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Июль
2024

Fanny Posvite dresse le portrait de son amie Clarisse Agbegnenou : "Tu te rappelles quand on se faisait belles ?"

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« Gnougnou, un journaliste vient de m’appeler pour parler de toi. Il voulait que je lui raconte des choses qu’on n’avait encore jamais lues sur toi. Ne t’inquiète pas : je n’ai pas dévoilé tous nos petits secrets. Je ne pourrais jamais trahir une amitié qui date d’une quinzaine d’années. Peut-être un peu plus. Ou un peu moins. Tu le sais : j’ai toujours eu un problème avec les dates.

Par contre, je suis sûre d’une chose : on s’est rencontrées au Pôle France Orléans. Même âge, même classe. Cela faisait déjà un an que tu étais là. Précoce, douée. Notre groupe de copines s’est rapidement constitué : Madeleine (Malonga), Lindsay (Tsang Sam Moi), toi et moi.

On adorait danser

Mon interlocuteur insiste pour savoir pourquoi nous sommes devenues amies. Franchement, cela ne s’explique pas. C’est comme lorsque tu tombes amoureuse, cela vient comme ça. Sans calculer, sans réfléchir. Le feeling est passé naturellement. J’ai vu des choses en toi. Des valeurs qui m’ont plu. La sincérité. La loyauté. La joie de vivre. Ah… qu’est ce qu’on a rigolé avec tous nos délires d’adolescentes. J’en ris encore aujourd’hui en y repensant. On adorait danser. Beaucoup. Passionnément. À la folie. Tu te rappelles lorsqu’on se faisait belles les mercredis pour sortir en ville avant d’aller à l’entraînement ?

Une fois sur le tapis, tu ne rigolais plus. T’étais forte. Tu obtenais déjà des résultats à l’international. Et tu travaillais dur. D’ailleurs, c’est ce qui caractérisait notre groupe. Nous étions des bosseuses. Nous voulions aller loin. Et on se tirait mutuellement vers le haut. Cela ne nous faisait pas peur de bastonner avec les garçons lors des entraînements mixtes. Franck (Decroix, l’entraîneur du Pôle France) avait d’ailleurs rapidement compris que tu avais besoin d’une adversité forte.

Tu as vite rejoint l’Insep, la fabrique des champions. Tu as été en avance sur moi dans les résultats à l’international. Mais nous avons toujours gardé ce lien. Fort. Toujours là l’une pour l’autre. En 2015, au Kazakhstan (Astana), nous étions toutes les deux sur le podium des championnats du monde. Médaille d’argent pour toi (-63 kg), médaille de bronze pour moi (-70 kg).

Une amitié ne se résume pas à des instants de bonheur. Derrière les titres et podiums, il y a aussi tous ces moments de doute, de pleurs. De labeur, de peur. T’es une femme empathique “Gnourisse”. Lorsque tu as vu que les relations avec l’équipe de France devenaient compliquées pour moi, tu n’as pas hésité à me proposer de louer une maison ensemble lors des stages fédéraux à Temple-sur-Lot. C’est pour ça que tu es mon amie. Car je me sens bien quand tu es là.

Tu n’es pas seulement une championne…

Tout le monde ne peut pas en dire autant. Avec ton judo complet, ton travail et ta faculté à sentir les choses, tu as beaucoup gagné depuis nos débuts. Tu dégages une telle aura que lorsque tu démarres un combat tu as déjà gagné à 50 % tant tes adversaires te craignent…

Tu n’es pas seulement une championne. Grâce à ta notoriété, tu t’es engagée pour beaucoup de causes qui te tenaient à cœur. C’est beau, c’est fort. Repense à nos professeurs en terminale : peu d’entre eux t’auraient imaginé à cette place. À ta place. Tout en haut.

Quel est mon meilleur souvenir avec toi ? Il y en a eu plein. Le plus riche en émotions remonte à ta “gender reveal”. Je me suis sentie ridicule mais je dois l’avouer publiquement : j’ai pleuré. Lorsque je me suis rendu compte que tu allais devenir maman, j’étais tellement heureuse pour toi que j’ai craqué. Aujourd’hui, ta fille, “Nanoush”, est un véritable rayon de soleil. C’est facile de le dire après coup mais s’il y a une personne qui était capable de devenir maman puis revenir au sommet, c’est bien toi. T’es portée par une volonté de feu. Lorsque tu veux quelque chose, tu fais tout pour y arriver.

D’ailleurs, qu’on se dise les choses : tu vas remporter les Jeux Olympiques. Ce n’est pas un vœu ou un ordre. C’est une réalité. Je plains les filles qui vont croiser ta route… » 

Kevin CaoKevin.cao@centrefrance.com