Gaya : le vélo cargo qui réinvente la mobilité urbaine des familles
C'est au bord du canal Saint-Martin qu'Amélie Guicheney nous a donné rendez-vous. C'est en effet là que se trouve la boutique de Gaya, marque de vélos-cargos électriques et familiaux née en 2021 et parvenue à se faire, en l'espace de quelques années, une belle place sur le marché des mobilités douces. A vrai dire, ses deux produits phares, les modèles compact et longtail, ont tout pour plaire : une assistance électrique redoutable, une esthétique épurée et colorée, des accessoires qui font la différence (un grand phare avant, un démarreur, des clignotants à l'avant et à l'arrière, un siège pour chaque passager avec un repose-pied prévu à cet effet) et de la technologie intégrée (tracker GPS, alarme), les vélos Gaya s'imposent comme une alternative durable et responsable à des modes de transports excessivement polluants.
" Leur conception est inspirée d'une mobylette ", reconnait Amélie Guicheney, cofondatrice et CEO de la jeune pousse parisienne. Une inspiration qu'elle tire certainement de sa longue expérience en innovation produit. " J'ai démarré dans des entreprises de FMCG [Fast Moving Consumer Goods, c'est-à-dire des biens de grande consommation, ndlr] en R&D, en marketing et développement et en études de marché, confie-t-elle. A la suite de mes études, j'ai choisi d'aller dans un cabinet de conseil en stratégie et marketing. J'ai fait ça pendant huit ans, c'était très formateur. " Amélie Guicheney rejoint ensuite Evaneos, marketplace de voyages responsables qui, à l'époque, figure dans le Next40. Elle y passe quatre années. " J'avais un rôle au sein du Comex, où j'ai piloté les métiers de l'offre et de la data. " Elle accumule également de l'expérience en gestion de crise avec l'arrivée inattendue du Covid. " La start-up était alors en phase d'hyper-croissance ", rappelle la CEO de Gaya, avant de confesser : " Je savais que je voulais monter une entreprise un jour dans ma vie. Mais à l'époque je n'ai pas osé sauter le pas. "
Les vélos Gaya, un concentré d'innovation au service de la mobilité durableUn heureux événement va cependant bouleverser sa vie : en 2020, elle donne naissance à un petit garçon, Léo. Combinée à ses années d'expérience professionnelle, sa maternité lui donne un regain de confiance et l'impulsion nécessaire pour se lancer dans un projet entrepreneurial. Souhaitant avoir un impact positif sur la ville dans laquelle son fils grandira, Amélie Guicheney songe à agir sur la mobilité, et en particulier celle des familles urbaines. D'où l'idée de vélos pouvant accueillir deux voire trois personnes, en particulier des enfants. Pour cela, elle s'entoure de Jacques Bonneville, ingénieur en aéronautique et ingénierie automobile, avec qui elle fonde alors Gaya. " Le premier défi, ça a été de lancer un produit industriel dans des délais très courts, qui plus est pendant le Covid, note la cofondatrice de la start-up. Le deuxième était de lancer une marque dans un écosystème très dense et de se différencier de manière significative. " D'où la nécessité pour la jeune pousse d'innover sur plusieurs plans. D'abord, sur le produit lui-même, qui convoque dans sa conception même des éléments issus de l'univers du scooter et de la moto. " On est les seuls à proposer ça sur le marché ", affirme la CEO. Son associé, Jacques Bonneville, du fait de son expertise dans la mobilité, y est pour beaucoup. A cela vient s'ajouter une brique technologique, consistant en un tracker GPS intégré au vélo, qui permet à la fois de bloquer l'assistance électrique à distance, de géolocaliser le vélo en temps réel et de consulter des données variées sur une application dédiée. Un élément à même de rassurer certains clients frileux face aux statistiques de vol de vélos en France - un vol par minute, précise Amélie Guicheney. " C'est à la fois un frein à l'usage et à l'achat. Et le fait de rassurer sur cette partie-là permet aussi de développer l'usage ", témoigne celle qui, après s'être faite volée son tout premier prototype de vélo Gaya, est parvenue immédiatement à le retrouver... grâce à la fonction GPS.
" Le deuxième volet sur lequel on innove, c'est sur notre approche digitale et e-commerce ", ajoute la cofondatrice de Gaya. En effet, la majorité des marques passent par des détaillants (Decathlon, Intersport, etc.). " Très peu de marques vendent en direct. Il a fallu qu'on crée une marque forte, qu'on émerge dans un marché où il y a plus d'une centaine de marques. " Amélie Guicheney fait ainsi le pari osé de vendre directement ses produits par internet, sans intermédiaire. Là où la marque parvient à se différencier, c'est aussi en proposant à ses clients d'essayer gratuitement le vélo de leur choix, en réservant un essai sur leur site. " On est convaincu que l'essayer, c'est l'adopter ! ", a-t-elle coutume de dire. Et ce n'est pas tout : il est également possible de personnaliser son vélo, de le configurer, avant de le recevoir à son domicile prêt à l'emploi.
Une start-up qui compte sur le feedback de ses clients
Pendant sa phase d'amorçage, Amélie Guicheney travaille sur de premiers prototypes et planche minutieusement sur les retours des utilisateurs. " J'ai lancé un faux site e-commerce avec un petit peu de Facebook Ads pour tester le concept, raconte la CEO. Avec cette approche-là, j'avais en quelque sorte une étude à grande échelle et en conditions réelles. " N'hésitant pas à questionner régulièrement ses clients dans une démarche de co-conception, l'entrepreneure construit son offre pas à pas avant de lancer officiellement la commercialisation à l'été 2022, suivie d'un succès immédiat. La start-up lève alors, dès l'année suivante, deux millions d'euros auprès de Via ID, filiale d'investissement dans les nouvelles mobilités du groupe Mobivia, et Karmen. Un premier tour de table complété par une campagne de financement participatif au cours de laquelle Gaya récolte près de 800 000 euros supplémentaires. " C'est ce qui nous a permis de démarrer. Il faut vraiment beaucoup de fonds pour démarrer une start-up industrielle ", témoigne l'entrepreneure. Au cours de son développement, la jeune pousse s'associe enfin à des fournisseurs tels que Velco, en charge de toute la partie IoT des vélos, mais aussi des partenaires ad hoc comme Zenride ou Betogreen, qui proposent alors les vélos Gaya aux salariés des entreprises. Les clients de Gaya ? Une cible plutôt familiale et urbaine, dont une certaine part bascule de certains modes de transports (voiture, etc.) au vélo. " On a notamment du report modal de la moto et du scooter, dans un contexte où la réglementation se durcit et où la circulation en ville se complexifie ", souligne Amélie Guicheney. La flotte de vélos Gaya, idéalement conçus pour le vélotaf, a déjà réalisé plus de 4 millions de kilomètres.
Pour Gaya, l'heure est au made in FranceAvec aujourd'hui plus de 12 millions de chiffre d'affaires cumulé, la jeune pousse, toujours à l'écoute de ses clients, a décidé en novembre dernier de relocaliser l'assemblage de ses vélos en Vendée, chez Arcade Cycles. Un premier pas vers la réindustrialisation de sa chaine de valeur en France, ce que l'entreprise espère concrétiser grâce à sa dernière levée de fonds de plus de 5 millions d'euros, essentiellement à travers du crowdfunding et des business angels. La marque projette notamment de relocaliser la fabrication de ses pièces à forte valeur ajoutée, à l'instar du cadre et des batteries, jusqu'à présent importées d'Asie. " On travaille également sur la conception des batteries et du vélo pour qu'ils soient plus facilement re-conditionnables et réparables ", confie la CEO. La jeune pousse ne manque pas d'ambitions : en plus de sa stratégie de relocalisation et d'innovation, qui devrait conduire à la création de nouveaux postes, Gaya réfléchit actuellement sur un nouveau modèle co-crée avec ses utilisateurs. Le tout avec pour but affiché de poursuivre son expansion dans les grandes villes françaises comme à l'international. Ce qui est certain, c'est que la croissance de l'entreprise parisienne pourra s'appuyer sur la mobilisation des pouvoirs publics sur les enjeux de réindustrialisation et de mobilité durable, comme en témoigne le Plan vélo et marche 2023-2027, pour lequel l'Etat investit 2 milliards d'euros (et six milliards en incluant les collectivités territoriales), et dont l'un des buts affichés est l'assemblage d'au moins 2 millions de vélos par an d'ici 2030. " Chez Gaya, conclut Amélie Guicheney, on est convaincu que chaque coup de pédale contribue à avancer vers un monde meilleur. "
Cet article a été publié initialement sur Big Média Gaya : le vélo cargo qui réinvente la mobilité urbaine des familles