ru24.pro
World News in French
Март
2024

"Je lui dois ce que je suis..." : Kaddour, une ode à l'amour paternel signée Rachida Brakni, attendue samedi à Vichy

0

Elle est une figure du monde culturel, entre ses engagements au théâtre, au cinéma, à la télévision, et même dans la chanson. Autant d’activités ayant un dénominateur commun : l’amour des mots. Alors, Rachida Brakni ne pouvait que franchir le pas de l’écriture. C'est chose faite, avec Kaddour (ed.Stock). Rencontre, en marge de sa venue à Vichy, ce samedi, à l'occasion des Grandes rencontres 2024.

Votre premier livre, Kaddour, chez Stock, est intimement marqué par la figure de votre père, décédé durant la crise sanitaire. Pourquoi ce choix ?

Mon père Kaddour est décédé en août 2020. Or, avec les restrictions de l’époque, nous n’avons pas su jusqu’au dernier moment si son corps pourrait ou non être rapatrié en Algérie comme il le souhaitait. Ce sont ces jours d’incertitude, d’urgence, que je raconte dans ce livre où j’ai trouvé l’opportunité de dresser le portrait de mon père, de s’intéresser à son histoire. J'ai voulu relater tout ce qu'il m'avait appris du rapport à la terre, à la langue. En filigrane, il y a aussi un portrait de moi. 

Tatiana de Rosnay, Rachida Brakni, Jérôme Fourquet... Le casting 2024 des Grandes rencontres de Vichy dévoilé

Et l'histoire de votre père, à quoi ressemble-t-elle ?

Elle est celle d’un homme qui avait quitté l’Algérie à 18 ans, qui a mené une vie d’ouvrier puis de chauffeur routier. Une vie d’exilé, qui n’a jamais pu retourner au pays, qui n’était pas tout à fait d’ici, mais qui n’était plus de là-bas. C’était un homme taiseux, avec qui j’ai vécu en région parisienne une enfance sans superflu mais empreinte d’amour et de respect. On avait un rapport de confiance et d'égalité. J’ai eu cette chance d’avoir des parents qui m’ont toujours accompagnée.

Au départ, vous envisagiez d’ailleurs une carrière d’avocate…

Oui, et c’est parce que j’ai pensé que le théâtre pouvait m’aider dans l’exercice de la plaidoirie, que j’ai pris des cours. J’ai découvert les textes de Racine, Molière, Sénèque, et c’est là que ma vocation est née.

"J’ai toujours eu ce désir d’écrire, même si je me le suis longtemps interdit. Comédienne, on prononce les mots des autres. Là, il fallait trouver mes mots"

Se sent-on d’autant plus obligée de réussir quand ses parents ont connu une vie de labeur, de sacrifices ?

Bien sûr, je me sentais redevable de ce qu’ils m’avaient donné. Mes parents ont toujours été derrière moi, dès l’école, qui pour eux était fondamentale. Alors, je voulais tellement pouvoir les aider… Quand j’ai été engagée à la Comédie française, ça a été un vrai soulagement.

Comment aborde-t-on l’écriture d’un premier roman ?

J’ai toujours eu ce désir d’écrire, même si je me le suis longtemps interdit. Comédienne, on prononce les mots des autres. Là, il fallait trouver mes mots. Mais j’avais besoin de raconter cette histoire, guidée aussi par le souhait de travailler le style, la musicalité des mots. Pour mon père, j’ai voulu confectionner la plus belle des broderies, au travers d’un exercice, l’écriture, qui est aussi un exercice de solitude. Mais j’y ai pris un plaisir fou.

Avez-vous des références littéraires ?

Oui des auteurs comme Toni Morrison, Laurent Mauvignier, et surtout Annie Ernaux. D’elle, plus jeune, j’avais lu La Place, un livre qui m’a marqué, où elle parle également de son père.

Votre père dont, entre autres anecdotes, vous dites qu’il ressemblait follement à Louis de Funès…

C’était son portrait craché ! Un jour, sur un parking de supermarché, une dame lui avait demandé un autographe, et il avait signé. Elle avait dit « merci », et il s’était trahi au moment de dire « de rien » avec son accent. La dame était partie en courant (rires).

=> Rendez-vous. Rachida Brakni sera présente aux Grandes rencontres de Vichy, au Palais des Congrès, ce samedi 9 mars, à 17 h 30. Les autres invités de cette édition 2024, qui se tient samedi et dimanche, sont Tatiana de Rosnay, Christiane Rancé, Pascal Bruckner, Jérome Fourquet. Programme complet sur le site des Grandes rencontres de Vichy.

Pierre Geraudie