Pourquoi la nomination du nouveau chef du Hamas risque-t-elle d'enterrer les négociations ?
Terré dans son tunnel sous la bande de Gaza, Yahya Sinouar est devenu la nouvelle cible à abattre pour Israël. Après la mort d’Ismaël Haniye, à Téhéran, le 31 juillet, celui qu’Israël tient pour responsable du « déluge d’al-Aqsa » le 7 octobre, évoluera désormais à la tête du bureau politique du Hamas. Un signal clair envoyé aux dirigeants israéliens, empêtrés dans le même temps dans une nouvelle escalade des tensions avec l’Iran.
Qui est Yahya Sinouar ?À la tête du Hamas dans la bande de Gaza depuis 2017, Yahya Sinouar était un proche d’Ismaël Haniyeh, avec qui il « partageait les rôles » remarque le spécialiste du monde arabe contemporain Gilles Kepel. Sa nomination a « fait consensus auprès des diverses branches du Hamas à Gaza, en Cisjordanie ou auprès des prisonniers et membres de la diaspora ».
Un choix salué également par les alliés régionaux du Hamas et notamment par le « pouvoir iranien dont Yahya Sinouar est très proche ». Libéré en 2011 après 22 années d’incarcération en Israël, Yahya Sinouar est un homme radical, « focalisé sur la solution militaire », explique le politologue. Traqué par Israël, il n’a pas fait d’apparition publique depuis le 10 octobre.
Pourquoi ce choix peut-il compliquer les négociations ?Avec la mort d’Ismaël Haniyeh, « la mécanique des négociations est désormais difficile, souligne Gilles Kepel, puisque comme l’a souligné le Premier ministre du Qatar, il n’y a plus de négociateur ». Redoutable homme d’affaires, Ismaël Haniyeh « était en charge des négociations » et avait noué « une forte relation avec la Turquie et l’Iran ». Désormais « isolé dans les tunnels », le nouveau chef du bureau politique du Hamas « ne peut plus prendre part aux négociations à Doha ».
La région se dirige-t-elle vers une nouvelle guerre ??En tuant simultanément le numéro 2 du Hezbollah Fouad Chokr à Beyrouth puis Ismaël Haniyeh à Téhéran, Israël s’est attiré les foudres des puissances de la région. Loin du mouvement de médiation initié par Joe Biden le 31 mai, le Hezbollah libanais et les autorités iraniennes ont appelé aux « représailles ». Des menaces prises très au sérieux par les pays occidentaux qui ont appelé leurs ressortissants à quitter les territoires. Toutefois, selon Gilles Kepel, « il n’est pas sûr que l’Iran soit en capacité de passer à un stade supérieur ». Pour le politologue, « l’assassinat d’Ismaël Haniyeh, « a surtout révélé la faiblesse de l’Iran en matière de sécurité ».
Victor Delair