Le maire de New York, inculpé pour corruption, plaide non coupable
"Je ne suis pas coupable, votre honneur", a lancé l'élu démocrate de 64 ans, costume bleu marine et cravate mauve à pois, dans une salle d'audience bondée de journalistes, où la juge Katharine Parker a solennellement lu ses droits et notifié les cinq chefs d'inculpation au "maire Adams".
La juge a ensuite remis en liberté l'élu, en lui interdisant d'avoir des contacts au sujet de l'affaire avec les témoins cités dans l'acte d'accusation. La prochaine audience de procédure a été fixée mercredi prochain, et l'avocat d'Eric Adams, Alex Spiro, a promis de déposer une requête en annulation des charges.
Eric Adams, élu à la mairie de New York en 2021, a ensuite quitté le tribunal, situé à quelques rues de l'hôtel de ville à Manhattan, sans faire de commentaires, levant simplement un pouce en l'air.
"Arrosé de cadeaux"
Ancien capitaine du New York Police Department (NYPD), élu local depuis 2006, Eric Adams est poursuivi pour s'être fait "arroser de cadeaux" pendant des années par des entrepreneurs et des ressortissants turcs, sous forme de voyages en avion en classe affaire ou séjours dans des suites d'hôtel, sans jamais déclarer ses gratifications comme il en avait l'obligation, a affirmé jeudi le procureur fédéral de Manhattan, Damian Williams.
L'acte d'accusation mentionne des faits de fraude électronique, sollicitations illégales de contributions pour une campagne électorale auprès de personnes étrangères et l'acceptation de pots-de-vin versés par un officiel lié au gouvernement d'Ankara.
En échange, Eric Adams aurait selon l'accusation usé de son influence auprès des pompiers de la ville pour accélérer l'ouverture d'un gratte-ciel abritant la mission de la Turquie auprès des Nations unies et son consulat général, à temps pour une inauguration en présence du président turc Recep Tayyip Erdogan en septembre 2021.
Selon le parquet fédéral, un système de fausses certifications lui aurait aussi permis de lever 10 millions de dollars de fonds publics pour ses campagnes.
Le maire a exclu de démissionner et s'est dit "impatient" de se défendre, appelant ses administrés à "écouter notre version de l'histoire".
Mais son inculpation sonne comme un coup de tonnerre et fragilise encore plus le responsable de la ville la plus peuplée des Etats-Unis (8,5 millions d'habitants), après des mois de spéculations depuis que l'existence de quatre enquêtes, dont trois fédérales, sur le maire ou ses proches, ont été révélées.
Appels à démissionner
Peu après sa comparution, les médias ont révélé qu'une très proche conseillère d'Eric Adams, Ingrid Lewis-Martin, de retour de voyage, a été accueillie par des enquêteurs à l'aéroport qui ont saisi ses téléphones, pendant que son domicile était perquisitionné.
Deuxième maire afro-américain de l'histoire de New York, élu en 2021 sur des promesses de sécurité, Eric Adams a vu son taux de popularité chuter durant son mandat, la ville ayant dû faire face à l'arrivée de plus de 200.000 migrants en deux ans, une hausse du coût de la vie et une crise de logement qui a fait grimper les loyers à des niveaux sans précédent.
Plusieurs élus new-yorkais de l'aile gauche du parti démocrate ont appelé Eric Adams à démissionner, dont la représentante au Congrès américain Alexandra Ocasio-Cortez. Mais la gouverneure de l'Etat de New York, Kathy Hochul, qui a le pouvoir de démettre le maire de ses fonctions, est pour l'instant restée prudente.
La prochaine élection du maire de New York aura lieu dans un an, en novembre 2025. Les ennuis politiques et judiciaires d'Eric Adams ont aiguisé les appétits pour lui succéder et plusieurs candidats sont déjà déclarés à une primaire démocrate.
Des médias américains ont aussi cité le nom d'un autre candidat potentiel, l'ancien gouverneur de New York Andrew Cuomo (2011-2021), qui avait atteint une stature nationale pour sa gestion de la pandémie de Covid mais avait dû démissionner à l'été 2021 après des révélations d'agressions sexuelles ou de harcèlement envers des femmes.