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Апрель
2024

"Redonner de la nourriture à la Dore" : des actions envisagées pour améliorer son état écologique

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L’extraction de matériaux pour la construction dans la Dore par le passé a des répercussions aujourd’hui. Des actions sont à l’étude pour améliorer son état.

"Bienvenue au bord de la Dore. Vous êtes en rive gauche." Des professionnels de la rivière étaient réunis, jeudi 11 avril, à Dorat, sur un site qui sera l’un des premiers à bénéficier d’un nouveau programme d’actions environnementales. À deux pas du cours d’eau, Sylvain Saxer, chargé de mission au parc naturel régional Livradois-Forez, montre à l’assemblée des cartes et des schémas pour expliquer les enjeux.

Tout débute dans les années 1950, lorsque l’Homme a commencé à puiser dans les cours d’eau des matériaux pour la construction : du sable, des graviers, des pierres… C’est ainsi que sont apparus des plans d’eau, comme les sablières de Courty, à Iloa. Mais ces prélèvements ont également eu des effets sur la rivière en elle-même. "On les avait sous-estimés et aujourd’hui, on en paye les conséquences", commence Sylvain Saxer.

Un enjeu de réserve d’eau potable

Le Parc étudie donc la Dore, de Courpière à la confluence avec l’Allier pour identifier les perturbations qu’elle a subies. Le constat principal, c’est qu’elle s’est enfoncée. "Entre 1935 et 2023, au niveau de Pont-de-Dore, la rivière a perdu 2,5 mètres d’altitude", poursuit-il. Ce n’est pas qu’il y a eu des prélèvements à cet endroit-là, mais ceux qui ont été effectués à d’autres endroits de la rivière, par exemple à Iloa en aval, ont eu des répercussions plus globales, même en amont donc, par un phénomène appelé "d’érosion régressive".

Mais en quoi le fait que la rivière s’enfonce pose-t-il problème ? À plusieurs égards.D’abord, lorsque les rivières se creusent, les berges deviennent plus hautes, donc plus fragiles. Ensuite, et surtout, il y a moins de matériaux qui tapissent le fond de la rivière, ceux-là qui filtrent l’eau pour former les nappes phréatiques. "Si la rivière se creuse, la nappe descend, donc la réserve d’eau potable disponible diminue d’autant", décrit Sylvain Saxer. Dans le cadre du réchauffement climatique et de la baisse des réserves d’eau potable, l’enjeu n’est pas négligeable. "On a eu trois années de sécheresse", rappelle avec inquiétude Guy Pradelle, président du Syndicat Intercommunal Eau et Assainissement Rive droite de la Dore.

La problématique des enrochements

Naturellement, la rivière érode ses berges, ce qui lui permet de gagner des matériaux. Mais elle en est empêchée à certains endroits par des enrochements artificiels qui ont été construits entre les années 1960 et 1990 pour protéger les terres.

Aujourd’hui, la construction de nouveaux enrochements est interdite par la loi, sauf en cas d’utilité publique. De plus, l’Union Européenne a donné l’objectif d’atteindre un "bon état écologique" de tous ses cours d’eau. C’est dans ce cadre que le Parc souhaite mettre en place des actions d’amélioration (*). Un programme d’actions va être mis en place pour ramener des matériaux dans la rivière, à long terme.

Une première à Dorat

L’une des premières sera donc à Dorat, non loin du stade, où malgré l’enrochement, la berge est déstabilisée depuis plusieurs années. La collectivité publique a racheté les parcelles en bord de rivière pour avoir la maîtrise foncière et mettre en place cette action de correction. Après une étude, des travaux de désenrochement sont envisagés, en 2025. Ensuite, ce sera à la Dore de venir éroder et prendre ce dont elle a besoin pour son bon état écologique.

J’aime dire qu’on redonne de la nourriture à la rivière. Quand elle se creuse, c’est qu’elle n’a plus assez à manger sur les côtés

image Thomas Barnérias, maire de Dorat, vice-président de Thiers Dore et Montagne en charge de l’eau et délégué au grand cycle de l’eau de la Dore au syndicat mixte du Parc.

Un enrichississement de la biodiversité

Renaturer de la sorte des tronçons de rivière doit apporter, par la même occasion, un enrichissement de la biodiversité. "Deux expériences de désenrochement ont été menées sur l’Allier, raconte Julien Saillard, responsable de pôle au Conservatoire d’espaces naturels d’Auvergne. Sur l’une d’elles, l’été suivant, une colonie d’hirondelles s’est installée, la forêt alluviale s’est développée. C’est une nouvelle dynamique écologique qui se remet en route."

Mais, ajoute-t-il, "ce sont des sujets sensibles, car ces ouvrages avaient été vendus à l’époque comme s’ils allaient protéger de tous les aléas de la rivière. Forcément, l’idée de les enlever crée des craintes qui peuvent se comprendre."

Un sujet sensible

Les actions se feront donc pas à pas, dans la conciliation des usages et sans contrainte. "On ne va pas désenrocher là où il y a une utilité publique à ce qu’il y ait de l’enrochement", rassure Sylvain Saxer.

Là où on fera des travaux, c’est que cela ne va pas léser une agriculture ou une activité économique

ajoute Thomas Barnérias.

Pour l’instant, seul ce site de Dorat fait l’objet de projet de désenrochement. Trois autres sites ont été fléchés pour améliorer leur état écologique : un second à Dorat, un à Noalhat et un dernier à Escoutoux.

(*) Ces actions entrent dans le cadre du Contrat territorial Dore et du Contrat vert et bleu. Elles sont notamment financées par l’Agence de l’eau, la Région Aura, la taxe Gemapi. Elles sont portées par le parc Livradois-Forez, en partenariat avec le Conservatoire d’espaces naturels d’Auvergne et des communautés de communes comme Thiers Dore et Montagne.

Alice Chevrier