En Creuse, ces séances de socio-esthétique sont "une petite parenthèse" pour ces femmes atteintes d'un cancer du sein
Quand on commence à perdre ses cheveux, que peut-on faire pour mieux le vivre ? Quand nos ongles se cassent ou tombent à cause de la chimiothérapie, comment peut-on les préserver ? Comment apprend-on à prendre soin de ce corps qui ne ressemble plus à celui d’avant la maladie ? Autant de questions auxquelles Graziella Catinaud, socio-esthéticienne à domicile, aide à trouver des réponses.
« On s’occupe des gens qui ont un mal-être psychologique ou qui, effectivement, sont touchés par la maladie, la vieillesse », résume Graziella Catinaud. « L’approche est évidemment différente » de celle d’une esthéticienne en institut.
Pendant douze ans, elle a exercé comme socio-esthéticienne au CMN de Sainte-Feyre. Et depuis bientôt quatre ans, Graziella travaille avec plusieurs associations dont la Ligue contre le cancer ou Rose en Marche et se rend au domicile de patientes qui souffrent ou ont souffert d’un cancer, notamment du sein.
« L’enjeu, c’est vraiment de restaurer l’image de soi et de pallier les effets secondaires des traitements »
L’esthétique œuvre ici en parallèle du médical et vient adoucir, autant qu’elle le peut, ses effets physiques indésirables. « On a des connaissances un peu plus poussées sur les traitements, la chimoothérapie, la radiothérapie, tout ce que ça peut provoquer sur vos ongles, vos cheveux, votre peau par exemple », explique la professionnelle.@Graziella Catinaud
Apaiser ce que les traitements ont malmené mais aussi « se réapproprier ce corps qui a changé avec les traitements et qu’on ne reconnaît plus » et qui amène parfois, comme la maladie, à se renfermer sur soi. Car la maladie impacte souvent la personne mais aussi le cercle familial.
« On travaille sur l’image de soi, sur la manière de se réapproprier son corps, son image, être à nouveau soi mais aussi sur la manière de se sentir bien au sein de sa famille, de la société. »
Graziella accompagne ces femmes à travers des gestes qui paraissent anodins mais qui sont pourtant essentiels comme redessiner leurs sourcils grâce au maquillage, faire réapparaître une ligne de cils pour souligner un regard et retrouver en quelque sorte le visage qui était le leur avant les traitements.
Ajuster et régler une perruque, apprendre à porter des foulards ou des turbans, « à prendre ou à reprendre plaisir à s’occuper de soi ». « On travaille aussi tout ce qui est morphologie, colorimétrie parce que le cancer touche à beaucoup de choses sur notre corps », ajoute-t-elle.
Elle conseille sur des produits de soins qui permettent d’atténuer d’autres effets secondaires comme la déshydratation de la peau, les sécheresses des muqueuses, les aphtes, des choses dont finalement on leur a peu parlé pendant leur parcours médical et qui peuvent rendre leur quotidien plus douloureux.
« C’est vraiment apporter des petites solutions pour qu’elles puissent être embêtées le moins possible et qu’elles puissent garder le corps qu’elles avaient avant la maladie. »
Pour éviter les complications post-chirurgicales, notamment des adhérences à l’endroit de cicatrices, Graziella propose aussi des massages. « C’est très important parce que si on ne masse pas une cicatrice, on aura une mobilité moins importante ensuite lorsqu’on lèvera le bras par exemple. »
Agir sur le corps mais aussi sur l’esprit, la socio-esthétique « prend en compte la globalité du patient ». Tout participe du chemin vers la guérison, en tout cas vers plus de bien-être.
« On travaille sur le lâcher prise, sur la détente. C’est vrai qu’on est aussi une oreille attentive. On parle aussi de la maladie et de choses dont on ne peut pas parler à tout le monde finalement pendant ces moments-là »
La douce Parenthèse de Graziella propose également des ateliers en groupe. Des moments où les patientes peuvent « échanger entre elles de leur vécu, de leurs difficultés, de choses dont elles ne peuvent pas forcément parler avec leurs proches parce qu’il faut vraiment être passé par là pour pouvoir comprendre… Ces deux, trois heures, ça leur permet de souffler, de lâcher prise. Et de se rencontrer. Ça c’est vraiment hyper important. »
Tout participe finalement à apporter du « bien-être », surtout dans des parcours qui sont « souvent très, très longs ».
« C’est une petite parenthèse dans ce quotidien médical qui rythme leur vie, ce quotidien de piqûres, de prises de sang, de traitements lourds, ça leur fait du bien et ça leur fait oublier un peu ce lourd contexte médical. »
Une prise en charge encore insuffisanteAujourd’hui, la Ligue contre le cancer propose par exemple dix séances prises intégralement en charge, Rose en Marche s’efforce également de financer des prestations de socio-esthétique dont se privent parfois des patientes, faute de prise en charge par la Sécurité sociale.
« Malheureusement, quand vous tombez malade, que vous avez dû arrêter de travailler, les difficultés financières peuvent apparaître et s’accorder des séances de socio-esthétique n’est plus forcément une priorité donc une prise en charge serait vraiment intéressante », explique Graziella Catinaud.
« On ne désespère pas, on espère que ça viendra, peut-être en 2026. Il y a un comité de socio-esthéticiennes qui se bat pour que la Sécurité sociale prenne en charge une partie de ces soins. »
Contacter La douce parenthèse de Graziella au 06.66.38.12.77 ; site Internet : ladouceparenthese.com
Texte : Julie Ho Hoajulie.hohoa@centrefrance.comPhotos : Graziella Catinaud