Les internes du CHU de Clermont-Ferrand s'inquiètent : "On ne fait pas de la bonne médecine quand on est épuisé"
Après plusieurs années de progression, le nombre de postes d’internes proposés au CHU de Clermont-Ferrand va chuter cette année. Cet automne, 204 internes sont attendus contre 244 l’an dernier (232 en 2022 et 227 en 2021). Il s’agit de la traduction locale d’une baisse de 1.510 postes au concours national de l’internat de médecine (7.974 pour 2024-2025 contre 9.484 l’an dernier), une décision du ministère de l’Enseignement supérieur, que le CHU n’a pas souhaité commenter.
Un dommage collatéral de la réforme"Ce n’est pas une surprise car ça correspond à une baisse d’environ 15 % du nombre de candidats cette année", temporise Alban Meunier. Vice-président du syndicat autonome des internes en exercice des hôpitaux de Clermont-Ferrand (SAIEHCF) et membre de l’intersyndicale nationale des internes (ISNI), il décrypte : "Cette promotion est la première après la réforme qui a introduit de nouvelles conditions et de nouvelles modalités d’accès à l’internat. Par peur des couacs qui accompagnent souvent la première année d’une réforme, certains élèves ont choisi de redoubler pour éviter d’être dans cette promo mais ils arriveront l’an prochain. Il devrait donc y avoir beaucoup plus de postes proposés."
"Il faudra pallier le manque de personnel pour une charge de travail toujours plus importante. Dans des services déjà sous tension, ça pourrait devenir très compliqué."
Si cette diminution du nombre d’internes n’est que temporaire, elle ne sera pas pour autant sans conséquences. "Il faudra être très vigilant pour faire respecter le temps de travail des internes qui va souvent bien au-delà de la limite de 48 h/semaine alors que c’est 39 h/semaine dans le droit européen. On ne fait pas de la bonne médecine quand on est épuisé", prévient Alban Meunier.
Des inquiétudes au-delà de cette annéeÀ plus long terme, le jeune syndicaliste s’inquiète pour la qualité de la formation et le recrutement au CHU de Clermont-Ferrand. "Aujourd’hui, certains internes sont envoyés sur des postes dans des hôpitaux périphériques pour répondre aux besoins du territoire mais qui n’ont pas forcément d’intérêt pédagogique. Or ce n’est pas leur rôle, un interne reste un médecin en formation?!"
"Année après année, on a tenu face au Covid, aux coupes budgétaires, aux fermetures de lits. L’hôpital a traversé toutes les crises mais on a peur du point de rupture. Qui sait combien de temps on tiendra encore??"
"Au CHU de Clermont, on a systématiquement moins d’internes que de postes proposés. Avec cette baisse de 45 postes supplémentaires, on va vraiment être dans l’embarras. On est devenu bricoleur à force de ne pas avoir les moyens mais on est inquiet."
Résultats le 10 septembreSi la baisse du nombre de postes a, semble-t-il, pu être répartie équitablement au niveau des territoires, elle n’a pas toujours pu être du même ordre suivant les spécialités. Cette année peut-être plus que les autres, les futurs internes en médecine attendent donc avec inquiétude leur affectation définitive qui sera officialisée mardi 10 septembre.
Maud Turcan