Basket: États-Unis/France, "Avengers" contre vengeurs démasqués
Ne pas se fier aux apparences. Du huis clos de Saitama à la fureur de Bercy, le décor a changé, les masques sont tombés et les "Avengers" sont arrivés.
En partie pour effacer l'échec de la quatrième place du Mondial-2023, les Américains ont monté une armada comparée, par les observateurs et les amateurs, aux héros de la célèbre saga de comics.
Là où Kevin Durant, aujourd'hui 35 ans, était quasiment l'unique vedette de l'effectif de Tokyo, le triple médaille d'or olympique est cette fois très bien accompagné, en premier lieu par les deux autres joueurs qui ont dominé la NBA depuis une quinzaine d'années.
Soit le "King" LeBron James, de retour à l'aube de ses 40 ans pour une dernière danse après avoir fait l'impasse sur les deux éditions précédentes, et Stephen Curry qui, à 36 ans, veut ajouter l'or olympique à son palmarès.
Un trio qui cumule 10 championnats NBA et 14 titres de MVP de la ligue (saison régulière et finale) et est entouré de "simples" stars (Anthony Edwards, Devin Booker, Jayson Tatum), du spécialiste de la défense Jrue Holiday et de trois pivots venus ajouter la hauteur indispensable à la raquette américaine, dont Joël Embiid.
La nouvelle tête de turc d'une partie du public français depuis le début du tournoi: après avoir indiqué son désir de jouer pour les Bleus, et obtenu la nationalité français, le Camerounais a finalement rejoint les rangs de "Team USA".
"Un mois de préparation pour rien"
Une sélection parfois abusivement comparée à la "Dream Team" envoyée à Barcelone en 1992 (Jordan, Magic Johnson, Bird, Barkley, Ewing...), qui était elle entourée d'un halo quasi mystique à une époque où la NBA était beaucoup moins mondialisée.
La concurrence est 32 ans plus tard beaucoup plus relevée, et si l'entraîneur d'alors Chuck Daly "n'avait pas pris le moindre temps mort du tournoi", selon Steve Kerr, l'actuel sélectionneur a dû lui batailler jusqu'au bout face aux Serbes en demi-finales (95-91), qui menaient encore de 13 points à l'entame du dernier quart-temps.
Le monde regarde les Américains, et même la France, selon Guerschon Yabusele, qui a "juste envie de les battre parce que même nos médias parlent plus d’eux que de nous". "On a envie de les battre pour fermer un peu la bouche de tout le monde".
L'assertion est peut-être un poil exagérée mais dit la rage qui anime cette équipe de France, qui s'est surnommée "les cailleras" (racailles en verlan).
Elles sont revenues d'un Mondial-2023 raté (élimination au premier tour) et d'une préparation tumultueuse (quatre défaites pour terminer) avant un premier tour tantôt miraculeux (victoire contre le Japon après avoir arraché la prolongation), tantôt inquiétant (défaite 85-71 contre l'Allemagne).
"On a fait un mois de préparation pour rien quasiment, car on a tout changé en deux jours", a lancé Batum, chef de file de ces Bleus transfigurés après la déroute contre la Mannschaft.
"Une chance sur 14 millions"
Ils ont depuis remis les pendules à l'heure dans le huis clos des réunions, se sont tous rangés derrière l'engagement sans faille et les plans tactiques demandés par Vincent Collet qui, après avoir tâtonné, a trouvé ses rotations d'équipe.
En plaçant notamment Rudy Gobert sur le banc, pour laisser place nette aux guerriers de l'intérieur, Yabusele et Mathias Lessort, habitués en Euroligue des rugueuses joutes du basket Fiba.
Et en propulsant dans le cinq de départ l'énergique et épatant Isaïa Cordinier, défenseur acharné et artilleur avisé contre le Canada en quarts (82-73) puis l'Allemagne (73-69).
"On a trouvé la formule, les +line up+ (compositions), les bonnes choses", a résumé Batum, bien décidé à saisir l'infime chance de faire tomber les États-Unis pour la première fois dans un match-couperet aux JO depuis 2004 (défaite contre l'Argentine en demi-finales).
"On a une chance sur 14 millions peut-être, mais on va la saisir", a lancé "Batman", en référence selon lui à la saga des Avengers.
Oui, les Américains "sont plus forts qu'il y a trois ans, mais on est à la maison et c'est la magie des Jeux, sur un match des dingueries peuvent se passer, on aura toute une salle et un pays derrière nous".
Pour écrire la plus belle page de l'histoire de cette équipe de France, qui veut enfin ajouter l'or à ses trois médailles d'argent olympiques (1948, 2000 et 2021).