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Апрель
2024

Quand Tesla injecte "29 kilos de mousse collante dans ses batteries" : place à la voiture non réparable et donc jetable ?

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Après le textile, le secteur automobile est-il, lui aussi, en train de céder aux sirènes de la « fast fashion », autrement dit de la mode (très) éphémère fondée sur une surconsommation effrénée?? C’est la question que pose l’association Halte à l’obsolescence programmée (HOP), dans une enquête fouillée publiée ce mercredi 17 avril.

En cause, la « concurrence acharnée » à laquelle se livrent les constructeurs, entre nouveaux entrants aux dents longues et marques historiques décidées à défendre leur bout de gras.

« Certains acteurs émergents cherchent à bousculer les normes et pratiques existantes pour faire leur place et tirer les coûts de production vers le bas. Le risque, c’est de créer un mouvement général et que tout le monde suive la tendance », relève Flavie Vonderscher, responsable du plaidoyer à HOP.

Des batteries parfois impossibles à réparer

Les conséquences sont multiples, filières électrique et thermiques confondues. Dans la première, présentée comme « un gage de fiabilité et de durée de vie accrues », conjuguées à « des coûts de maintenance plus faibles », les regards – et les interrogations – convergent notamment vers les batteries.

« Contrairement à ce qui est souvent dit ou cru, des pannes électroniques, de connectique ou chimiques sur cet élément central, qui représente 30 à 40% de la valeur du véhicule, sont possibles. »

Encore faut-il pouvoir réparer… « Une batterie se présente comme un pack comprenant plusieurs modules, reprend la militante. Le plus simple, en cas de défaillance, est de changer uniquement le module endommagé. En plus d’être bien plus vertueux sur le plan environnemental, c’est dix fois moins cher que de remplacer l’intégralité du pack. Le problème, c’est que certains constructeurs, notamment Tesla et BYD, ont opté pour des techniques qui compliquent au maximum toute intervention, ou qui rendent même les batteries carrément non réparables. »

Exemples : le scellement des couvercles avec du silicone, mais aussi l’application de colle ou de résine qui empêche le retrait d’un seul module. Jusqu’à fin 2022, Tesla injectait « 29 kg de mousse collante rose dans ses batteries ». Plutôt dissuasif, forcément...

Le casse-tête du "giga casting" et de l'ultra-connexion

HOP dénonce une autre pratique semble-t-il très courue, appelée « giga casting », qui consiste à couler plusieurs parties d’un même véhicule dans un seul et même « giga moule », afin de réduire drastiquement les coûts sur la chaîne d’assemblage.

« Sur l’un de ses modèles, Tesla a ainsi pu remplacer 70 pièces de l’arrière de la voiture par seulement deux pièces en métal, illustre Flavie Vonderscher. Tout incident ou choc, même minime, sur cette partie, va donc nécessairement impliquer un changement beaucoup plus large, et donc un coût exorbitant?! » Au point, déplore HOP, qu’il sera « probablement plus rentable d’envoyer la voiture à la casse » que de la réparer…

Photo l'Echo républicain

L’avènement de la voiture ultra-connectée est également source d’incertitudes en pagaille. L’obsolescence peut alors frapper les logiciels, via l’arrêt des mises à jour – il n’existe aucun cadre contraignant en la matière –, ou tout simplement les composants électroniques, qui peuvent être aussi fragiles que difficiles, voire impossibles à remplacer.

Gare, donc, aux fausses bonnes affaires. « On nous vend des voitures à des prix alléchants – comme la BYD Seagull, une électrique à moins de 10.000 €. Mais ces modèles cachent en réalité des coûts d’entretien et de maintenance très importants, et une durabilité incertaine », pointe Flavie Vonderscher.

Revendications et pétition en ligne

Face à ces pratiques qui menacent de détricoter un modèle existant jugé « plutôt opérationnel en matière d’économie circulaire, avec une filière de réparation performante et une durée de vie moyenne estimée à 19 ans pour un véhicule en France », HOP appelle à « mettre un stop aux nouveaux véhicules jetables ».

L’association réclame notamment l’instauration, pour toutes les voitures électriques et thermiques, d’une « durée légale de mise à disposition des pièces détachées, y compris les batteries. « Cela existe déjà pour les smartphones, avec une obligation qui court sur cinq ans, bientôt sept. Pour le secteur automobile, nous réclamons le même dispositif, mais sur 20 ans. »

Dans le même esprit, HOP plaide également pour la création de « garanties de réparabilité des batteries ». Une « pétition citoyenne » vient d’ailleurs d’être lancée sur internet, afin de peser dans le débat et de sensibiliser les candidats aux élections européennes. Objectif : 10.000 signatures.