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Октябрь
2024

Dans le Puy-de-Dôme, le Tresseur s'est lancé le défi du lacet 100 % auvergnat

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On a bien le nom d’un ou deux petits génies qui ont commencé dans leur garage avant de connaître la gloire et la fortune. C’est tout le mal que l’on souhaite à Thibault Omerin. Pour l’instant, quelques mètres carrés lui suffisent, au rez-de-chaussée d’une maison des vieux quartiers de Billom. Si sa petite entreprise ne connaît pas la crise, elle ne l’enrichit pas encore…

Thibault, alias le Tresseur, a investi le monde des lacets de sneakers il y a trois ans. Une niche en fait, dans laquelle il a su se démarquer en misant sur un concept et sur le made in Auvergne. « La première gamme que j’ai lancée, c’est l’embout métal interchangeable, que je visse sur le lacet. Ce qui permet de mixer à souhait les couleurs, en fonction de sa tenue ou de son humeur. » Avec douze coloris de lacets et douze coloris d’embouts, il propose 144 combinaisons possibles pour personnaliser ses baskets. Le produit a trouvé sa clientèle même si le jeune entrepreneur se refuse à avancer un quelconque chiffre d’affaires. Superstition peut-être. Fort de ce démarrage encourageant, il a créé une autre gamme en août dernier : le lacet à embout fixe, que l’on vient sertir.

Thibault assure lui-même la finition des lacets (photo Franck Boileau).

Circuit court

Avec ce changement de cap, il a dû se résoudre à faire une infidélité au Puy-de-Dôme. « Pour la première gamme, la tresse était conçue à Vertolaye, chez Gauthier Fils, les embouts et les tiges filetées venaient de Courpière, les embouts étaient peints à Thiers, le packaging était réalisé à Romagnat. » Sur la version sertie, il a gardé le circuit court pour la tresse mais l’embout, lui, ne vient pas de chez nous. Pas le choix. « C’est la seule partie qui n’est pas fabriquée en France parce que, aujourd’hui, nous n’avons plus le savoir-faire pour concevoir ces embouts-là. Il a disparu. »

Thibault Omerin relativise en évoquant l’empreinte carbone réduite du petit carton qu’il reçoit. « Il y a 12.000 embouts dans une commande, ce qui me permet de créer 3.000 paires de lacets. » Et il s’accorde le droit de rêver à un produit 100 % Auvergne lorsqu’il fera un maximum de volume sur ces embouts. D’ici là, il a besoin de certitudes : « Le made in France, ça reste compliqué. Surtout en cette période. Avec l’inflation, les gens regardent de plus en plus le prix. Et il y a un contraste avec les études qui sont menées. Tout le monde trouve génial le made in France, mais le problème, c’est que dans les faits, il n’y a pas tant de personnes que ça qui en achètent. » Viennent les questions autour de la qualité des matières, du coût de la main-d’œuvre. « On ne peut pas rivaliser. A fortiori pour moi. C’est de l’artisanal, j’y passe plus de temps que si c’était de l’industriel. »

« Tout maîtriser »

Il balaie du regard son espace de travail, concentré autour de lui. Un ordinateur, quelques machines plus ou moins âgées mais en très bon état. Tout est là. C’est dans son garage qu’il réalise les finitions, du sertissage jusqu’à l’emballage. Parmi d’autres tâches. « Le développement de l’entreprise prend du temps parce que je suis tout seul. Ce qui est mon choix depuis le début. Je voulais absolument tout maîtriser, de la gestion du site internet à la comptabilité et au juridique. Mais cela a aussi ses limites. Parce que je ne peux pas être partout. »

Alors il se fixe des priorités. Le référencement sur le web en était une. Désormais, il s’attaque aux commerces physiques comme cette boutique du Puy-en-Velay qui va vendre ses lacets. Autre débouché : les salons made in France, qui représentent de belles vitrines pour son genre d’activité. Il l’affirme, on croisera le Tresseur sur le salon Origine Auvergne, qui aura lieu du 22 au 24 novembre à la Grande Halle d’Auvergne.

Omerin. Le patronyme de Thibault Omerin a bien un lien avec la grande famille d’industriels du pays d’Ambert. « On est dans la tresse depuis 1906 », rappelle-t-il, avec l’assurance du conteur qui connaît l’histoire par cœur. À la base, les Omerin fabriquaient des lacets de chaussures, avant d’arrêter dans les années 1970, concurrencés par le marché asiatique. « L’idée était donc de revenir au savoir-faire familial en relançant une production de lacets », conclut Thibault, qui se définit comme l’artisan de la famille.

Thierry Senzier