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Октябрь
2024

Black-out en Guadeloupe : un avant-goût de ce qui attend la métropole et l’UE

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La perte de 67 % de la puissance de production électrique guadeloupéenne – 211 MW sur 315 – aura donc déstabilisé le système électrique de l’île jusqu’à priver de courant ses 380 000 habitants et sa modeste économie durant près de 39 heures, du 25 au 27 octobre 2024.

Notons que les 9 MW de puissance éolienne et les 4 MW de puissance photovoltaïque avec lesquels EDF s’enorgueillit d’avoir entamé la mutation du parc en question vers les 100 % renouvelables, à l’horizon 2030, n’ont pas été d’un grand secours à nos infortunés compatriotes ultramarins ; pas plus d’ailleurs que les batteries de stockage KISS (Karukera Intelligent Storage System) installés sur le site défaillant, d’une puissance de 5 MW et dont on aimerait connaître la capacité de charge (1).

Rendons-nous compte : 39 heures pour réalimenter en totalité 220 000 foyers et une économie dont ce n’est pas lui faire injure qu’elle n’a rien de comparable avec celle de Singapour. Les préjudices causés à ses composants les plus notables que sont la moyenne métallurgie, les ciments, les équipements mécaniques et l’agroalimentaire auront certes fait très mal une à économie locale qui n’avait pas besoin de ça, mais ils sont sans commune mesure avec ceux que la France métropolitaine et peut-être certains de ses voisins auraient à déplorer dans la même circonstance.

Sur la probabilité de survenue d’un black-out en France et peut-être au-delà

Ainsi qu’en atteste l’analyse du black-out géant du 19 décembre 1978, la susceptibilité de la protection fréquence d’un système électrique – celle qui sanctionne tout déséquilibre production-consommation techniquement hors critères – n’attend pas la perte des 2/3 de la puissance en service pour se manifester. Or, l’état des lieux de la puissance électrogène dont la France dispose aujourd’hui est formel : avec ses 80 GW tout au plus, notre parc de production serait dans l’incapacité de répondre aux 102 GW appelés à la pointe du 8 février 2012, ne pouvant guère compter sur le secours des parcs voisins en transition énergétique aussi indigente que la sienne (2). Pour ne rien arranger, jamais le système électrique français n’a été physiquement et politiquement aussi solidaire des systèmes électriques de l’UE, faisant ce qui fait qu’un seul d’entre eux peut désormais entraîner tout ou partie des autres dans le black-out ; ce qu’a d’ailleurs déjà failli provoquer l’Allemagne.

Vivre le black-out, attendre fiévreusement le black-start et constater les dégâts

Le titre du paragraphe ci-dessus est emprunté à un article récent que le lecteur est invité à consulter dans sa totalité, au moins pour ce qui concerne le parcours du combattant auquel est confronté le gestionnaire d’un système électrique comme le nôtre, pour ramener une situation gravement perturbée à la normale (3) ; celui de la Guadeloupe n’ayant dû se plier à un tel parcours que dans une certaine mesure. Une chose est sûre en tout cas : le délai d’attente du black-start par une France métropolitaine plongée dans le noir serait infiniment plus long que celui observé ce week-end en Guadeloupe, non seulement à cause de l’effet d’échelle dont il est question plus haut, mais surtout à cause du fait que, en 2025, la nature de l’économie n’a plus rien à voir avec ce qu’elle était il y a 46 ans, laissant présager à tout nouveau black-out des conséquences catastrophiques.


(1)  https://www.edf.gp/edf-en-guadeloupe/nos-installations-en-guadeloupe/nos-moyens-de-production-electrique-en-guadeloupe

(2)  https://atlantico.fr/article/decryptage/charbon-maudit-prohiber-des-kwh-quand-on-en-explose-le-besoin-andre-pellen

(3)  https://www.contrepoints.org/2024/05/15/474535-flamanville-3-ou-pas-lere-des-menaces-de-black-out-est-deja-programmee