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Октябрь
2024

Bernard Auroy, le monsieur balisage du Livradois-Forez

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Sa vie pourrait se résumer à un savant enchaînement de concours de circonstances. Certains plus heureux que d’autres. Mais tous l’ont mené là où il est aujourd’hui, à savoir à la tête de l’association Randonnée en Livradois-Forez, plus connue sous le nom de Relf.

Bernard Auroy n’est pas "un gars du cru" comme le dit l’expression. Pour les natifs d’ici, c’est un "étranger". Un Parisien venu trouver, dans les années quatre-vingt, une vie plus douce dans les montagnes du Livradois-Forez. Un temps pointé du doigt et regardé d’un œil amusé par ses voisins, il a su se faire une place parmi les habitants du territoire. À tel point qu’aujourd’hui, il se fond parfaitement dans le paysage.

Victime de trois hold-up en région parisienne

Mais comment Bernard Auroy a atterri là, alors qu’aucun lien ne l’unissait à sa contrée sauvage d’adoption. En filigrane, la randonnée se dévoile. "Je suis né dans le 92, en 1950. J’ai vécu à Versailles, puis près de Rambouillet." Avec son épouse, Bernard Auroy travaille alors dans le milieu bancaire. "J’étais au guichet, et elle du côté administratif." Cette profession aura raison de son attachement à ses origines des Hauts-de-Seine. "J’ai été victime, à trois reprises, de hold-up, se remémore l’homme filiforme, tee-shirt à l’effigie de son association sur le dos. J’ai senti que je ne pourrais pas en encaisser une quatrième, car c’est assez traumatisant", avoue-t-il dans un soupir.

Quel sera le point de chute du couple, alors parent de deux enfants ? La montagne. "Les Alpes, c’était trop cher. On est parti un mois en vacances en Lozère, on trouvait ça sympa, mais c’était trop désert. Les maisons étaient en mauvais état, et il n’y avait vraiment personne en hiver. Alors nous avons recentré nos recherches sur l’Allier, le Puy-de-Dôme et la Haute-Loire." Mais à cette époque, l’avènement d’internet ne s’était pas encore produit. "Et il y avait beaucoup moins d’agences immobilières qu’aujourd’hui", s’amuse le septuagénaire.

Pour trouver leur futur havre de paix, Bernard Auroy et son épouse misent sur les petites annonces dans la presse locale. C’est de cette manière qu’ils tombent sur le Graal à Saint-Just, "au-dessus de Marsac-en-Livradois, où il y avait un médecin, une pharmacie. À Ambert il y avait un hôpital, un collège, un lycée". Bref, tout le nécessaire pour couler des jours heureux en famille.Et la randonnée dans tout ça ?

C’est le truc de base dans la famille, lance, tout en décontraction, Bernard Auroy. Mes parents, nés en 1912 et 1905, ont toujours été tournés vers la nature. Ils faisaient beaucoup de tandem avec une remorque et mes frères dedans.

Impossible d’échapper au virus. Qui, des années plus tard, se transmet toujours dans la famille Auroy.

Une formation balisage avec Chamina, et tout commence

À peine installée, la famille part à la découverte de son nouveau terrain de jeu, par les chemins évidemment.

On a acheté le topoguide du Parc, édité par Chamina à l’époque, qui recensait les 60 plus belles balades. On s’est mis à les faire les unes après les autres. 

Et de sentiers en sentiers, les pérégrinations de Bernard Auroy le mènent sur la route de Relf. "Pour être honnête, je ne me souviens pas précisément de comment ça s’est fait." Le souvenir d’une formation balisage proposée par Chamina, lors de son deuxième mandat de conseiller municipal à Saint-Just, entre 1995 et 2001, remonte. L’association Relf, elle, a vu le jour en décembre 1994. Si Bernard Auroy ne se souvient pas exactement à quelle date il est devenu bénévole, il se rappelle parfaitement de son engagement très actif dès le départ. C’est ce qui a donné de l’idée aux dirigeants de l’époque pour qu’il prenne des responsabilités. Et cela dure depuis 2005. "J’ai d’abord été vice-président jusqu’en 2008, et ensuite président." Une place que l’expatrié occupe toujours, et envisage de quitter, si une succession se profile. "J’ai voulu partir en 2016. Quelqu’un était intéressé pour prendre la suite, mais il ne voulait avoir aucun lien avec l’action politique, et c’est impossible. Je me suis donc représenté au dernier moment. Depuis, il n’y a jamais eu aucun volontaire", regrette le président, qui ne ressent aucune lassitude face à l’action qu’il mène pour Relf, mais qui aimerait partir sereinement, et non pas "contraint et forcé" pour des raisons de santé ou autre.

180 bénévoles pour entretenir les chemins

Relf, c’est un peu comme le quatrième enfant de Bernard Auroy. Un enfant qui demande beaucoup de temps, et d’énergie. "La particularité de l’association c’est qu’elle est à la fois composée de bénévoles, qui s’occupent du balisage. On est environ 180. Et il y a des élus. C’est cette mutualisation qui nous permet d’être encore vivants aujourd’hui", est persuadé l’homme au regard malicieux derrière ses lunettes. Et si le nombre de bénévoles semble important, il est tout juste suffisant pour réussir à œuvrer convenablement sur les chemins du territoire. "Pour bien faire, il faudrait entre 20 et 30 personnes de plus, assume le président. Mais ce n’est pas évident à trouver. Les gens sont membres de beaucoup d’associations, et parfois, ceux qui nous rejoignent sont déçus que ce ne soit pas que de la rando. Mais Relf, c’est du balisage, il faut bien l’avoir à l’esprit." Et la tâche est d’ampleur, puisque le Livradois-Forez comptabilise plus de 200 chemins de randonnée, soit 2.500 km à entretenir.

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Des chemins que Bernard Auroy découvre encore, en famille bien entendu. "Il y a quelques jours, nous avons fait une balade vers Job, que nous n’avions encore jamais faite. Et avant cela, nous étions du côté de Billom avec ma fille qui m’a dit : “C’est magnifique ici, pourquoi tu ne nous avais jamais emmenés ?”. On en a encore à découvrir." Et ce, même plus de 30 ans après les premiers pas en Livradois-Forez.

Sarah Douvizy