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Октябрь
2024

Menacées d'expulsion, des familles soutenues à Tulle par RESF

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Scotchée à la porte rouge des bureaux de Peuple et Culture, une impression, en lettres capitales et aux couleurs passées : « Exilés bienvenus. » C’est à l’association que nous retrouvons Naïma et Sadia (*), chacune accompagnée de leurs filles de 8 et 3 ans. Les deux femmes et leurs familles sont suivies par l’association Le ROC et logées dans des hébergements d’urgence. Mais récemment, jugeant que leur situation ne leur permettait plus de bénéficier de ces solutions d’hébergement, la préfecture de la Corrèze a ordonné leur expulsion des lieux, en date du 25 octobre.

Travail, le nerf de la guerre

Sadia vient de la côte ouest de l’Afrique. Mise à la rue par son beau-père à l’âge de 21 ans, elle arrive en France en janvier 2021, après un périple d’un an à travers le Niger, la Libye et l’Italie. Arrivée à Paris, elle est ensuite redirigée vers Limoges, puis Tulle. Sa fille est née en France et a aujourd’hui 3 ans : « Elle est en petite section », précise fièrement Sadia, dans son bomber marron.

Il y a quelque temps, elle a reçu une promesse d’embauche de la part du CCAS, pour des missions d’entretien. En raison de son irrégularité, la préfecture bloque pourtant la signature du contrat de travail. Sadia ne semble pas comprendre la décision : « On ne demande qu’à travailler. » À sa droite, Naïma acquiesce. Cette mère de quatre enfants et son mari ont également des possibilités d’embauche, mais sans l’accord de la préfecture, rien ne bouge.

Les familles expulsées de leurs hébergements d’urgence toujours dans l’attente d’une réponse. © Agnès GAUDIN 

L’emploi est le fer de lance du Réseau Éducation sans Frontière (RESF), dont fait partie Dominique Grador : « Nous, ce qu’on défend auprès du préfet, c’est la régularisation des personnes qui ont une capacité d’autonomie et des promesses d’embauche. Des personnes qui pourront se former, travailler, et, finalement, ne plus dépendre de l’aide de l’État. »

Contactée, la préfecture affirme que le département connaît une situation de suroccupation des hébergements d’urgence. Naïma, Sadia et leurs familles ne remplissent toutefois pas les conditions de régularisation, et ne peuvent ainsi prétendre à des hébergements pérennes. Le préfet compte donc entamer des procédures pour exécuter les Obligations de Quitter le Territoire Français (OQTF) des familles.

Solidarité

Naïma et sa famille sont arrivées du Maghreb il y a deux ans, après un passage par l’Espagne, pour laquelle ils avaient obtenu un visa. Suite à un fort différend familial, le mari de Naïma a voulu mettre sa famille à l’abri et décide de partir.Derrière ses lunettes dorées, la mère de famille qui apprend le français, discute par le biais de sa fille, Awa (*), 8 ans. L’enfant se tourne vers Dominique Grador : « Madame, on va sortir de la maison le 25 ? »

Comme Sadia, le mari de Naïma est bénévole dans plusieurs associations de la ville : « Ça leur permet de survivre même dans une situation de grande précarité », commente Dominique Grador. Le visage de Sadia s’illumine lorsqu’on lui parle d’entraide.

J’ai des amis ici qui essaient de m’aider. Ça aide à se sentir moins seule et à oublier les problèmes.

Le groupe RESF plaide quant à lui pour un parrainage auprès de la mairie. Un système qui permettrait à des citoyens volontaires d’accompagner les personnes exilées dans leurs démarches. Pour l’heure, les familles occupent toujours leurs logements et attendent des nouvelles de la préfecture.

(*) Les prénoms ont été modifiés.

Laurène Pindivic