A quoi ressemble l'agriculture du Kazakhstan, invité d'honneur du Sommet de l'élevage de Clermont-Ferrand
Malgré les larges autoroutes à deux fois trois voies qui relient les grandes villes, se déplacer en voiture est vite très chronophage au Kazakhstan. La densité de population y est l’une des plus faibles au monde, avec vingt millions d’habitants répartis à travers quelque 2.724.900 km². Une superficie qui fait de ce pays (cinq fois comme la France), la 9e plus vaste contrée du monde et la 2e plus grande issue de l’éclatement de l’URSS (Union des républiques socialistes soviétiques).
Un peu plus d’un million de Kazakhstanais vivent à Astana, la nouvelle capitale qui a détrôné la grande métropole économique, Almaty. Le tout sur décision du premier président du pays, Noursoultan Nazarbaïev, de transformer ce vieux centre de caravansérail via un programme d’urbanisation avant-gardiste doté de bâtiments et d’équipements ultramodernes.
Tradition d’élevage nomadeÀ travers cette ville où la circulation est très dense, d’immenses pancartes annoncent la tenue, en septembre prochain, des 5e Jeux mondiaux nomadiques. Ils se dérouleront sous le parrainage de l’Unesco, avec des épreuves équestres, de la lutte, du tir à l’arc traditionnel et bien d’autres épreuves encore. Une façon supplémentaire de rappeler la grande tradition d’élevage nomade qui a façonné le pays, premier producteur de viande ovine d’Asie centrale et sixième producteur mondial de blé.
L’agriculture figure parmi les priorités du gouvernement afin de diversifier l’économie et d’atteindre les cent pour cent d’autosuffisance alimentaire. Plusieurs programmes publics de développement sont en vigueur, notamment dans les filières d’élevage et pour la transformation agroalimentaire. Employant 12,7 % de la population active, le secteur agricole ne constitue qu’un peu plus de 5 % du PIB (produit intérieur brut).
216 millions d’hectares de terres agricolesLes terres agricoles couvrent 216 millions d’hectares de superficie. 29 millions d’hectares sont des terres cultivées, 181 millions d’hectares des pâtures et 5 millions d’hectares des cultures fourragères.
Avec un fort potentiel de croissance, le Kazakhstan vise à devenir un acteur mondial dans les secteurs agricole et agroalimentaire. D’autant qu’avec le développement des nouvelles Routes de la soie, le transport des produits frais agricoles vers les grandes places de marché du sud-est atlantique ou de la Chine est facilité et beaucoup plus rapide.
Le Kazakhstan compte 216 millions d’hectares de terres agricoles, dont 181 Mha de prairies. Il est un acteur important des marchés internationaux des céréales. Il dispose d’environ 6.000 grandes unités de production agricole, spécialisées en grandes cultures, et de 165.000 fermes individuelles.
Routes de la soieLe pays attend beaucoup des coopérations extérieures qu’il peut nouer avec des pays comme la France. Notamment des échanges que sa délégation pourra tisser lors du 33e Sommet de l’élevage de Clermont-Ferrand, dans le Puy-de-Dôme - du 1er au 4 octobre-, dont il sera l’invité d’honneur. Ses besoins sont importants : en matière de transfert de technologies et de savoir; d’assistance dans la promotion de ses produits agricoles sur les marchés internationaux; de développement de marchés d’exportation ou encore d’initiatives environnementales.
Sans compter que le pays se retrouve pris en étau entre ses voisins russe et chinois d’un côté, et l’Europe notamment de l’autre. Les sanctions et la situation géopolitique actuelle compliquent les chaînes d’approvisionnement, affectant la disponibilité des ressources.
Le Kazakhstan veut également se détacher de sa dépendance aux importations, en particulier de matériel et d’engins agricoles, qui le rendent vulnérable aux crises économiques externes.
Côté production de viande, le pays compte 8,6 millions de bovins ; 21,9 millions d’ovins ; 56 millions de volailles ; 734.000 porcs. Côté production laitière, il enregistre 6,5 millions de tonnes de lait cru produites, 446 fermes laitières, 178 usines de transformation du lait.
Adaptation climatiqueComme partout sur le globe, l’enjeu est enfin climatique. Le pays a connu des inondations, et les conditions météorologiques extrêmes menacent son agriculture. Le secteur doit s’emparer des nouvelles technologies et adopter des pratiques innovantes adaptées. Et ceci alors que son climat a toujours été rude, avec un mercure dépassant les 30°C l’été et pouvant descendre jusqu’à -30° voire -40°C l’hiver. Un climat façonné par une géographie tranchante, avec des millions de kilomètres carrés de steppes autour desquelles se dressent des montagnes culminant jusqu’à près de 7.000 mètres d’altitude.
Le salon Jana Dala - Green day, mini-Sommet de l’élevage local
Un énorme orage s’est abattu sur la ville d’Astana et sa région en cette fin juillet. D’immenses flaques d’eau se sont formées au bord des routes, obligeant les services à déployer des pompes pour l’évacuer.
Après un peu moins d’une heure de trajet, l’arrivée au salon Jana Dala - Green day n’est pas des plus aisées. Organisé comme le Sommet de l’élevage de Cournon à ses débuts, c’est-à-dire au milieu des champs, en plein air, l’événement a subi de plein fouet les assauts de la météo.
200 exposants, 5.000 visiteursLe terrain est boueux, le ciel capricieux. Mais les 200 exposants sont bien présents, les visiteurs (5.000 attendus) aussi, bottes ou sacs en plastique aux pieds. Ce rendez-vous organisé sur deux jours existe depuis 2013. Il en est à sa 6e édition. Pour la première fois, les races bovines s’affrontent en concours national. Le propriétaire du taureau sacré repartira avec le gros lot : un tracteur.Sous les chapiteaux, les chambres des races locales sont là pour informer. Parmi elle, la Chambre républicaine des races charolaise, limousine et aubrac.
Ces trois races françaises sont déjà présentes au Kazakhstan, avec respectivement des cheptels de 1.400, 400 et 200 têtes. À quelques mètres, les ovins aussi sont jugés. D’autant que le sujet de l’élevage ovin est prioritaire pour le pays. « La croissance des animaux est vraiment extraordinaire ! Je les ai trouvés très grands. La désaisonnalité est très importante, c’est-à-dire le fait d’avoir un bélier qui peut lutter quand c’est le moment idéal », échange Michèle Boudoin, éleveuse dans le Puy-de-Dôme et présidente de la Fédération nationale ovine.
Au Proche-OrientLa marge de progression de l’export est grande. Le Kazakhstan envoie déjà de la viande ovine au Proche-Orient. Une plateforme numérique a été mise en place. « Le goût de la viande est vraiment un point compétitif, en tout cas, c’est le retour qu’on a des pays du Proche-Orient », acquiesce cette spécialiste. La mission actuelle est d’accompagner les éleveurs dans leurs démarches pour exporter leur production. Le but est aussi d’avoir au moins deux agnelages dans l’année, et d’essayer d’unir les professionnels autour d’un consortium, afin d’avoir une offre constante.
« Nous devons fournir de la viande en fonction des besoins, pas des agnelages », appuie la spécialiste. Sans le soutien de l’État, tout cela serait impossible. Les exploitations ont besoin de subventions car le chiffre d’affaires se fait souvent au moment de la transformation.
Gaëlle Chazal
gaelle.chazal@centrefrance.com