Budget 2025 : comment la taxe d’habitation revient dans le débat
Elle a été supprimée en 2023 par Emmanuel Macron, et voilà que des élus réclament son retour : alors que l’Assemblée nationale étudie ces jours-ci des pistes d’économies budgétaires pour l’année 2025, parlementaires et élus locaux ont proposé à Michel Barnier de rétablir la taxe d’habitation.
Ressusciter cet impôt local dont s’acquittaient autrefois tous les habitants d’une commune pourrait permettre, selon certaines modalités, de générer en recettes fiscales les économies que le Premier ministre demande aux villes et collectivités françaises, soit plus de cinq milliards d’euros. La proposition rassemble des personnalités de tous bords politiques, même si tous ne souhaitent pas voir revenir exactement la version initiale de la taxe d’habitation.
À gauche, certains élus ont plaidé pour une taxe d’habitation remaniée, afin d’y introduire davantage de justice fiscale. Pour le député LFI David Guiraud, la mesure ne serait pertinente qu’à condition de cibler 20 % des contribuables les plus riches. "On estime que dans cette période de crise ils peuvent se le permettre", a précisé sur FranceInfo le parlementaire, dont l’amendement déposé à l’Assemblée nationale prévoit que la mesure permettrait de renflouer les caisses à hauteur de 8 milliards d’euros.
Pour le président de la commission des Finances et député insoumis Eric Coquerel, la suppression de la taxe d’habitation par Emmanuel Macron a signé "la fin de l’autonomie fiscale" des communes, a-t-il expliqué ce jeudi sur BFMTV, avant de se déclarer favorable à son rétablissement.
"S’il faut recréer un impôt, c’est celui-là"
Côté LR, c’est le maire de Meaux et ancien ministre, Jean-François Copé, qui a été le premier à proposer de rétablir la taxe d’habitation. "Les villes croulent sous les dépenses obligatoires, jugeait-il récemment dans sa chronique dans L’Express, dénonçant l’injonction faite aux communes françaises de raboter leurs budgets de cinq milliards d’euros. Les villes qui, lorsqu’elles sont bien gérées, payent pour les autres et vont devoir renoncer à des investissements pourtant porteurs de croissance pour financer l’incurie de l’Etat." "S’il faut recréer un impôt, c’est celui-là", a-t-il poursuivi à la mi-octobre sur LCI. Pour l’élu, cette suppression a donné lieu à un "paradoxe fou", avec des locataires aisés qui "ne paient plus rien" et des propriétaires modestes qui seraient contraints de s’acquitter de la taxe foncière.
Dans son camp politique, il n’est pas le seul à plaider pour le retour de cet impôt local : "C’était une taxe qui créait un lien entre l’habitant et la commune", a expliqué la députée LR Véronique Louwagie, avant de préciser : "En revanche, c’est un dossier qui ne peut pas être ouvert à la légère avec un amendement qui sortirait comme ça sur un texte budgétaire". Le maire de Cannes David Lisnard, également favorable à cette proposition, a émis sur Public Sénat l’idée d’un "impôt universel résidentiel", qui exclurait tout de même les plus précaires.
Marge de manœuvre financière
Certains élus locaux ont également demandé le retour de la taxe d’habitation, pour récupérer un peu de marge de manœuvre sur leurs finances. Le maire de Manosque Nicolas Isnard a ainsi proposé la mise en place d’une "taxe locative" réservée aux locataires dont le revenu dépasserait un montant plancher. Le maire de Mareau-aux-Prés (Loiret) Bertrand Hauchecorne, interrogé par France Bleu, a quant à lui émis une hypothèse sembable et évoqué la mise en place d’un "nouvel impôt communal local fondé sur les revenus".
Seul le gouvernement de Michel Barnier semble peu enclin à revenir sur la politique fiscale voulue par Emmanuel Macron et rétablir un impôt dont la suppression a été décidée dès le début de son premier mandat. Leur principal argument ? La suppression de la taxe d’habitation aurait constitué un "gain de pouvoir d’achat" pour les Français, dixit le ministre du ministre du Budget Laurent Saint-Martin, sur lequel il est inenvisageable de revenir. Un refus appuyé par les parlementaires Ensemble pour la République (EPR). Parmi eux, le député Jean-René Cazeneuve a estimé que la taxe d’habitation était "un impôt extrêmement injuste qui pesait sur l’ensemble des Français sans tenir compte de leurs revenus". La gronde des parlementaires et élus locaux pourrait-elle faire changer d’avis le camp macroniste ?