"L’État ne veut plus de nous" : cet éleveur ovin puydomois désabusé face à la fièvre catarrhale
L’éleveur sort tout juste la tête de l’eau. Depuis une dizaine de jours, ses brebis ont cessé de mourir de la fièvre catarrhale ovine (FCO), un virus transmis par des moucherons qui décime son cheptel depuis le 12 août dernier. Parmi les victimes, des brebis allaitantes et des laitières. "C’est trop difficile de compter, mais on est à plus de 100 bêtes perdues", estime Julien Merle, propriétaire de la ferme de Pics et Piques à Olmet.
Des pertes impressionnantesCelui qui travaille en circuit court et qui propose des produits 100 % bio manquait de place à l’abri dans sa ferme. Il a désormais la place de rentrer les 70 à 80 brebis qui lui restent. Et avec les températures qui ont tendance à baisser, elles sont beaucoup moins exposées à la maladie. "Psychologiquement ça va mieux depuis qu’on ne ramasse plus de cadavres tous les jours. Maintenant, on s’inquiète surtout pour la suite", confie l’agriculteur.
Fièvre catarrhale ovine en Auvergne : comment se transmet-elle ? Combien de bêtes mortes ? Comment l'arrêter...
Sur les marchés du coin, Julien Merle continue de vendre du fromage, des terrines et ses agneaux de l’an dernier. Et sa boutique aussi est restée ouverte. "Mais on a perdu énormément d’argent. Si on fait une projection financière sur les six mois prochains, ça fait peur."
Il faut compter les plus de 100 bêtes perdues, qui valent aux alentours de 200 euros pièces, mais aussi les pertes en lait et en viande.
"C’est un travail de plus de neuf ans de sélection qui a disparu. Nos deux plus beaux béliers sont morts, et on ne pourra pas vendre d’agneaux à Pâques."
Julien Merle n’est pas le seul éleveur mis en difficulté par la fièvre catarrhale ovine. Depuis la mi-août 2024, la résurgence de la maladie est très importante dans toute la région Auvergne-Rhône-Alpes.Pour entrer dans le détail, il existe une trentaine de types de FCO. Trois sont présents sur le territoire national : 4, 8 et 3. "Nous, nous n’avons pas du tout de FCO 4. La 8, c’est celle qui tue nos brebis. Enfin, il y a la FCO 3 qui descend du nord", décrivait Christophe Guillerand, responsable de la coopérative Copagno, dans La Montagne du 11 septembre.
Des annonces du gouvernementLe 4 octobre, lors du sommet de l’élevage, le Premier ministre Michel Barnier a annoncé des aides pour faire face au fléau. Parmi les mesures : la gratuité des vaccins pour la FCO 3 et une enveloppe de 75 millions d’euros pour soutenir les éleveurs. "C’est clair l’État ne veut plus de nous, les petits producteurs du sud. En rendant gratuit le vaccin contre la FCO 3, il favorise la filière bovine et l’export", interpelle Julien Merle.
Pour lui, ces annonces sont insuffisantes. Tellement qu’il a dû ouvrir une cagnotte en ligne pour pouvoir envisager de racheter des brebis. "Heureusement, on peut compter sur la solidarité de nos clients. On n’a pas le temps de sortir dans la rue pour l’instant, mais à terme, c’est ce qui va arriver."
L'urgence de vaccinerDu côté du Groupement sanitaire du Puy-de-Dôme (GDS 63), on conseille surtout de vacciner pour l’année prochaine. "Il y a toujours des effets d’annonce, mais il faut attendre de voir la répartition et ne pas être trop alarmiste. Des discussions sont toujours en cours. En attendant, il faut éviter de reproduire la catastrophe", développe Amélie Vandaele, ingénieure conseil.
Cagnotte. Pour soutenir Julien Merle, une cagnotte Leetchi est en ligne.
Angèle Broquère