A quelques jours du grand départ de cette 10e édition du Vendée Globe, nous avons pu converser avec Jérémie Beyou, le skipper de Charal. Alors que le triple vainqueur de la Solitaire du Figaro va s'élancer pour un cinquième tour du monde en solitaire, nous avons tâché d'en savoir un peu plus sur son IMOCA, son état d'esprit et les points clefs pour remporter cette course marathon.
Voile Magazine : As-tu pris toute la mesure de ce plan Manuard à foils mis à l'eau en 2022 ?
Jérémie Beyou : "Mon IMOCA est bien né, c'est une certitude désormais après deux années de préparation intensive à son bord. Nous n'avons pas rencontré de souci de structure depuis sa mise à l'eau, ni eu besoin de rajouter de la masse pour le renforcer, ce qui est bon signe. Les seules évolutions ont porté sur la répartition des ballasts dans le bateau et sur la masse du bulbe pour alléger l'ensemble afin de le rendre encore plus aérien. Je suis à la barre d'un bateau très bien adapté aux conditions généralement rencontrées sur un Vendée Globe."
[caption id="attachment_190120" align="aligncenter" width="500"] Limiter les arrêts-buffets sera déterminant pour garder des moyennes de vitesse hautes. Crédit : Eloi Stichelbaut.[/caption]
Voile Magazine : Tu pars sur ce tour du monde avec une V2 des foils, pourquoi ce changement ?
Jérémie Beyou : "La V2 est à poste depuis début 2024 car nous trouvions que Charal était excellent au reaching et au près dans la brise mais connaissait un déficit en VMG descente dans le médium et le petit temps. Depuis, et j'ai eu le temps de constater les effets positifs suite aux deux Transats qualificatives de cette année, mon IMOCA se comporte mieux à toutes les allures et par tout type de temps. Mes nouveaux appendices créent moins de trainée puisqu'ils poussent moins forts tout en autorisant plus de stabilité de vol. Le combo est gagnant ! Enfin, nous n'avons pas modifié les puits pour se garder la V1 en réserve, on ne sait jamais..."
Voile Magazine : Est-ce que le fait d'avoir les deux safrans dans l'axe apporte un véritable gain ?
Jérémie Beyou : "Ils sont toujours là, ca veut bien dire que nous considérons qu'ils amènent de la performance... Une seconde paire de safran sera d'ailleurs installée au retour du Vendée Globe pour pousser encore plus loin cette innovation. A l'image de ballasts, ils permettent de lever ou de baisser le nez du bateau à l'envie sans à avoir à rajouter de la masse. Ils jouent aussi un rôle pour améliorer la stabilité du vol quand le bateau est en mode aérien. Au final, c'est une manette de réglage et en plus, elle est facile à mettre en œuvre."
Voile Magazine : Tu es ambassadeur Garmin, que retires-tu de ce partenariat ?
Jérémie Beyou : "Effectivement, tout l'électronique du bord est équipé par Garmin pour ce Vendée Globe. Mais cela fait déjà plusieurs saisons que je cours avec cette marque. Le réseau EmpirBus fonctionne très bien et facilite grandement la mise en réseau de tous les appareils du bord, des répétiteurs extérieurs en passant par le GPS Map, le radar ou encore la VHF AIS. En cas de panne à l'autre bout du monde, la simplicité du montage pourrait beaucoup m'aider."
[caption id="attachment_190128" align="aligncenter" width="500"] Le cockpit de Charal est bourré d'électronique en tout genre. L'une des clefs de la performance sur ce Vendée Globe 2024 ? Crédit : Marin Le Roux.[/caption]
Voile Magazine : Après ce douloureux Vendée Globe 2020, tu repars dans quel état d'esprit ?
Jérémie Beyou : "Je ne pense pas à la dernière édition et entre nous je me force à ne pas y penser. A l'heure où je te parle, j'essaye d'avoir l'attitude la plus détendue possible même si c'est vrai que j'en ai bavé en 2020. Repartir 9 jours après tout le monde ca été dur à accepter mais j'ai été très content à l'époque de réussir à boucler la boucle. Cette expérience va me servir sur ce Vendée Globe car je considère que c'est une chance énorme d'être de nouveau sur la ligne de départ dimanche. Je vais tout faire pour ne pas rater ma chance, cela décuple mon envie de bien faire !"
Voile Magazine : Ce Vendée Globe va se jouer où et à quel moment ?
Jérémie Beyou : "Alors là difficile à dire car je n'ai pas de boule de cristal... Les quatre transats que nous avons faites depuis la mise à l'eau ont permis d'analyser beaucoup d'éléments sur notre IMOCA et sur celui de mes concurrents directs mais une course de 15 jours n'a rien à voir avec la réalité d'un Vendée Globe. je pense quand même que la différence va se jouer sur la capacité des skippers à réaliser de belles moyennes dans la durée tout en réussissant à naviguer sereinement, à gérer le matériel et le bonhomme. Car mettre le paquet trop tôt c'est aussi la probabilité de casser trop tôt. De toute façon, la météo pourrait bien rebattre les cartes ou ne pas permettre aux nouveaux foilers d'exprimer tout leur potentiel comme ce fut le cas lors de la précédente édition. Quoi qu'il en soit le niveau de la flotte est incroyable et j'ai hâte d'aller m'y frotter !"
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