.