"100 jours pour ne plus faire de fautes", c'est possible, selon la grammairienne Bénédicte Gaillard
Oubliez les sempiternels Bled et Bescherelle ! Avec « 100 jours pour ne plus faire de fautes ! », la lexicographe et grammairienne Bénédicte Gaillard signe un manuel d’orthographe réjouissant. D’abord, parce qu’on commence par se tester et non par rabâcher. Ensuite parce qu’on se prend très vite au jeu. On se surprend ainsi à trouver du plaisir dans le pluriel des noms composés, le t euphonique, l’accord de l’attribut et même l’imparfait du subjonctif... Les réponses nous attendent en bas de page comme une cerise sur le gâteau.
Usage libreRéussite ou échec, peu importe. Car on a droit à une séance de rattrapage. Si l’on estime que les verbes pronominaux valent bien une petite révision, par exemple, il suffit de se reporter à la page indiquée. Là, on trouvera « tout ce qu’il faut savoir » en des termes simples, précis et succincts. Avec des quiz pour être sûr de ne plus jamais commettre la faute en question.
Le parcours est libre : on peut le suivre à la lettre, dans l’ordre, s’astreindre à une leçon par jour, ou bien choisir le chapitre en fonction de ses lacunes et même piocher au hasard ou selon l’humeur. C’est en tout cas un ouvrage à usage permanent qui peut se poser, se reprendre, et accompagner toute une vie.
Expérience vécueL’auteure a elle-même entretenu une relation un peu tourmentée avec l’orthographe. Ce qui donne au titre de son ouvrage d’autant plus de crédit. « Quand j’ai commencé à faire de la lexicographie, donc de la rédaction de dictionnaires, il y a quarante ans, on m’a fait remarquer que j’écrivais de bons articles mais que je devais surveiller mon orthographe. J’ai pris le taureau par les cornes. »
Rapidement déçue par le Bled et le Bescherelle, elle se lance dans la lecture du « Bon usage », de Maurice Grevisse. « De là, j’ai fabriqué plus ou moins mes règles. Je ne suis pas faite pour l’apprentissage par cœur. J’ai besoin de comprendre, analyser, décortiquer », expose Bénédicte Gaillard.L’orthographe n’est donc pas un mur infranchissable. Son expérience le prouve.
« Il y a ceux qui sont tombés dans la marmite quand ils étaient petits. Ils écrivent sans fautes et peut-être même sans savoir pourquoi. Et puis il y a les autres, qui peuvent vaincre les difficultés avec un peu d’attention, d’assiduité. Je voulais offrir au public les moyens pour y arriver. »
Plus de régularités que d'exceptionsChemin faisant, elle a découvert que les régularités du français étaient bien plus fréquentes que les exceptions, contrairement à une idée répandue. « On n’enseigne pas suffisamment ces régularités. On insiste trop sur les exceptions. » Est-ce pour cette raison que nous commettons, peu ou prou, les mêmes fautes ? « L’apprentissage est une cause. Mais les erreurs proviennent aussi de l’analogie. Par exemple, on va écrire artichaut avec un d en se référant à chaud. »
Langue vivanteBénédicte Gaillard défend une nouvelle orthographe, plus simple ou supprimant certaines incohérences comme le fameux accord du participe passé avec le verbe avoir. « C’est un artifice. Abandonner cette règle ne serait pas simplifier mais rationaliser. Au profit d’un accord avec être et pas d’accord avec avoir. » Mais elle ne bannit pas pour autant l’ancienne graphie de l’accent circonflexe sur le i, du tréma, du trait d’union… « Le français est une langue vivante, en constante évolution. Les nouvelles formes ne peuvent être considérées comme fautives. Mais les anciennes formes ne peuvent être condamnées. »
« On ne peut plus vivre sans l’écrit »Pourrait-on, un jour, écrire comme on prononce ? « Non, car l’écrit se comprend visuellement, pas comme on l’entend même si avec un f remplaçant un ph, le mot resterait reconnaissable. »
Bénédicte Gaillard n’est pas de ces esprits grincheux qui pensent que l’orthographe va à vau-l’eau. « Aujourd’hui, on ne peut plus vivre sans l’écrit, ce n’était pas le cas au siècle dernier. Plus on est nombreux à écrire, plus le risque de fautes augmente, c’est mathématique, suggère-t-elle. Mais la conscience du rôle de l’orthographe reste vive dans la société, dans le monde du travail. C’est une raison de se montrer optimiste. »
« 100 jours pour ne plus faire de fautes ! » de Bénédicte Gaillard. Les éditions de l’Opportun, 400 pages, 16,90 euros.
Nathalie Van Praagh