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"Ennuyeux" mais "rassurant" : Keir Starmer, le nouveau Premier ministre britannique vu de l’étranger

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Ils mettent fin à 14 ans de pouvoir conservateur. Les travaillistes ont remporté, jeudi 4 juillet, les élections législatives au Royaume-Uni. Avec 410 sièges et une majorité sans appel selon les résultats de ce vendredi matin prenant en compte 639 des 650 circonscriptions, le parti de centre gauche revient en force dans le paysage politique outre-Manche.

Mené par Keir Starmer, 61 ans, qui vient d’être nommé Premier ministre par le roi Charles III, le Labour a bénéficié à plein de la soif de changement des électeurs, faisant plus qu’effacer sa cuisante défaite d’il y a cinq ans. Avant les élections, cet ancien avocat spécialisé dans les droits humains, élu au Parlement britannique depuis 2015, assurait qu’être le chef de l’opposition était "le travail le plus frustrant qu’il ait jamais fait" et qu’il était impatient de gouverner. Depuis qu’il est arrivé en 2020 à la tête du Labour, après la déroute électorale de 2019, il n’a pas dévié d’un iota dans sa stratégie de conquête du pouvoir.

"Les victoires électorales ne tombent pas du ciel. Elles se gagnent difficilement, en se battant très fort, et celle-ci n’a pu être gagnée que par un Labour transformé", a-t-il insisté. "Le changement commence maintenant", a aussi promis Keir Starmer, alors que la victoire travailliste doit beaucoup au rejet suscité par les conservateurs après une succession de crises et une campagne électorale désastreuse. Keir Starmer s’est évertué depuis son arrivée à la tête du Labour à remanier le parti, le recentrant sur le plan économique et écartant l’aile gauche, seule manière selon lui de revenir au pouvoir. Aujourd’hui, Keir Starmer "est en passe de devenir le Premier ministre britannique le plus puissant depuis Tony Blair", face à des conservateurs "anéantis dans le bain de sang des élections", constate l’édition européenne de Politico.

Un dirigeant décrit comme "ennuyeux"

Le nouveau Premier ministre, ex-directeur du parquet général d’Angleterre et du Pays de Galles, n’aura cependant pas la partie facile, avertit The Guardian, comme l’a repéré Courrier International. Certes, le leader du Labour a démontré qu’il avait "une discipline de fer, une détermination farouche et des compétences politiques". Mais "contrairement au dernier leader travailliste à avoir remporté les élections, Tony Blair, Keir Starmer héritera d’une économie fragile, de finances publiques tendues, d’une urgence climatique et de services publics en ruine", note le quotidien britannique.

La victoire massive de Keir Starmer vient couronner le travail d’un dirigeant austère et souvent jugé peu charismatique. Le futur Premier ministre est décrit par le New York Times comme un dirigeant "sérieux, intense, pragmatique et peu charismatique". "C’est un homme qui semble moins à l’aise dans l’arène politique que dans la salle d’audience où il excellait", estime le quotidien américain. Toujours selon ce dernier, Keir Starmer n’a pas "la qualité de star qui a marqué les précédents dirigeants britanniques aux portes du pouvoir, qu’il s’agisse de Margaret Thatcher, la championne du libre marché des années 1980, ou de Tony Blair, l’avatar de la 'Cool Britannia'". Son ton précis de juriste alimente son image un brin austère et peu charismatique. Un sentiment accentué durant la campagne des législatives, où il s’est montré plus prudent qu’enthousiasmant.

"Il a été férocement - certains diraient ennuyeux - dans sa discipline. Il ne va pas faire battre les cœurs, mais il a l’air relativement Premier ministre", déclare auprès du New York Times Jill Rutter, ancienne haut fonctionnaire et chercheuse au sein du groupe de recherche londonien UK in a Changing Europe. Bien qu’il ne soit pas un orateur naturel, ses discours se sont améliorés depuis ses débuts au Parlement. Pourtant, la réputation d’ennui persiste. "Comment Keir Starmer parvient-il à dynamiser une salle ?", a récemment demandé Gillian Keegan, la secrétaire d’Etat à l’Éducation du gouvernement de Rishi Sunak, avant de prononcer sa réplique : "Il la quitte."

Un fervent supporter d’Arsenal

Ces critiques irritent Keir Starmer. "Il n’aime pas être qualifié d’ennuyeux", affirme au New York Times Tom Baldwin, ancien conseiller du Parti travailliste qui a publié une biographie du nouveau Premier ministre britannique. "Personne n’aime être qualifié d’ennuyeux ; il n’aime vraiment pas ça", ajoute-t-il. Selon Tom Baldwin, les dirigeants conservateurs ont "réalisé tardivement" qu’être "ennuyeux" est une "qualité qui donne à Keir Starmer une allure résolument rassurante après le chaos politique et économique de ces dernières années", dit-il cette fois dans le Guardian.

Les amis de Keir Starmer le décrivent comme un homme doté d’un sens de l’humour. Malgré une opération au genou, Keir Starmer, qui a grandi dans la périphérie de Londres avec un frère et deux sœurs, un père distant et une mère atteinte d’une maladie articulaire rare qui l’a handicapée pendant des années, joue encore régulièrement au football et en compétition, indique le New York Times. Il est un fervent supporter d’Arsenal, le club de football qui joue non loin de sa maison du nord de Londres. Dans le Guardian, Tom Baldwin cite Mark Adams, qui le connaît depuis l’école : "Keir est un type normal qui a toujours aimé boire une pinte ou deux, dire des bêtises avec ses copains et jouer bien plus au football que ce qui est bon pour lui. C’est ainsi qu’il se reconnecte à son réseau privé et se ressource".

Pour son biographe Tim Baldwin, l’arrivée à Downing Street de Keir Starmer "ne signifie pas qu’il aura beaucoup changé la vie des autres. Mais si Keir Starmer veut rester suffisamment longtemps à Downing Street, il devrait essayer d’éviter de trop changer sa propre vie."