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Dans les coulisses du centre d'alerte des pompiers de Haute-Loire

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« Il respire votre bébé ? Est-ce qu’il pleure ? Vous me dites qu’elle a le hoquet. Très bien, cela veut dire qu’elle respire. » La voix de l’opérateur du centre de traitement de l’alerte (CTA) n’a pas changé d’intonation. Elle a gardé la même intensité, le même calme du début à la fin de l’appel. Comme si le sujet était d’une banalité sans conséquence. Alors qu’il est question de la vie d’un nouveau-né. La situation est peut-être très grave pour ce bébé de quelques jours. Sa maman, qui était en train de lui donner le biberon, est en panique à l’autre bout du fil. Elle est seule avec le nourrisson et elle craint qu’il ne soit en train de s’étouffer. Dans la salle du CTA - Codis (Centre opérationnel départemental d’incendie et de secours), le pompier professionnel qui a pris cet appel au 18 a immédiatement capté l’attention du second opérateur et du chef de salle. Tous trois sont focalisés sur les paroles de leur collègue et sont prêts à intervenir à leur tour, si besoin, en appelant le médecin du Samu ou en engageant des effectifs de la caserne locale au domicile de la victime. Photo Céline DemarsMalgré la situation angoissante, la requérante réagit très bien et exécute parfaitement les gestes décrits au téléphone par son interlocuteur. « Vous allez vous asseoir et vous allongez le bébé en positionnant son dos contre votre avant-bras. Avec l’autre main, vous lui maintenez le menton et vous allez retourner l’enfant pour l’allonger de telle sorte que son ventre se retrouve contre votre cuisse. Si elle a besoin de régurgiter, elle va le faire. » Le bébé a vomi. Sa maman doit vérifier qu’il n’a plus rien dans la bouche et le surveiller. Au téléphone, l’opérateur des pompiers lui indique qu’elle peut raccrocher. Dans la salle du CTA-Codis, dans le quartier de Taulhac, au Puy-en-Velay, c’est le soulagement. Le téléguidage de l’appelante a été efficace : le bébé respire et il va bien.

Le téléguidage de l’appelante a été efficace : le bébé respire et il va bien

Toutes les interventions des pompiers de Haute-Loire commencent dans cette salle. Le pompier qui répond a reçu une formation spécifique. Son temps de travail est partagé entre le centre de traitement de l’alerte et le centre de secours principal du Puy. C’est une volonté de la direction, pour ne pas se couper du terrain.Quand ils sont au centre de traitement de l’alerte, ces « hommes de l’ombre » comme ils se nomment entre eux, savent que leur engagement de sapeur ne sera pas physique, mais 100 % mental. Être le premier maillon de la chaîne des secours, c’est extrêmement engageant. « Ici, on n’a pas le droit à l’erreur », rappelle le chef de salle. Pour optimiser le temps et la qualité des moyens engagés, les opérateurs du centre de traitement de l’alerte ont à leur disposition des canevas types de question. Cela permet d’éviter des erreurs d’appréciation du témoin qui a composé le 18 et qui peut être influencé par ses émotions.La première précaution est d’enregistrer le numéro de téléphone. « Il faut que l’on puisse rappeler, si la communication venait à être interrompue ». Photo Céline DemarsLe critère de la localisation est aussi primordial. Pour trier les informations plus ou moins fiables communiquées par l’appelant, qui ne connaît pas forcément l’endroit où il se trouve, le logiciel de traitement des appels permet de géolocaliser le téléphone du requérant. La précision, « de 50 à 800 mètres », varie en fonction de la couverture de la zone et de la durée de l’appel.En cas d’un accident de la circulation sur la voie publique, l’opérateur doit déterminer le nombre de véhicules et de personnes impliqués, « surtout identifier l’état de gravité de chaque victime potentielle… »  « Nous devons analyser tout le contexte pour prévoir le matériel ainsi que les personnes nécessaires et capables à intervenir », précise le chef de salle. Tous les renseignements sont enregistrés dans la fiche d’appel au 18 remplie par l’opérateur. Ce dernier choisit un code sinistre parmi des dizaines de cas possibles.

Cela offre une aide à la décision en proposant des personnels, des véhicules et du matériel disponible dans la logique géographique des centres de secours armés les plus proches du lieu de l’intervention.

Une ambulance sera engagée pour chaque victime. Il faut prévoir un véhicule de secours routier outillé en cas de désincarcération… Une fois que le système a proposé une solution opérationnelle appropriée, l’opérateur vérifie que tout correspond et il engage tout le monde d’un dernier clic de souris.Plusieurs minutes se passent entre le moment où le dispositif est engagé et celui où les premiers pompiers arrivent sur le lieu de l’intervention. Certaines situations ne peuvent pas attendre et nécessitent des actions immédiates.« On peut demander à la personne qui nous appelle de réaliser des gestes simples, comme contenir un saignement, placer la victime en position latérale de sécurité (PLS). Cela arrive que l’on explique les gestes à réaliser pour pratiquer un massage cardiaque. On va en parallèle se renseigner sur l’endroit le plus proche où trouver un défibrillateur. Le premier témoin a un rôle capital dans la survie. »

« Le premier témoin a un rôle capital dans la survie »

Si l’appel au 18 ou au 112 concerne une demande de secours à la personne, le CTA a l’obligation de transférer l’appel à la régulation du Samu qui va apporter son expertise médicale et décider d’envoyer une structure mobile d’urgence et de réanimation (Smur), demander l’engagement d’une ambulance des pompiers ou donner d’autres indications au requérant.Une fois le dispositif de secours engagé, le travail de l’opérateur se poursuit. « Nous surveillons si l’alerte a bien été transmise aux personnels concernés. Les pompiers professionnels, comme volontaires, bipent à leur arrivée à la caserne. On sait quand le véhicule quitte le centre de secours et on peut suivre où il se trouve. »En fonction de la nature des interventions, il y a d’autres services à prévenir comme les forces de l’ordre s’il s’agit d’un accident sur la voie publique, Enedis et GRDF si les réseaux d’électricité ou de gaz sont impactés ou doivent être coupés, le service départemental voire la direction interrégionale des routes et parfois certains élus.Au cours du week-end du samedi 31 août au dimanche 1er septembre, le CTA-Codis a engagé 79 interventions en 48 heures. En 2023, les téléphones du centre de traitement de l’alerte ont sonné 91.216 fois (pour 14.757 interventions dans le département), soit un appel toutes les 6 minutes, de jour comme de nuit (et une intervention toutes les 32 minutes).

Céline Demars