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Октябрь
2024

Daniel Poussier, une entreprise d'espaces verts qui sème les graines de la transition

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L'aménagement et l'entretien d'espaces verts pour les résidences d'habitation ne sont pas forcément écologique et peuvent radicalement être améliorés. C'est ce qu'a compris le dirigeant de Daniel Poussier, Stéphane Allali, en 2022 lorsqu'il intègre l'accélérateur de transition de Bpifrance : "J'ai pris une claque, dans le sens où j'ai remis en question toute notre activité, jusqu'à penser que tout ce que l'on faisait n'avait aucun intérêt. J'ai eu une véritable prise de conscience sur l'identité de l'entreprise." Après plus de dix ans de missions auprès d'acteurs du BTP pour installer des jardins dans des résidences neuves, le patron, membre de la communauté du Coq Vert, décide "de modifier le business model de l'entreprise", prêt à perdre "jusqu'à 90 %" de ses clients actuels d'ici 2027 et redéfinir complètement l'activité de Daniel Poussier. Les nouveaux objectifs de cette entreprise francilienne, composée de 48 salariés et générant environ 5 millions d'euros de chiffre d'affaires, allient réduction de l'empreinte carbone et Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE).

Vers un nouveau modèle économique 

Qu'est-ce que signifie repenser son activité lorsqu'on parle d'aménagement des espaces verts ? Il s'agit ici de partir des valeurs de l'activité et des nouvelles orientations adoptées. En premier lieu, renouveler son approche du jardin. "Un changement complet des façons de faire depuis des générations : plus de tonte systématique, réduction des surfaces de pelouses, une place plus importante à la végétation..." Stéphane Allali veut désormais spécialiser son entreprise dans la création de jardins-forêts, avec des pratiques plus durables comme l'utilisation de matériaux naturels, le réemploi et la formation des jardiniers sur la biodiversité. Cette transformation interne est grandement inspirée par la prise de conscience de l'impact environnemental de l'activité et de l'état de la recherche sur la biodiversité en milieu urbain. C'est l'engagement personnel du patron militant qui influe sur le destin de l'entreprise. "Ce n'est pas une question d'argent mais de valeur de soi-même. Que va-t-on laisser derrière soi ? Je suis en train de faire quelque chose de bien, mais c'est plus dur." Ce pivot de l'activité de Daniel Poussier entraine un changement de stratégie commerciale avec des missions désormais menées en circuit court et la création d'un bureau d'étude interne pour concevoir ces jardins-forêts, plus résilients aux aléas climatiques. Mais tout ne s'est pas fait sans quelques grincements de dents en interne.

Mettre en oeuvre la transition : défis internes et remobilisation 

La stratégie n'est pas sans risque, puisqu'il s'agit pour Daniel Poussier de se séparer de la majorité de la clientèle actuelle afin d'aligner l'activité de l'entreprise avec son projet de transition. Le chiffre d'affaires anticipé à l'issue de ce pivot est divisé par deux, avec un objectif de 3 millions d'euros en 2026, et une dizaine d'emplois supprimés à la clé. Stéphanie Allali se remémore cette période compliquée : "ça a été la guerre pendant un an avec les équipes à cause de cette peur du changement. Pour convaincre, il faut de la passion et de la conviction. Il faut être ferme, diplomate, puis expliquer, encore et encore. Nous avons interrogé les valeurs de l'entreprise. J'essaie de mieux payer mes équipes, de les former pour qu'elles montent en compétences. J'ai conscience que je vais perdre une partie de mes collaborateurs parce que le changement est trop difficile pour certains. C'est un projet sur 10 ans, il y a de la mise en place et de la réflexion, on doit toujours s'adapter." L'entreprise a dû faire face à des résistances internes initiales mais a réussi à rallier ses équipes autour de nouvelles valeurs. "Aujourd'hui, tout le monde est convaincu en interne car nous conquérons de nouveaux clients chez les particuliers et des rénovations de bâtiments." 

La mise en oeuvre du changement passe donc par de la formation interne pour acquérir et comprendre les nouvelles pratiques pour de l'aménagement des espaces verts plus responsable. Daniel Poussier, repositionnée comme entreprise engagée pour la préservation de la forêt et la biodiversité, souhaite favoriser une nouvelle économie verte. Circuit court, avec une clientèle désormais ciblée dans un rayon de 30 kilomètres. Expertise, avec la création d'un bureau d'études interne pour assurer la conception-réalisation. Revalorisation, avec la fabrication de son propre fumier et ses copeaux à base de résidus végétaux collectés sur les chantiers, un changement radical par rapport aux pratiques de la profession. Diminution de la consommation de ressources enfin, en essayant de travailler avec des produits non manufacturés. Il s'agit par exemple de "récupérer du matériel comme des pierres plates ou du vieux bois qu'on va poncer et vernir pour réaliser 150 m2 de terrasse", illustre le dirigeant. Les résultats sont là, avec des jardins conçus en accord avec les besoins de la nature et qui sont "capables de protéger les gens des sécheresses et des fortes chaleurs", se réjouit Stéphane Allali. 

Des pratiques inspirantes pour patrons militants 

Alors que ce changement de modèle économique est toujours en cours, il est encore tôt pour en tirer des conclusions définitives, mais on peut disserter sur l'énergie nécessaire pour impulser cette transition, avertit le patron de Daniel Poussier : "Pour vos 40 salariés, pour vos fournisseurs, pour vos clients, en représentation à travers les salons professionnels... C'est vraiment une énergie incroyable à donner pour être un porte-drapeau envers tout l'écosystème." Le soutien de partenaires structurants, comme Bpifrance et l'ADEME, s'avère essentiel pour le succès de la transition de Daniel Poussier. Ce pivot stratégique et opérationnel n'est pas seulement une question d'argent mais représente également une question de valeurs pour l'entreprise. Daniel Poussier croit en la nécessité d'éduquer la société sur les enjeux environnementaux et de faire comprendre que l'urgence climatique est une priorité non négociable. Celle-ci se fera avec les artisans dont le travail et l'expertise est valorisée par des approches innovantes de la pratique de l'aménagement des espaces verts. Un encouragement pour les autres chefs d'entreprises à entamer la transition écologique de leurs activités. 

Cet article a été publié initialement sur Big Média Daniel Poussier, une entreprise d'espaces verts qui sème les graines de la transition