"Je vous fais le plein ?" : une proposition qui surprend les automobilistes dans cette station-service du Puy-de-Dôme

Il y a des automobilistes dont la présence de Kévin Assorin va rappeler quelques souvenirs… Et des bons, sans doute ! Une époque où l’essence ne coûtait pas plus d’un franc le litre. Encore faut-il avoir connu cette époque… Kévin Assorin est pompiste, une profession tombée progressivement en désuétude entre les années 1980 et 1990, à la faveur des automates mis en place un peu partout dans les stations et garages.  Ici et là, il reste quelques uns de ces "derniers des Mohicans". Mais ils se font (très) rares.Le prix du carburant a parfois été un casse-tête à l'heure du passage à l'euro...Photo d'illustration Jeremie Fulleringer

Le dernier des Mohicans ? 

Depuis fin mai, le jeune homme sert le carburant à la pompe de la station TotalÉnergies, relais de Peix, route de Saint-Germain. Il a été embauché dans la petite station issoirienne, comme l’ont été plusieurs centaines d’autres pompistes, en France, depuis 2023, par la compagnie pétrolière. Le but affiché de celle-ci : favoriser la proximité avec sa clientèle d’automobilistes, en faisant le pari de recruter et placer des pompistes qui se re-mettent, gratuitement, au service des clients, pistolet en main.

Je vous fais le plein ?

s’avance Kévin, en direction d’une berline blanche qui vient de se stationner sur l’aire de sept pompes de distribution de carburant. Où, d’habitude, s’active justement l’automobiliste qui vient de tirer le frein à main. La réaction est toujours timorée… Par manque d’habitude, sûrement.

Une réticence face à un geste serviable 

"Je vois de tout : il y a des gens très contents qu’on leur rende ce service et qui acceptent volontiers. Et puis il y a ceux qui ne veulent pas du tout. Et qui me font clairement comprendre de ne pas approcher de leur réservoir", note Kévin. Une proposition qui pourrait passer comme trop serviable pour être honnête. Elle est pourtant l’une et l’autre.Le jeune homme respecte chaque choix. 

Je ne suis pas là pour le faire à leur place, à tout prix. C’est un service que la station propose, pas une obligation…

nuance-t-il.Mais il a bien compris que ce service-là dépasse parfois le simple remplissage de réservoir…

Une proposition, mais pas une obligation

"Il y a des gens qui aiment bien discuter. Si ça leur rend service et qu’en plus ils sont contents d’avoir trouvé quelqu’un pour bavarder avec eux, alors moi je suis le plus heureux d’avoir été là…" Souvent ceux-ci appartiennent à la génération qui a, déjà, par le passé, connu un préposé à la pompe.

"Mais pas que… J’ai aussi des jeunes, entre 20 et 30 ans, des habitués qui aiment bien que je les serve et qui n’ont pas de réticence, même si ça n’était pas un usage ni une tradition", explique Kévin, convaincu de remettre du lien et du service là où, peu à peu, les distributeurs et caisses automatiques ont remplacé un geste, une attention, un mot. Et surtout une présence.La mission de Kévin se prolonge au-delà de la piste des carburants. Il aide aussi les automobilistes qui le souhaitent à utiliser d’autres équipements de la station issoirienne : point de lavage des véhicules, vérification de la pression des pneus, échange des bouteilles de gaz, etc.

Une station-service qui devrait toujours bien porter son nom

Plutôt logique, en fin de compte, de déployer cette panoplie de gestes quand on exerce dans une station-service, qui ne porte jamais mieux son nom que quand elle en rend... "Je propose de laver leur pare-brise s’ils le veulent", ajoute encore Kévin. Là encore, c’est au choix de l’automobiliste. Et toujours gratuitement.

Le plus important, pour Kévin est de mener à bien la mission pour laquelle il a été embauché il y cinq mois. En CDD dans un premier temps.  

Tous les matins, je viens au boulot avec envie et bonne humeur.

Le jeune pompiste en profite également pour faire de la pédagogie, qu’on lui ait donné le feu vert pour le remplissage du réservoir ou non : "Beaucoup d’automobilistes ou de motos utilisent le téléphone sur la piste pendant qu’ils font le plein. C’est interdit. Je viens leur expliquer pourquoi. On en discute…" Là encore, histoire de créer du lien. L’air de rien.

Pratique. Le service à la pompe au relais de Peix, à Issoire, est proposé du lundi au vendredi de 9 heures à 12 heures et de 15 heures à 19 heures.

Marie-Edwige Hebrard