Refuge doré ?
Quand le monde va mal, l’or s’envole. Depuis le Covid, le cours de l’once a le vent en poupe. Troublant effet miroir dans lequel les humeurs de la planète se lisent au cœur d’un métal. L’intéressant, ici, est ce que cela raconte de nous-mêmes. C’est tout le sens de la valeur refuge, le chez soi qui protège du gros temps. Le retour à l’ancien et au certain quand le nouveau n’est plus sûr de rien. L’or est un « placement idiot », dit-on. Certes, mais il signe aussi le sacre de la permanence face aux caprices, de la règle intangible face aux contingences qui guident les gains grisants et précipitent les banqueroutes brutales. C’est le cas de l’or, qui ne fait rien gagner mais rien perdre non plus. Ce placement anti-glamour a le goût du secret et de l’anachronisme, du coffre bouclé à double tour dans lequel on cache les trésors à l’abri des jours mauvais. Quand la scène politique vacille, quand aucune majorité n’émerge, on rappelle un ministre issu de la chiraquie quitte à sacrifier les élans disruptifs du début. Quand le monde tremble, on retourne à l’or, quitte à enterrer ses rêves d’audace. Mais faudra-t-il s’inquiéter si un jour le cours de l’or baisse ? C’est qu’alors nous irons mieux.
l’éditorial
Stéphane Vergeade