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Август
2024

"C'est un boulot avant tout !" : les gardes nature veillent sur la chaîne des Puys

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Travailler dans la nature. Il y a pire comme boulot. Certains sont plus chanceux que d’autre, à l’image de Lolei, 28 ans et Antony, 45 ans, binôme de gardes nature de la chaîne des Puys, dans le Parc naturel régional des volcans d’Auvergne. En tout, ils sont huit (quatre permanents et quatre saisonniers) à veiller sur 24.000 hectares de nature. Leur matière première ? Le terrain. Leurs missions ? Variées, mais essentielles.

"On est là pour informer et sensibiliser les personnes. Mais il y a aussi toute une partie 'police', de problèmes vis-à-vis de la réglementation. On pratique aussi un suivi naturaliste, c'est-à-dire que l’on va observer la faune, la flore, faire un suivi de certaines espèces, de certains terrains géographiques. En gros, monitorer le plus possible le site dont on a la charge", explique Antony, garde-nature depuis 2005. De véritables couteaux suisses aux grandes responsabilités.

Le gros du travail des gardes nature est avant tout d’informer, de sensibiliser et de faire de la prévention auprès des marcheurs.

Le rendez-vous est donné à la maison du Parc naturel régional des volcans d’Auvergne, à Aydat. Le cadre est bucolique. En cette fin juillet, Lolei et Martin sont de surveillance, de 15 heures jusqu’à tard dans la soirée. Direction le puy de Côme. Le 4×4 floqué "Gardes nature" file dans la forêt. Au volant, le regard d’Antony balaye les chemins d’accès dans les bois, pour repérer les potentielles voitures garées. Dans la poche arrière du siège, des panneaux avec un sens interdit, qui lisent "Passage fermé". Ils servent à rappeler l’interdiction d’accès aux sentiers. Même si, souffle Antony, "on se les fait souvent arracher".

"Là pour faire respecter des règles"

La mission du jour : s’assurer justement que personne ne grimpe le sommet du puy de Côme. À la fin des années 1990, l’augmentation de la fréquentation et les pratiques peu respectueuses ont détérioré son état. Depuis 2002, son accès est fermé au public afin de limiter l’érosion des flancs, que l’activité humaine aggrave. Seul le tour du puy est possible. À 1.250 mètres d’altitude, on y trouve alors seulement des moutons et des brebis pour les estives. Les animaux sont les seuls à pouvoir profiter de l’herbe verte et du paysage. 

Pour être garde nature, il faut avoir la fibre du métier, (très) bien connaître son secteur, les espèces qui s’y trouvent. "Certes, on est dans la nature, mais c’est un boulot avant tout !", souligne Antony.

"C’est un travail de terrain. Il n’y a pas de journée type. On ne sait vraiment jamais sur quoi on va tomber."

"Globalement, je ne pense pas qu’on fasse très peur. On est là pour faire respecter des règles. Avec nos tenues, les randonneurs se doutent bien de la raison de notre présence. D’autres fois, on n'a pas à intervenir, on est juste là pour jeter un œil, s’assurer que tout va bien", détaille Antony. En période estivale, les comportements de certains marcheurs et bivouaqueurs sont les mêmes au fil des années. "Comme les feux de camp, les barbecues…", énumère le garde nature. Leur rôle est donc de pouvoir anticiper ces actes pour éviter le pire. 

Les gardes de la chaîne des Puys ne sont pas tout le temps en extérieur. Il y a aussi une partie plus administrative.

Quelques mètres avant le sommet, Antony s’arrête et montre sur la gauche un sentier de traverse. "Le tracé a été fait par l’activité humaine », précise-t-il. La montée jusqu’au puy de Côme s’est faite sans mauvaise surprise. "C’est très rare que l’on croise personne. La dernière fois que j’y suis allé, j’ai croisé six-huit personnes", souligne Lolei, en poste depuis 2021. En haut, on entend le tintement des cloches des brebis. Elles sont les maîtresses des lieux. L’une des missions estivales des gardes nature est d’assurer le respect des troupeaux. Et le binôme a des conseils à donner aux marcheurs. "Contourner les troupeaux, tenir les chiens en laisse…" En marchant le long du cratère, les deux gardes pointent en contrebas une parcelle d’herbe grillée. Les restes d’un feu, découvert au printemps dernier. "On espère que la nature recouvrira vite tout ça", disent-ils.

Informer à titre préventif

Mais heureusement, tout n’est pas négatif dans les comportements des promeneurs. Les deux gardes nature observent des mentalités qui évoluent. "Un certain nombre de choses sont rentrées dans les mœurs. Quand j’étais saisonnier début 2000 au sommet du Pariou, c’était n’importe quoi. Il y avait du monde partout, c’était open bar. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Ceux qui ne respectent pas les sentiers sont minoritaires, ça s’améliore." Et d’ajouter :  "Quand les gens sont dehors, ils ont l’impression qu’ils sont seuls à faire ce qu’ils font. Ils s’imaginent que ça n’aura pas de conséquences. Mais sur un site comme la chaîne des Puys, qui est hyper fréquenté, ils ne sont jamais les seuls à le faire, mais plusieurs centaines, voire plusieurs milliers." Une mentalité que déplore Antony. "Il y a encore un travail d’éducation et se sensibilisation à produire auprès des promeneurs."

Le terrain, matière première d'Anthony et Lolei.

En redescendant le puy de Côme, toujours pas de mauvaise surprise. Vers la fin de la marche, le binôme repère deux jeunes marcheuses. "Gros sacs sur le dos…", pointe Antony, l’air méfiant. Une fois à leur rencontre, les gardes rappellent les règles de conduite pour les bivouaqueurs. "Pas de campement de plus d’une nuit, respecter la faune, pas de feux." Les promeneuses acquiescent. Mais il était essentiel, selon Antony, d’intervenir à but préventif. "C’est typiquement le genre de personnes que l’on aurait pu croiser en soirée au mauvais endroit." Idem pour ce groupe de camping caristes à l’entrée de la forêt. Antony leur rappelle les règles : "Pas plus d’une seule nuit sur place, pas de tente de toit la nuit, pas de barbecue. Le chien doit être tenu en laisse."Ce genre de panneau indiquant la fermeture d'un sentier, les gardes nature se les font souvent arracher.

Retour dans le 4×4. Sur la route, un arrêt pour relever les plaques d’immatriculation de véhicules garés dans des chemins interdits. Le binôme repart pour la soirée, sans savoir ce qui les attendra.

Texte et photos : Adrien Fillon