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Апрель
2024

Cette commune du Puy-de-Dôme ne s'en sort plus face au fléau des arrêtés de péril

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L’objet du débat, mardi 9 avril à l’occasion d’un conseil municipal, un arrêté de mise en sécurité mesure urgente (anciennement péril imminent) qui a été pris sur l’immeuble 15, rue des Grammonts, à Thiers, le 14 décembre 2022. Ce dernier enjoignait au propriétaire de réaliser des travaux d’urgence (notamment purger des cheminées, purge de la toiture et de la charpente effondrées puis reconstruction, purge et remplacement des planchers intermédiaires, mise en place de tirants métalliques pour liaisonner les deux façades). "Suite à l’inaction du propriétaire, la Ville est contrainte de se substituer afin de réaliser des travaux visant à assurer la sécurité publique", a indiqué Stéphane Rodier, le maire. Un marché de travaux a été conclu pour un montant total de 229.871 € HT.

Des dépenses à fonds perdu

"Nous ne sommes pas propriétaires de cet immeuble, le propriétaire est défaillant apparemment. Ce sont des travaux qui seront à fonds perdu et c’est une somme relativement importante. Est-il possible d’avoir un recours et de faire acte de propriété pour qu’au moins la commune puisse bénéficier de l’immeuble ?", a interrogé Annie Chevaldonné du groupe Gauche solidaire et écologiste. Remettant ainsi à l’ordre du jour l’éternel débat des périls.

Le maire de Thiers a profité de cette question pour rappeler la difficulté à laquelle fait face la municipalité.

C’est toujours à fonds perdu… Nous avons dû récupérer 500 ou 600.000 €, ce qui est peu par rapport aux montants engagés par la mairie. La question qui se pose aujourd’hui est : Comment fait-on pour faire évoluer le cadre législatif ? Car un maire qui ne prendrait pas un arrêté de péril alors qu’il y a un danger prend un risque juridique.

Depuis son élection, l’équipe municipale que mène Stéphane Rodier a déjà dépensé 3 M€ pour de la mise en sécurité. L’option d’achat de tous ces immeubles en état de délabrement très avancé semble donc impossible. Et l’option de destruction peut être envisagée dans certains cas, comme celui de la rue Patural-Puy, mais pas dans tous.

Concernant le cas du 15, rue des Grammonts, "il y a 2 ans et demi on a rencontré le propriétaire et on l’a alerté sur la situation", a présenté David Derossis, adjoint en charge de l’urbanisme. "Les tuiles étaient déjà en train de tomber, il y en avait pour environ 5.000 € de travaux. Deux ans et demi après, on en est là, le toit s’est effondré à l’intérieur, les planchers aussi. Il y a de vrais problèmes structurels et il n’est pas isolé, c’est tout un îlot. C’est pour cela que les travaux sont si coûteux. La solution trouvée aujourd’hui est malheureusement la moins mauvaise qu’on ait." Si ce cas s’est envenimé avec le temps, la mairie n’en reste pas moins très vigilante. "Nous avons des équipes sur le terrain, et des riverains nous alertent également, et dans 80 % des cas, lorsqu’on alerte les propriétaires, ils font ce qu’il faut", a assuré l’adjoint.

Une action de prévention

L’action de prévention n’est donc pas vaine. Éric Boucourt, élu du groupe Mieux vivre à Thiers l’a reconnu. Mais a aussi mis en avant l’importance de faire remonter le sujet à un plus haut niveau politique. " Vous avez créé un budget annexe, ce qui est une bonne chose, mais nous avons dû l’abonder plusieurs fois, cela aura ses limites."  Il a profité de ces échanges pour formuler un vœu très clair : 

Les maires n’ont pas les outils suffisants pour répondre à toutes ces questions. Il faut relancer le sujet auprès de notre sénateur et de notre député. Il faut impérativement outiller les municipalités, nous ne sommes pas les seuls.

Le travail avance en ce sens de l’aveu du maire, mais la route semble encore longue. "Nous savons qu’à terme ce budget annexe est une bombe à retardement. J’ai un dossier préparé par les services sur le sujet, et dès que j’en ai l’occasion, lorsque je rencontre des personnes placées dans les plus hautes instances, je leur remets, et je vous invite à faire de même."

D’ici à la fin du mandat, nous allons engager un travail sur cette question. Les périls, cela ne concerne pas que Thiers. Cela représente énormément de biens en France, et plus particulièrement dans des communes en difficultés financières, de taille moyenne.

Pour tenter d’endiguer le problème de ces dépenses à fonds perdu, André Chassaigne et Julien Brugerolles ont imaginé la création d’un fonds spécifique destiné à la prise en charge des périls. "Sur le même modèle que le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds Barnier", illustre le suppléant du député. L’idée serait que lorsqu’une commune est confrontée à un péril imminent, nécessitant des travaux, elle puisse solliciter ce fonds. Mais à ce jour, cette idée n’est qu’à l’état de projet. "C’est dans les tuyaux, assure Julien Brugerolles. Nous avons déjà eu des discussions informelles à ce propos. Sur la politique du logement, les périls doivent être la priorité, car ça ne peut plus tenir comme ça", termine-t-il.

Une majorité de périls imminents

Dans une question adressée au gouvernement en août 2022, Éric Gold, sénateur du Puy-de-Dôme, s’est, lui aussi, emparé du sujet.

J’ai eu une réponse, à mon sens pas satisfaisante, en octobre 2022. Depuis je relance le sujet à chaque changement de ministre, mais le sujet n’est pas vraiment à l’ordre du jour.

Sa question était simple : "Comment le gouvernement compte apporter son soutien aux communes face à la problématique des périls??" La réponse, elle, l’est un peu moins. Le ministre délégué auprès du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, chargé de la Ville et du Logement, Olivier Klein, a mis en avant une simplification des procédures notamment, et une aide pour financer les travaux engagés à hauteur de 50 % de l’agence nationale de l’habitat (Anah).

"Mais ce n’est que pour les périls ordinaires, corrige Stéphane Rodier, maire de Thiers. Et l’immense majorité de nos périls sont imminents et ce sont ceux-là qui coûtent le plus cher. Depuis quelque temps, nous tentons de prendre le problème à la racine avec les périls ordinaires, mais c’est assez nouveau", indique le premier magistrat.

Sarah Douvizy