La déportation partagée de deux jeunes gars du Bourbonnais
L’aîné était né à Cusset en 1914. "Bébert", lui, a vu le jour à Bellerive sept ans plus tard. Le premier se voit réquisitionné par le STO (Service du travail obligatoire) entre juillet 1943 et mars 1944, mais profite d’une permission pour se cacher sous une fausse identité. Le second quitte les chantiers de jeunesse et échappe au STO en trouvant du travail à Clermont, comme Roger.
Les deux hommes se retrouvent dans la même pension mais après l’arrestation des propriétaires par la Gestapo, cette dernière laisse un des leurs sur place qui n’aura plus qu’à cueillir nos deux protagonistes quand ces derniers viendront récupérer affaires et papiers. On est le 5 mai 1944.
Transférés au siège de la Gestapo à Royat et internés au 92e régiment, ces derniers sont interrogés puis envoyés à Compiègne avant d’être expédiés "sous une forte chaleur et sans eaus à Neugamme, puis au camp de Sachsenhausen. Là, ils font "connaissance avec l’univers concentrationnaire avec ses brimades et tortures, le manque de nourriture et d’hygiène, le travail forcé."
La liberté au bout d'un effroyable carnageL’espoir reviendra avec les premiers bruits concernant le débarquement des alliés. Avril 1945, le camp est évacué à marche forcée. Roger a pu consigner cette évacuation sur un petit carnet. "25 avril, bois de Below, 30.000 gars avec rien à manger, on ne trouve plus une seule herbe dans le bois… salauds de boches qui pas contents de cela, nous tiraient dessus… lorsqu’un camarade ne pouvait plus suivre, on l’aidait mais on ne pouvait le porter… obligé de le laisser sur le bord de la route… à peine quelques mètres et on entendait la détonation fatale… des centaines ont perdu la vie si près de la liberté…"
Avec l'UNC, la flamme des anciens combattants intacte à Vichy
Le 29 avril, ils sont enfin ravitaillés par La Croix Rouge, "mais les estomacs resserrés refusent de digérer… tout le monde est malade". Le convoi de la mort est finalement libéré par les Russes le 2 mai. Le retour en France prendra plus d’un mois. Pritzwalk, Parchim, où ils retrouvent les Américains, Lübtheen, Lunebourg avec "pain blanc, trois tranches de singe, confiture et margarine. Passage des frontières hollandaise puis belge le 29 mai."
Roger et Bébert retrouvent enfin leurs parents en gare de Vichy, le 4 juin, à deux heures du matin, un an jour pour jour après leur départ de Compiègne pour les camps. Deux corps très amaigris…