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Сентябрь
2024

La manufacture d'accordéons Maugein placée en liquidation judiciaire à Tulle

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Une semaine d'attente et le résultat est tombé. Le tribunal de commerce de Brive a rendu son jugement ce vendredi 27 septembre à 14 heures. La manufacture d'accordéons Maugein, située à Tulle, zone de Mulatet, vieille de 105 ans, est placée en liquidation judiciaire. Sans poursuite d'activité. Pas vraiment une surprise au regard des difficultés de la manufacture, qui compte 10 salariés pour garder la tête hors de l'eau face à une rude concurrence, notamment chinoise.

Le tribunal constatant que les trois derniers exercices de l'entreprise étaient déficitaires et qu'elle ne "dispose pas de la trésorerie suffisante pour régler ses dettes fiscales et sociales ni ses charges fixes" a fixé la date de cessation des paiements au 2 août 2024.

 

Les inquiétudes s'étaient précisées

La semaine précédant le jugement du dossier, vendredi 20 septembre, par le tribunal de commerce de Brive, les inquiétudes s’étaient précisées au sein du petit atelier. « Nous avons eu beaucoup de travail soudainement pour du SAV. Je pense que beaucoup apprenant que l’entreprise allait mal, se sont inquiétés. Ils se sont vite tournés vers nous pour des réparations, des révisions », glissait un salarié. À ses côtés, Stéphane promène un regard un peu las sur cette manufacture où il est entré voilà 39 ans. Accordeur, il est le plus ancien de la manufacture : « Je suis entré comme apprenti, car la formation se passait comme ça, après d’un maître d’apprentissage. À l’époque, je n’avais pas encore 16 ans. »D’autres, faisant référence aux tentatives de diversification insuffisantes, constataient avec fatalisme : « Il y a eu plein de choses de faites. Aujourd’hui, on en est là, mais ce n’est pas comme si on était resté attentiste. Mais c’est comme ça, c’est le marché… »

Un contexte général qui n’a pas laissé de place à ce savoir-faire tulliste, dernier intégralement artisanal en France. « On s’est battu, mais il n’y a plus de marché en France. Notre seul espoir était de parvenir à intégrer le marché chinois, où la croissance et l’intérêt pour l’accordéon sont les plus forts, mais nous n’y sommes pas parvenus. Et ce malgré des participations au Salon international des instruments de musique de Chine, plus grand rendez-vous mondial du secteur », regrettait Richard Brandao. Selon le dirigeant, « avec un importateur, la vente de 60 à 100 instruments par an sur ce marché nous aurait assuré une pérennité ».

Les tentatives de diversification ont échoué

Sur les tentatives de diversification, il constate une succession d’échecs. Les minaudières, lancées en 2019, se sont heurtées aux effets de la crise Covid, les parts de marché escomptées dans le domaine du luxe s’étant fortement réduites. Mis en vente en 2022, les harmonicas « Maujo » n’ont, eux non plus, pas rencontré le succès commercial espéré. « Il nous aurait fallu vendre environ 4.000 unités chaque année, et nous étions loin… » L’accordéon numérique conçu quelques années auparavant ? « Ça n’a pas non plus pris assez vite… », regrette Richard Brandao, qui explique qu’en 2019, la situation financière de la manufacture s’est fortement dégradée avec un chiffre d’affaires de 30 % en retrait. Un contexte morose pour les petites structures aggravé par l’emprise chinoise en Europe : « La Chine a acheté deux usines en Italie, dont le plus gros fabriquant européen. » 

La clôture de la procédure est fixée à 24 mois à partir du jugement d'ouverture. Le mandataire liquidateur prend donc désormais la relève du dirigeant Richard Brandao. Quant à un éventuel redémarrage de l'activité ? Un projet est envisagé mais qui se ferait quoi qu'il en soit dans d'autres conditions.

Laetitia Soulier et Julien Bachellerie