La justice new-yorkaise restitue un autre dessin de l'Autrichien Schiele volé à un juif par les nazis
Dans le cadre d'une politique de restitution de milliers d'oeuvres d'art à une trentaine de pays et à des héritiers -- détenues illégalement par des musées et des collectionneurs américains et européens -- le parquet de Manhattan du procureur Alvin Bragg a rendu depuis 2023 dix dessins au crayon et à l'aquarelle d'Egon Schiele.
Lors d'une cérémonie émouvante au palais de justice de New York, en présence de membres des deux familles d'origine juive autrichienne, M. Bragg a annoncé la restitution de "Femme nue assise, vue de face" (1918).
"L'histoire derrière les oeuvres d'art volées par les nazis est atroce et tragique et ses conséquences se font encore sentir aujourd'hui sur les victimes et leurs familles", a dénoncé le magistrat.
Il a salué la coopération entre les deux familles juives, les Grünbaum et les Papanek.
Il faut dire que leur histoire est exceptionnelle.
Fritz Grünbaum était un collectionneur d'art juif autrichien et artiste de cabaret qui possédait plus de 400 oeuvres, dont 81 du célèbre expressionniste Schiele, avant d'être arrêté par les nazis en 1938 et assassiné à Dachau en 1941.
Avant de périr dans l'Holocauste, il avait dû signer une procuration au profit de sa femme. Laquelle avait été ensuite forcée de donner toute la collection aux nazis avant d'être déportée et tuée au camp de concentration de Maly Trostinec, près de Minsk.
Les oeuvres de Schiele volées ont circulé ensuite pendant des décennies entre des collectionneurs en Suisse, Autriche et aux Etats-Unis, où la famille juive autrichienne Papanek avait fui la guerre en 1940.
"Femme nue assise, vue de face" fut acheté en 1961 à New York par Ernst et Helene Papanek qui l'avaient offert à leur fils Gustav, lequel l'a gardé jusqu'à sa mort en 2022, a raconté le parquet de Manhattan.
"Nous pensons que restituer le dessin était la bonne chose à faire (...) L'expérience de nos deux familles doit nous rappeler à quel point le régime nazi incarnait le mal et la violence", a écrit dans un communiqué la famille Papanek.
Ce à quoi Timothy Reif, de la famille Grünbaum, a répondu: cela "envoie un message au monde: le crime ne paie pas et les autorités new-yorkaises n'ont jamais oublié les leçons les plus noires de la Seconde Guerre mondiale".