Quelle est la feuille de route de Jérôme Sigaud, le nouveau directeur de l’hôpital de Saint-Flour ?
Originaire de Saint-Etienne, Jérôme Sigaud, âgé de 53 ans, connaît bien le Cantal, où il vit depuis 2009, et mieux encore l’hôpital de Saint-Flour pour y avoir exercé comme infirmier.
Quel est votre parcours ? J’ai un parcours soignant puisque je suis infirmier diplômé d’état à la base. Puis j’ai été cadre de santé en 2015, cadre de santé référent « assurances qualité » en 2017, cadre supérieur de santé en 2018, faisant fonction directeur des soins. En 2020, j’ai glissé sur un poste de directeur des ressources humaines et directeur du système d’information sur le centre hospitalier de Brioude, puis directeur délégué d’Ehpad à Paulhaguet, puis directeur d’établissement médico-sanitaire, médico-socio, socio en 2022.
En juin 2022, j’ai été nommé directeur du centre hospitalier de Condat et de l’Ehpad de Riom-ès-Montagnes. En attendant que quelqu’un d’autre soit nommé, je conserve l’intérim et je partage donc mon temps : quatre jours par semaine à Saint-Flour et une journée à Condat et Riom. Mais je ne délaisse pas un établissement plus que l’autre car j’ai une mission et une responsabilité vis-à-vis de ces structures.
Pourquoi avoir accepté ce poste ? Je n’avais pas pensé initialement à candidater, mais j’étais attentif et un peu chagriné par la situation du CH de Saint-Flour, parce que c’est un établissement par lequel je suis passé à deux reprises et que j’y ai un attachement particulier, à titre professionnel, mais également personnel parce qu’habitant le secteur, c’est mon établissement de référence. Et je me suis dit finalement “si tu peux aider, pourquoi pas”.
Je considère qu’il faut impérativement que l’hôpital de Saint-Flour reprenne une dynamique de développement et perdure sur le territoire. Sa disparition ou son affaiblissement, c’est une catastrophe pour l’offre de soins territoriale. Ce n’est pas possible. Il faut arrêter de dire que l’hôpital de Saint-Flour est au bord de la catastrophe. Une chose est certaine, c’est qu’il y a un potentiel et une base sur cet établissement. Ok il y a un déficit, d’accord, il y a des problématiques de recrutements médicaux mais ce n’est pas qu’à Saint-Flour, j’avais les mêmes à Brioude. Et malheureusement, c’est national. Pour autant, on a des vacataires qui viennent et de manière périodique et régulière. Donc il y a une continuité de la prise en charge. Ce serait beaucoup plus inquiétant si on était dans la situation d’un établissement qui ne trouve pas de vacataires.
Vous arrivez dans un contexte particulier, vous étiez très attendu. Ça vous met la pression ? Oui et non. Effectivement, il y a eu des manifestations pour demander un directeur, je vous cache pas que c’est quand même assez exceptionnel. Je connais plus de secteurs où on a fait des manifestations pour demander le départ du directeur que pour demander un directeur. Donc c’est plutôt engageant, mais ça dénote aussi que les personnels en place ont une volonté de voir les choses avancer et voir les choses s’améliorer. Un directeur, ce n’est jamais qu’un chef d’orchestre. J’ai bien dit en arrivant que je ne faisais pas de miracle. Je ne suis pas un homme providentiel. Je suis un travailleur. Mais aussi travailleur que je sois, tout seul dans mon coin, je ne ferais rien.
Quelle a été votre première action ? Ça a été d’apporter des réponses concrètes sur des questions simples. Au moins, ça permet d’alléger la charge mentale des personnels.
Quelle est votre feuille de route ? Ma feuille de route, c’est de relancer une dynamique, relancer les projets, reparler du service d’urgences et de sa relocalisation, finaliser la mise en œuvre du projet IRM, et retravailler sur l’attractivité médicale pour sécuriser l’offre de soins. Mais ce que ma feuille de route n’est pas, c’est de fermer des structures, de fermer des activités, de supprimer des postes.
Et vos projets ? Dès le mois de septembre, on va travailler sur quatre axes, quatre piliers sur lesquels on va s’appuyer : relancer le projet d’établissement, le projet de relocalisation des urgences, le projet IRM et je souhaite qu’on fasse aussi un travail de fond sur l’accueil. Sur la dimension architecturale du bureau des entrées, mais aussi sur la notion de l’accueil du public, l’accueil téléphonique, l’accueil physique, car on a beaucoup de reproches. Et notre fonction première, c’est d’accueillir.
Et plus précisément, sur le service des urgences ? On va associer le projet de relocalisation avec le projet IRM, parce que dans une logique de parcours de soins, il faut que les urgences et l’imagerie soient à proximité. Il faut qu’on ait une vision peut-être un peu plus large et un peu plus ambitieue que ce qu’on a pu avoir jusqu’à présent. Peut-être qu’il faut réfléchir à une réhabilitation ou à une construction. Il faut revoir le projet entièrement. On va repartir d’une page pas tout à fait blanche, mais d’un cahier des charges et d’un attendu architectural qui corresponde et qui réponde aux besoins d’un service d’urgences.Moi, ce que j’aimerais, c’est qu’on puisse faire valider le projet au premier semestre 2025. Sa concrétisation physique dépendra ensuite de la nature des travaux. Si c’est un déménagement, ça peut aller relativement vite ; si c’est une réhabilitation ou une construction, ce sera un peu plus long.
Le service est-il toujours menacé de fermetures temporaires ? Au jour d’aujourd’hui, on peut dire qu’en juillet et août, le service des urgences devrait tourner, la maternité aussi. Il n’y a pas de fermeture programmée de services sur l’établissement cet été.
Quels sont les enjeux de votre mission ? C’est redonner confiance à la population et au personnel, mais aussi aux partenaires locaux. Car comme il y a eu des périodes d’incertitudes, on voit bien qu’au niveau de la collaboration par exemple avec la médecine de ville ou les acteurs de santé locaux, il y a eu une période de flottement où on a peut-être orienté les patients vers d’autres établissements, vers d’autres praticiens. Et ça commence déjà par travailler sur nous, pour dire “on a sécurisé les choses, nos prises en charges sont bonnes, on a les bons professionnels, ils sont qualifiés et aujourd’hui on est en mesure d’assurer cette prise en charge et ce service à la population”. On ne peut pas se centrer uniquement sur la structure. La problématique et les enjeux sont au-delà de la structure, c’est vraiment territorial.
Quel avenir voyez-vous pour l’hôpital de Saint-Flour ? Il y a du travail et il va falloir que tout le monde comprenne qu’il va falloir donner de sa personne. Mais, les fondations sont là. On part pas de zéro, on a une expérience, on a des professionnels qui sont investis, sur le territoire et sur l’établissement. Donc je vois l’avenir sereinement. Je ne suis pas inquiet. On a traversé une période trouble, on a des difficultés mais on a tout ce qu’il faut pour rebondir. Je suis convaincu que si on réimpulse une dynamique en redonnant confiance aux professionnels sur les projets et en leur donnant une réelle perspective, on va y arriver.
Isabelle Barnérias