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Октябрь
2024

Pillow Man, Orson, Coboye, Randy Shilts, Les travailleurs de la mer : nos lectures BD

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Pillow Man 

Au chômage depuis trois ans, Jean a fini par trouver sa voie. Et c’est assez inattendu : le chauffeur routier devient oreiller vivant pour une entreprise de services qui offre des hommes douillets à ses clients victimes d’insomnie. Grâce à son embonpoint, Jean est très doué pour ce métier peu commun. Mais évidemment, il a du mal à avouer à son épouse ce qu’il fait de ses nuits et invente un boulot de veilleur de nuit chez LVMH..De rencontre en rencontre, face à des clients dépressifs ou excessifs, riches aussi, Jean finit par monter en grade, tout en prenant conscience de l’incongruité et la vacuité de son travail. Le personnage est traité avec tendresse, peu à peu coincé dans un monde qui a perdu la tête. Le dessin de Théo Calméjane est lui aussi très douillet pour lecteur et reste dans le ton humoristique pour accompagner le scénario de Stéphane Grodet qui, mine de rien, en dit long sur les travaers de notre société moderne.

Pillow Man. De Stéphane Grodet (scénario) et Théo Calmejane (dessin), chez Glénat, 224 pages, 26 €.

Les travailleurs de la merLes Travauilleurs de la mer

Pour adapter l’œuvre de Victor Hugo, écrite durant l’exil du poète dans l’île anglo-normande de Guernesey, il fallait un choix esthétique fort. Michel Durand étonne et impressionne avec ses pages dessinées entièrement avec des hachures : un travail titanesque ! L’effet visuel est saisissant, autant dans les portraits des personnages, le héros du récit, le pêcheur de Guernesey Gilliatt en particulier, que dans les grandes pages de paysages maritimes, ciel, mer et tempêtes, saisissantes de puissance dans ce noir et blanc construit sur des lignes de noir. Le lecteur qui n’a jamais lu le roman de 1866 va pouvoir rattraper cette lacune, impossible de lâcher ce récit qui, tel une odyssée, voit l’homme affronter victorieusement la nature pour sauver une machine à vapeur, symbole de la modernité. Pour finalement succomber devant le doux regard de la belle Deruchette.

Les travailleurs de la mer. De Michel Durand, d’après l’œuvre de Victor Hugo Chez Glénat, 152 pages, 35 €

Orson

Les biographies de grandes figures du cinéma ne donnent pas toujours dans l’originalité. Pour affronter la figure d’Orson Welles, auteur à 26 ans de ce qui est considéré comme l’un des plus grands films de l’histoire, Citizen Kane, Youssef Daoudi a choisi un récit éclaté et original, un dessin en noir et blanc rehaussé par des aplats en jaune. Welles, dessiné comme un ogre, est lui-même le narrateur de sa propre vie, de son génie, de ses nombreux échecs et de ses relations très conflictuelles avec l’industrie du cinéma. Ici, en plus des repères biographiques classiques, on découvre aussi sa folle passion pour le cinéma, qui dépasse tout. « Mon amour pour le cinéma est bien plus profond que ce qu’ils pourraient imaginer », lâche Welles dans l’un des dernières pages. Passionnant.

Orson (Welles, l’artiste et son ombre) De Youssef Daoudi, chez Delcourt, 272 pages, 29 €

Randy Shilts Randy Shilts

Clément Xavier et Héloïse Chochois nous emmènent sur la piste d’un personnage peu connu en France, Randy Shilts. Si on vous dit qu’il est l’auteur de la biographie d’Harvey Milk, premier politicien américain ouvertement homosexuel, cela vous aide sans doute. En 1981, le journaliste, lui aussi homosexuel, porte son attention sur une terrible maladie qui semble toucher uniquement la communauté gay, le Sida. Il enquête sur le patient 0 et tente de publier ses informations. Mais les médias font la sourde oreille et lui ne pense plus qu’à une seule chose : sauver des vies, quitte à ne pas toujours respecter la vérité. Et Randy Shilts va se faire beaucoup d’ennemis. Les pages sont colorées et le dessin apporte un humour discret, évitant le pathos que pouvait comporter le sujet.. Randy Shilts n’a sans pas tout réussi mais il est dépeint comme un journaliste talentueux et pétri de bonnes intentions.

Randy Shilts et la fake news du patient zéro. De Clément Xavier et Héloïse Chochois, chez Glénat, 160 pages, 23 €.

Coboye

 "Dans l’ouest sauvage, il y a le coboye." C’est ainsi que commence la BD de Cécile Brosseau, au scénario, au dessin et à la couleur de ce petit livre tout simple, qu’on a envie d’offrir aux gens qu’on aime, comme un trésor que l’on se partage pour retrouver la magie de notre enfance. Coboye, c’est une petite brunette à l’œil malicieux, toujours prête à l’aventure dans la campagne environnante, et plutôt rebelle à la « normalité » des adultes. Le livre est une suite de moments de vie, les souvenirs de l’autrice, tendres et surtout très drôles, racontés par le coboye, et vécus avec un peu moins de patience par le shérif, la maman donc, qui « préfère détailler la liste des infractions commises et soupirer très fort ». Les illustrations à l’aquarelle, ponctuées par de phrases ciselées, ont véritablement un effet doudou sur le lecteur. Le résultat, c’est un beau moment de lecture à mettre entre toutes les mains, même si vous n’êtes pas fan de BD.

Coboye. De Cécile, chez Delcourt, 144 pages, 17,95 €

Philippe Cros.