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"C’est magique je vous dis !" : Saï, le chien qui redonne le sourire aux résidents d'un petit Ehpad du Puy-de-Dôme

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Dans sa chambre de l’Ehpad des Turlurons, à Billom, Renée est mal fichue. Ce matin de septembre, ses articulations enflées la font souffrir. Allongée sur son lit, elle somnole en regardant le plafond les yeux mi-clos. Elle va sans doute devoir annuler le rendez-vous qu’elle a réservé chez la coiffeuse de l’hôpital.

Quand Carine frappe à sa porte, l’octogénaire bredouille quelques paroles désordonnées. Avec douceur, l’animatrice de la maison de retraite entre dans la chambre avec Saï au bout d’une laisse. Le golden retriever est un chien d’accompagnement social formé par l’association Handi’Chiens.

Depuis près d’un an, avec sa démarche paisible et sa cape bleue et jaune, il accompagne Carine dans son travail quotidien auprès des personnes âgées : "Saï est un aimant à mains. En sa présence, les personnes âgées retrouvent le sourire et la motivation pour bouger. C’est incroyable".

Depuis novembre, Carine Devillers a accueilli Saï au sein de sa famille. Le chien d’accompagnement social vit chez elle et l’assiste dans son métier d’animatrice au sein de l’Ehpad de Billom.

Pour avoir déjà expérimenté la médiation animale dans un précédent poste, Catherine Barthe-Montagne, la directrice de l’établissement, confirme : "Un animal apporte beaucoup au quotidien. Nous n’avons malheureusement pas les moyens d’accueillir les animaux de compagnie de nos résidents en perte d’autonomie, mais le chien d’accompagnement est une bonne alternative."

"Au niveau social, il favorise la communication avec les résidents, mais aussi le personnel et les familles. Au niveau thérapeutique, il apporte du bien-être, apaise les troubles du comportement, favorise le mouvement et permet aussi de faciliter les soins parfois longs et complexes en détournant l’attention du patient."

Sur Renée, l’effet est immédiat. La dame de 85 ans sort de sa léthargie et reprend ses esprits. Motivée par l’envie de caresser Saï qui lui lèche le pied, elle rassemble ses forces pour s’asseoir. "Ça me fait plaisir de le voir, ça me fait du bien, lance-t-elle. Il est sage, il est bien dressé. Quand on est malade et seule dans sa chambre, c’est agréable d’avoir de la visite." Saï n’a pas besoin de réclamer des caresses, les mains de Renée courent déjà dans ses longs poils roux.

Une raison pour sortir de sa chambre

"On va faire un tour ?", propose Carine. La résidente fait la moue : "Non, je ne peux pas marcher, j’ai trop mal". "Dans le fauteuil roulant alors ?" La réponse fuse : "D’accord !"

Avec une surprenante rapidité, Renée passe du lit au fauteuil puis arrive dans le couloir poussée par Carine. Avec Saï à ses côtés, elle gagne l’autre bout du bâtiment, se décide à prendre l’ascenseur pour descendre dans le hall d’entrée, puis à aller dehors prendre le soleil. La fraîcheur la repousse à l’intérieur, mais qu’importe. L’octogénaire a retrouvé le sourire.

De retour dans sa chambre, elle réclame déjà de repartir. "Je dois voir d’autres personnes, mais je peux revenir dans l’après-midi", propose l’animatrice. Renée manifeste sa joie en applaudissant avant de faire une grimace. Elle avait oublié sa tendinite au poignet.

"Vous avez vu, c’est magique", se réjouit Carine une fois dans le couloir. Plus loin, elle évoque Daniel : "Il ne sort jamais de sa chambre et parle à peine au personnel, mais dès qu’il voit Saï c’est un autre homme. Il laisse le chien se coucher à ses pieds, il le câline. Une fois, j’ai proposé qu’il nous accompagne chez le vétérinaire et, à ma grande surprise, il a dit oui, et il l’a fait ! C’est magique je vous dis !" Christelle et Fanny, deux aides-soignantes, approuvent : "Oui, c’est flagrant. Les résidents nous disent qu’ils sont malades, fatigués, ils ont l’air tristounets et quand ils voient le chien, ils vont mieux, ils sourient, ils discutent."

Après toutes ces sollicitations, Saï a besoin d’une pause. Direction le bureau de Carine et une grande gamelle d’eau. Sur la route, l’animatrice croise Sylvie la coiffeuse. Elles profitent de leur rencontre pour échanger sur les résidents. Le rendez-vous avec Renée se confirme, mais la vieille dame a fait savoir qu’elle n’irait peut-être pas. "Si tu n’arrives pas à la convaincre, appelle-moi et je viendrai avec Saï", propose Carine. Coup d’œil au chien qui les regarde avec ses grands yeux pleins de tendresse. Comment résister ?

Six mois de formation spécifique

Âgé de presque trois ans, Saï a suivi le parcours classique des chiens d’assistance formés par l’association Handi’Chiens. À deux mois, il a quitté son élevage pour une famille d’accueil chargée de le sociabiliser et de lui enseigner ses premières commandes. À dix-huit mois, il a intégré un centre Handi’Chiens pour suivre la formation spécifique de chien d’accompagnement social alors que d’autres ont été orientés différemment pour devenir chien d’assistance, d’éveil, d’épilepsie ou d’assistance judiciaire.

À deux ans, il a été remis gratuitement à Carine pour "travailler" à l’Ehpad de Billom. Une double chance pour l’établissement qui, en plus d’avoir été sélectionné rapidement, a découvert que l’alimentation et les frais vétérinaires de Saï seraient payés par Partner in pet food, une entreprise européenne qui avait déjà financé sa formation.

Un chien pour les câlins et les soins

Désormais bien intégré à l’Ehpad, Saï a séduit la plupart des résidents. Et le personnel n’est pas en reste à l’image de Léa et Cylia. Quand les deux jeunes aides-soignantes le croisent, les cris de joie fusent et les caresses pleuvent.

"Souvent, on dit bonjour au chien avant de me le dire à moi"

Carine Devillers

Camille, la kiné de l’établissement, a plus de réserve que ses jeunes collègues. "À la base, je ne suis pas fan des chiens, mais, Saï, c’est différent. J’ai pu voir combien il est utile et positif au quotidien. Dans mes soins par exemple, il motive les patients pour marcher, il leur permet de se concentrer sur autre chose que les difficultés de la rééducation, il détourne leur attention de la douleur", énumère la professionnelle de santé.

À ses côtés, Emma l’ergothérapeute est aussi convaincue. D’ailleurs, elle travaille à l’élaboration d’un parcours de motricité avec Saï.

Pour Nicole : "Un animal apporte beaucoup à l’homme, ça relaxe, ça apaise".

En attendant, le quadrupède participe déjà aux séances de gym des résidents. "Il rampe, il passe dans des cerceaux qu’on tient, il rapporte sa laisse", énumère Nicole.

À 86 ans, cette ancienne bénévole de l’Association protectrice des animaux a attendu le décès de son dernier chien, un petit caniche prénommé Praline, pour pousser la porte de l’Ehpad. Elle qui a toujours vécu avec des animaux apprécie cette compagnie inattendue.

"Comment ne pas craquer quand il vous regarde avec ses yeux pleins d’amour. Un animal apporte beaucoup à l’homme, ça relaxe, ça apaise. Et puis ça me rappelle la maison", soupire-t-elle en s’amusant des bibelots que le toutou éparpille sur le sol avec sa queue.

Une dernière caresse et la parenthèse festive se referme dans l’attente de la prochaine visite qui illuminera le quotidien de Renée, Daniel, Nicole et tous les autres.

Devenir famille d’accueil. L’association Handi’Chiens recherche des familles sur le bassin clermontois pour accueillir et former les chiens de 2 à 18 mois. Si l’aventure vous tente, contactez Maxence au 07.81.94.97.81 ou max.sonilhac@orange.fr. Plus d’infos sur la page Facebook Handi’chiens délégation Auvergne ou le site internet www.handichiens.org

Maud Turcan