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Сентябрь
2024

“Vivant” de Malik Djoudi, le meilleur album français de l’année ?

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“J’suis enfin vivant/Vivant comme je l’aime/Vivant comme je l’attendais/Vivant comme je l’aime”, affirme Malik Djoudi sur le single programmatique de son quatrième album, également intitulé Vivant. Après sa brillante passe de Troie (2021), le chanteur quadragénaire s’est “enfin rencontré après avoir beaucoup douté”. Artistiquement et sentimentalement, serait-on tenté·es d’ajouter, pour suivre attentivement son parcours depuis les années 2000 où il officiait encore en groupe (Moon Pallas) dans la langue de James Blake.

Un artiste magnétique au Tempérament solaire, qui vise le dépassement à chaque album depuis l’inaugural Un (2017) – porté par le tube indémodable Sous garantie. “En 2023, je vais ne plus faire de concessions, aller au bout de mes idées. Faire confiance à mon instinct, qui parfois me joue des tours, nous confessait-il d’ailleurs pour résumer ses bonnes résolutions de l’année écoulée. En 2023, je compose mon prochain disque en ayant pour seule règle le plaisir de faire et d’écrire, sans se fixer de limites… En me mettant parfois en difficulté, et provoquer l’accident.”

Ainsi, après avoir duettisé sur ses précédents disques avec Étienne Daho, Lala &ce, Philippe Katerine et Isabelle Adjani – excusez du peu –, Malik Djoudi a décidé se recentrer sur sa propre voix pour (encore) mieux trouver la sienne, tout en la jouant plus collectif que jamais.

De brillantissimes musicien·nes – le guitariste Adrian Edeline, les bassistes Élise Blanchard et Maxime Daoud, les batteurs Arnaud Biscay et Louis Delorme, le saxophoniste Adrien Soleiman, qui a coréalisé le disque mixé par Ash Workman (déjà à l’œuvre sur Tempéraments, 2019) –, avec lesquel·les il aime performer, sont venu·es le rejoindre aux studios arborés de La Frette, en banlieue parisienne, où Fontaines D.C. et James Ford allaient leur succéder à l’automne 2023.

“Être vivant, c’est vivre sans s’épuiser dans d’éternelles questions, sans ce satané vélo dans la tête”, insiste-t-il. Pourtant, on connaît la chanson, c’est en plein lien défait que les artistes réalisent souvent leur grand œuvre (du Dolorès de Jean-Louis Murat à Trash Yéyé de Benjamin Biolay, les exemples pleuvent comme à Gravelotte).

Dans ce disque d’un homme amoureux (Viens on prend le temps, deuxième single d’un groove contagieux, aux faux airs daft-punkiens et au refrain en anglais), les paroles portées par sa voix de falsetto reconnaissable entre mille frappent les sens (“Je joue sur ta joue/Ensemble se délivrer” dans Excite) autant que l’esprit (“Cette nuit, on dansait/J’ai rêvé qu’on se manquait” dans 2MN). “Selon moi, les textes sont de la musique qui doit réveiller les sens”, aime-t-il à répéter. Au diapason, les mélodies déroulent autant d’accords magiques que dans la sublime chanson conclusive.

Une bouleversante déclaration d’amour

Comme sur ses trois albums passés, Malik Djoudi mélange harmonieusement les hits potentiels (Vivant, Pas vraiment, Mes ami(e)s et surtout Vendredi, au refrain imparable : “Pourquoi tous les jours ne sont pas vendredi ?”) avec les ballades renversantes (Messes basses, 2MN, Maman, bouleversante déclaration d’amour malgré une enfance contrariée). “Le plus important dans ma vie/C’est faire plaisir à Maman/Nous on s’en fout du succès/Nous on s’en fout des autres”, chante-t-il, entre aveu définitif et douce ironie.

Et c’est vrai qu’une question nous taraude, à chaque disque de l’auteur de Vertiges : quand croisera-t-il enfin le chemin du succès public, après tant d’éloges critiques et de compliments artistiques de ses pairs ? C’est précisément parce que les réponses sont multiples, et l’explication souvent irrationnelle, que Malik Djoudi rattrape le temps perdu depuis sept ans, en élevant à sa manière singulière considérablement le niveau de la musique française, et en signant un classique de la french pop.

Comme sur cet Accord magique qui conclut son quatrième et meilleur album avec l’art et la manière de vous faire tomber à la renverse : “Libérer l’aurore/Sans allégorie/Bien sentir sa peau/Un accord magique.” Ne cherchez pas plus loin le meilleur album français de l’année. Franck Vergeade

Vivant (Cinq7/Wagram). Sortie le 13 septembre. En tournée française et à La Cigale, Paris, le 3 décembre.