Pourquoi le scénario d'un gouvernement de techniciens... et sans RN est "vraisemblable" après le second tour
Parmi les scénarios possibles en cas de blocage institutionnel et de France ingouvernable au soir du 7 juillet, une hypothèse revient souvent depuis plusieurs jours : la naissance d'un gouvernement de techniciens. À l'instar de Jean Garrigues, qui confiait le soir du premier du tour à La Montagne Centre France voir se dessiner "l'hypothèse d’un gouvernement “technicien”, hors RN et sans couleur politique affirmée, qui pourrait être dominé par des ministres issus du centre-gauche", le professeur de droit public Christophe Boutin juge à son tour "vraisemblable" qu'un "gouvernement de techniciens" soit mis en place à l'issue du second tour des élections législatives.
Ce scénario n'interviendrait que si le Rassemblement national n'obtenait pas, à l'issue du 7 juillet, la majorité absolue, c'est-à-dire les 289 sièges nécessaires. "Si, en effet, l’un d’entre deux l’obtenait, la logique institutionnelle serait de lui confier les rênes du pouvoir, mais les sondages ne rendent pas pour l’instant cette éventualité très crédible", explique l'universitaire.
Autour du bloc centralPour Christophe Boutin, c'est autour du bloc central que se constituerait ce gouvernement de techniciens, ce qui aurait pour effet de renforcer la majorité présidentielle en évitant qu’une opposition divisée se regroupe, pouvant conduire au vote d’une motion de censure faisant chuter le gouvernement. "Quand vous êtes le bloc central, vous pouvez plus difficilement voir se fédérer l'extrême droite et l'extrême gauche pour vous faire sauter, quand bien même vous seriez le plus faible en nombre de députés. Alors que si le RN a une majorité relative et sur la même logique dit : "Nous allons faire un gouvernement de techniciens pour des mesures d'urgence", il pourra plus facilement voir se coaliser contre lui la majorité présidentielle et le front de gauche."
C'est un scénario vraisemblable, car on va nous dire : "C'est de la technique et pas de la politique". Donc, oublions les délires des extrêmes et revenons à la gestion, la gouvernance et la modération
Politique d'austéritéSelon ce scénario, la politique menée par ce gouvernement de techniciens porterait essentiellement sur des mesures urgentes relatives au budget et rimerait avec austérité, avec le fameux "there is no alternative" de Margaret Thatcher. "La France vient de se faire aligner par le FMI et sa politique a été mise en doute par l'UE. Il ne manque que la BCE. On n'est pas loin de se retrouver dans une situation à la grecque, ce qui n'a rien d'enviable. Ce gouvernement de techniciens s'alignera sur les demandes du FMI, sur les demandes de l'UE, c'est-à-dire sur la réduction de déficit. Il agira en expliquant qu'il ne peut faire autrement et qu'il faut éviter un destin à la grecque."
Des gens de la société civile dans le castingUn tel scénario permettrait à Emmanuel Macron de poursuivre son projet et aurait l'avantage d'apaiser les tensions politiques en France, en rassemblant experts et jeunes talents. Pour le casting, "il y aurait des gens de la société civile réputés pour leur compétence ; des politiques passés par des institutions réputées neutres comme le Conseil constitutionnel, le Conseil d'État, la Cour des comptes ; quelques politiques blanchis sous le harnais dont les noms rappelleront des bons souvenirs à une partie âgée de la population qui vote en masse ; et, enfin, quelques jeunes visages avenants, issus de la diversité."
Nicolas Faucon