Les radios associatives du Limousin entre colère et inquiétudes suite aux coupes budgétaires annoncées par le Gouvernement
C'est un coup de massue pour les radios associatives.
Le projet de loi de Finances 2025, inscrit dans le plan d'économie du nouveau Premier ministre, Michel Barnier, prévoit une coupe budgétaire dans le Fonds de soutien à l’expression radiophonique (FSER). Cette baisse est de 35 %, soit plus de dix millions d'euros - 35,7 millions d'euros en 2024 contre 25,3 millions dès 2025 - selon le syndicat national des radios libres (SNRL) et la confédération nationale des radios associatives (CNRA).
Depuis Limoges, en Haute-Vienne, Denis Lespiaut, journaliste, co-fondateur et directeur éditorial du Groupement des radios associatives libres (Gral) - 17 services radiophoniques et 12 marques de radios (*) - réparties sur le territoire parle d'une mort programmée des fréquences, en colère contre l'annonce gouvernementale.
Le Fonds de soutien représente 50 % des ressources« La suppression des emplois associatifs sur la région Nouvelle-Aquitaine avait déjà entraîné la perte de quatre cartes de presse entre 2018 et 2020. Nous avons besoin de recruter pour accompagner la transition digitale de nos radios associatives et là, nos structures sont plus que fragilisées. Au printemps dernier, la ministre de la Culture Rachida Dati annonçait une dotation supplémentaire de 10.000 euros aux radios rurales pour compléter leurs ressources. Que fait-on aujourd'hui de cette annonce ? L'État est un canard sans tête. Il nous plonge dans une situation d'urgence au cœur d'une pandémie de coupes claires dans les budgets locaux pour faire crever tout le monde. Et à nous, on veut nous flinguer notre travail. »
Le Fonds de soutien à l'expression radiophonique représente environ la moitié des ressources nécessaires à la pérennité du modèle économique des radios associatives. « Le reste relève des prestations de services assurées auprès des acteurs du territoire, poursuit Denis Lespiaut. Dans ce contexte, nos radios ne pourront plus supporter une baisse de 15.000 à 20.000 euros en moyenne par service radiophonique de leur FSER. »
La voie ouverte aux radios commercialesLes radios associatives du Gral en Limousin pointent un effet ciseaux et domino, confrontées à la fois à une augmentation de leurs cotisations sociales et à une baisse de leurs ressources locales, craignant aussi une diminution des subventions accordées par les collectivités, elles aussi touchées par « la cure d'austérité » annoncée par Bercy.
La coupe budgétaire « sans précédent » du projet de Loi de Finances menacerait la pérennité des radios et donnerait satisfaction aux grands groupes de communication qui auraient besoin de nouvelles fréquences pour se développer.
En France, 750 services radiophoniques associatifs sont répartis sur les territoires. Les radios associatives, inquiètes pour la pérennité de leurs structures, représentent le deuxième employeur du secteur avec l'embauche de 2.000 à 3.000 animateurs et journalistes. Les organisations syndicales estiment une disparition des deux tiers des emplois entre 2025 et 2026, pointant « un modèle en péril ».
« Les radios associatives ne doivent pas porter le poids des économies imposées à la Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC). Sur les 12 millions d'euros d'économies demandées, 10,4 millions d'euros seront entièrement supportés par les radios locales associatives, alors que ces dernières ne représentent que 4% de l'enveloppe budgétaire globale dédiée à la mission Médias, livres et industries culturelles. Ce choix interroge sur la priorité accordée à nos radios, qui sont pourtant des piliers essentiels de notre démocratie. »
350.000 auditeurs en LimousinEn Limousin, le Groupement des radios associatives libres (Gral) fondé en 2006 a permis de créer de nouvelles fréquences, de professionnaliser les salariés et de mutualiser les compétences des structures.
Le Gral embauche aujourd'hui 22 salariés sur un modèle économique d'un à deux postes équivalent temps plein par radio en Limousin, et perçoit entre 20.000 et 30.000 euros de subventions annuelles par les communautés de communes sur lesquelles les fréquences émettent.
Les équipes assurent dans leur « mission d'intérêt général de communication sociale de proximité » des actions comme de la sensibilisation aux médias dans les écoles ou l'animation d'ateliers radio dans les Ehpad. Chaque année, 350.000 auditeurs sont informés par les douze radios du limousin, avec 65.000 auditeurs pour la seule radio Kaolin.
Comme l'ensemble des professionnels du secteur, les radios associatives du Gral appellent les parlementaires à maintenir le Fonds de soutien à l’expression radiophonique (FSER). Les dossiers FSER pour la radio Kaolin à Limoges devaient passer en commission ce mois-ci. La prochaine est prévue mi-novembre pour mettre sur la table 104.000 euros au profit des radios du Limousin.
(*) : les douze radios : Kaolin FM à Saint-Yrieix-la-Perche, Saint-Junien et Rochechouart, Emergence, Radio trouble fête (RTF), Radio chrétienne francophone (RCF), RMJ en Haut-Limousin-en-Marche, Radio pays de Guéret (RPG), BRAM FM du pays de Tulle, Radio PAC en Dordogne, Radio Vassivière, Radio Grand Brive (RGB).
Aline Combrouze