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Май
2024

La contrôleure générale des prisons dénonce le sort "infect" des captifs et des agents

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Mis en ligne mercredi 15 mai, au lendemain de l'attaque meurtrière d'un fourgon pénitencier, en Normandie, le rapport annuel de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), Dominique Simonnot, dresse un tableau accablant de la situation dans les prisons et autres lieux de privation de liberté en France.

La CGLPL est l'autorité administrative indépendante chargée de défendre les droits fondamentaux dans les prisons, mais aussi les hôpitaux psychiatriques, les centres de rétention administrative (CRA), les centres éducatifs fermés (CEF) et les locaux de garde à vue. "Aggravation dramatique de la surpopulation carcérale", "profonde crise démographique de la psychiatrie", "carcéralisation croissante de la rétention administrative des étrangers", "atteintes aux droits persistantes en garde à vue" et "structures toujours précaires" des centres éducatifs fermés...

Le rapport d'activité annuel de la CGLPL est sans appel. Ainsi, "avec 77.450 détenus pour 61.570 places au 1er avril et un taux d’occupation moyen des maisons d’arrêt à 150,4% (avec des pics à 250%), la France atteint chaque mois de nouveaux records d’incarcérations", déplore le rapport. Il préconise notamment "la mise en place, dans la loi, d’une régulation carcérale".

"Pas plus de prisonniers que de places. Est-ce anormal ? Pourquoi l’Allemagne a-t-elle réussi là où la France rate tout ?".

Cellules infestées 

Le constat de l'institution est effrayant. "Les cellules individuelles n’atteignent jamais 9 m² et sont le plus souvent doublées, voire triplées. L’espace disponible par personne, une fois déduite la surface des sanitaires et du mobilier, est le plus souvent très inférieure à 3 m²", indique le rapport.

"Dans plusieurs établissements, l’état des abords est épouvantable, ce qui attire rats, pigeons, mouettes et chats qui, parfois, s’introduisent jusque dans les cellules (...) Dans un établissement, les punaises de lit prolifèrent au point que les personnes détenues sont recouvertes de piqûres et que certaines en ont des cicatrices", décrit encore le rapport, précisant encore que "les détenus dormant sur un matelas par terre se trouvent contraints de boucher leur nez et leurs oreilles avec du papier toilette afin d’éviter que des cafards s’y introduisent". Au 1er avril, 3.307 détenus étaient contraints de dormir sur un matelas posé à même le sol de leur cellule, selon les données officielles du ministère de la justice.

Effectifs d'agents insuffisants

Si le sort des détenus est peu enviable, que dire de celui du personnel pénitentiaire qui fonctionne "avec des effectifs de plus en plus tendus" ? "Dans la plupart des prisons contrôlées" par la CGLPL, "les effectifs sont en nombre cruellement insuffisant."

"Plusieurs établissements s’accoutument à un fonctionnement très détérioré qui finit par devenir la norme. Les professionnels sont épuisés, marqués par leur impuissance professionnelle."

Dans ces conditions, les faits de violence augmentent dans certains établissements. Le document relate ainsi le cas d’un détenu incarcéré pour la première fois, en exécution de diverses courtes peines, qui "a subi des faits de viol et des actes de torture pendant toute une nuit au mois de janvier 2023".

Le rapport de 182 pages, disponible en librairie jeudi, évoque également la situation dramatique dans les hôpitaux psychiatriques où le manque de médecins et de personnel soignant a atteint "un stade d'extrême gravité". 

Un sort "infect"

La CGLPL propose régulièrement des "recommandations" aux pouvoirs publics pour améliorer la situation dans les lieux de privation de liberté, mais, au cours des six dernières années, les réponses des autorités sont restées "souvent parcellaires". 

"Il est difficile de défendre les droits de ceux qu’une société n’aime pas, ne veut pas regarder et se moque bien des mauvais traitements qui leur sont infligés."

"Difficile également, de devoir répéter qu’il est inconcevable, en France, d’abandonner à un sort, souvent infect, les captifs et avec eux, ceux chargés de les garder, de les surveiller, de les soigner, de les accompagner", a-t-elle ajouté.

Avec AFP