Quelle est cette petite commune du Puy-de-Dôme qui affine des jambons d'Auvergne dans le clocher de son église ?
Créée il y a cinq ans, au cœur de l’Artense, dans le Puy-de-Dôme, l’association Histoire, patrimoine & territoire d’avenir (HP&T) de Cros n’imaginait sûrement pas se retrouver, bien malgré elle, au beau milieu d’un tel imbroglio et tourbillon médiatique… même si c’est le clocher d’a côté qui a essuyé la tempête! Celui de Saint-Flour, dans le Cantal, en l’occurrence.Dans l’ADN de l’association, il y a l’attention portée à des projets locaux s’inscrivant dans les perspectives de développement durable et des actions de mise en valeur du patrimoine. Au nombre desquelles la création d’une serre maraîchère citoyenne, d’une ferme solaire photovoltaïque et la rénovation des croix de missions du village.
faire sécher, dans le clocher de l’église Sainte-Madeleine, de beaux jambons d’Auvergne.
Ils ont dit amen, tout de suite
Le vœu pieux de l’association ? Il y en a en fait plusieurs… Récolter de l’argent permet d’entreprendre des actions de préservation du patrimoine et de lancer de nouveaux projets, innovants. Et puis faire parler de Cros n’est ni anodin, ni vain. C’est même une bonne manière de placer sur la carte de France la petite commune quand, début 2024, elle devient une nouvelle étape du chemin de Compostelle grâce à un nouveau tronçon qui part d’Orcival pour passer par La Tour-d’Auvergne, Bagnols et Lanobre, avant de filer jusqu’à Rocamadour…
Le jambon est placé sous la plus haute poutre du clocher de l'église. Près des persiennes qui laissent passer l'air vif de Cros, mais à l'abri des oiseaux, qui ne peuvent pas entrer.
Du jambon bénit"Grâce à ce projet du séchage de jambons dans le clocher de l’église du village, on voulait faire en sorte que les pèlerins, les randonneurs, les cyclistes fassent davantage que passer par Cros, mais s’y arrêtent, viennent découvrir notre patrimoine, dont on prend soin », explique Alain Lenaud. Le président fait de Stéphane, un maître boucher habitant de Cros, leur complice.
"Il s’occupe, de tout : il prépare le jambon, le sale, l’accroche à la plus haute poutre du clocher et veille au grain pendant tout son affinage"
Alain Lenaud, dans le clocher de l'église de Cros.Après neuf mois des bons soins de Stéphane, début septembre, le jambon est redescendu du clocher et dégusté à l’occasion de la fête du village "Juste après la messe du Précieux Sang, célébrée pour notre fête patronale, le jambon est béni par le père Thomas, devant l'église."
À sa suite, le maître boucher officie à son tour et découpe le jambon. "Il fait des paquets de 4 ou 5 tranches, soit environ 180 g, qu’on vend 5 €."
Des commandes qui affluent de partoutCette année, les trois jambons rapidement débités devant l’église ont trouvé acquéreurs en quelques minutes. Mais pas question pour Alain Lenaud et son association de jouer les marchands du Temple : "L’année dernière, on en a fait sécher trois. Le mois prochain, pour 2025, on en placera quatre dans le clocher".
"Mais on pourrait en vendre le double, peut-être le triple, vu la demande. Des personnes nous en réservent d’une année sur l’autre. On a des commandes qui viennent de partout. On nous propose même de nous en acheter un en entier…"
Il poursuit : "Mais ce n’est pas notre souhait. Nous, on ne fait pas ça pour l’argent. On ne va pas privatiser un jambon, parce que quelqu'un a les moyens de l'acheter... Au contraire, on veut que tout le monde y ait accès, même s'il n'a qu'un budget de 10 €. Et puis la rareté fait aussi l’intérêt…", sourit malicieusement Alain Lenaud.Cette année, environ 500 € ont été récoltés. Fidèle à sa ligne de conduite, l’association HP&T les investira pour l’achat de produits de restauration afin de repeindre les statues de l’église Sainte-Madeleine et pour la rénovation des santons de la crèche. Tout est décidément bon dans leur action.
Marie-Edwige Hebrard