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Август
2024

Quand la deuche quittait le bitume

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Si les dernières « deudeuches » Citroën sont sorties des chaînes de l’usine portugaise de Mangualde en 1990, cette voiture mythique occupe toujours une place très particulière dans le cœur de nombre de Français pour lesquels c’est un véritable art de vivre, comme un goût de liberté, une voiture qui représente une certaine idée de la France.

Les propriétaires de 2 CV (pour deux chevaux fiscaux), ou « deudeuches », se saluent lorsqu’ils se croisent, montrant ainsi un esprit de communauté.

Les « deuchistes » aiment se retrouver lors de concentrations organisées par des clubs de passionnés. On en compte plus d’une centaine en France. Un musée en Alsace est même intégralement consacré à cette voiture culte. Des rallyes raids en Afrique ou ailleurs sont aussi organisés démontrant la solidité et l’endurance de ces véhicules pour baroudeurs.

Pour l’arbre de Noël

À Cusset, la 2 CV a laissé des souvenirs du côté de Chassignol. À la fin des années 1980, le dynamique comité des fêtes de ce quartier périphérique, qui chaque année organisait, entre autres, son réputé concours de belote dont les bénéfices finançaient l’arbre de Noël de l’école du hameau, se met en tête d’organiser une compétition de 2 CV cross, une première dans la région.

« C’est en allant voir des épreuves similaires à Orléans, la Châtre, ou le Péchereau dans l’Indre, (où eut lieu le tout premier 2 CV cross en 1972), que l’idée petit à petit a germé au sein de notre petit groupe d’une dizaine de personnes », se souvient le président de l’époque de ce comité où passion et amitié étaient les deux principaux moteurs.

Une idée un peu folle au prime abord, tant le projet nécessitait de structures et de moyens. Mais impossible n’était pas chassignolais !

2.000 spectateurs

L’inscription auprès de la Ligue Nationale de 2 CV cross (qui est une discipline de la Fédération Française de Sport Automobile), une piste de 900 m tracée au sein du site de Turgis, de vastes emplacements pour le parc concurrents et pour les spectateurs venus nombreux, (plus de 2.000 dès la première année), une sonorisation sur l’ensemble du circuit, une niveleuse et une arroseuse pour l’entretien de la piste, des tracteurs en cas de sorties de route (fort nombreuses), un service de secours ambulance obligatoire, des commissaires de courses fournis par l’association sportive automobile locale, une cuisine et son personnel pour confectionner et servir 500 repas sur place sur 2 jours, et environ 80 bénévoles pour gérer les entrées et les buvettes. Rien que ça…

Les amis et amis des amis furent mis à contribution, ainsi que les associations, et c’est ainsi que le samedi 6 et dimanche 7 mai 1989, 75 pilotes venus de toute la France, (près de 500 personnes avec mécaniciens et familles), ont pu faire vrombir les moteurs de leurs « bolides » sur les hauteurs de Cusset, pour l’une des manches du championnat national de la discipline.

Défilé en ville

Le samedi matin, les « deudeuches » ne sont pas passées inaperçues pour se rendre en ville afin de procéder aux contrôles techniques obligatoires, les « bolides » devant être conformes à la production de série, à l’exception des arceaux de sécurité et fixation des sièges.

La « balade » de tous les véhicules le samedi soir dans Cusset, (encadrée par la police) est restée dans les mémoires.

« Les temps des qualifications étaient importants pour décider du placement sur la grille de départ le dimanche, en raison de la difficulté pour doubler sur cette piste très technique, très appréciée par les pilotes. Les meilleurs de l’époque avaient pour nom : Maciula, (plusieurs fois vainqueur à Cusset), Komaniecki, Perraudin, ainsi que Rachel Garnier, la seule femme à réussir à s’imposer dans ce monde très masculin. Sans oublier “Papy Cross”, qui, à près de 70 ans, venant du Cap Fréhel, était très apprécié dans le parc concurrent, et n’aurait manqué pour rien au monde la manche cussétoise », se remémore avec nostalgie l’ancien dirigeant.

Quelques pilotes cussétois s’essayèrent à cette discipline, véritable école de pilotage, pendant la douzaine d’années où se perpétua le 2 CV cross de Cusset-Chassignol.

Aujourd’hui, la piste de Turgis, qui a connu tant de courses effrénées dans le bruit et la poussière des circuits, n’étant plus homologuée, est désormais silencieuse. Les modestes et vaillantes « deudeuches » ne tourneront plus à Chassignol.